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Martha
Martha Browne arriva à Whitby par un bel après-midi de septembre, sûre de sa destinée.
Pendant tout le trajet elle avait regardé défiler le paysage par la vitre de l’autocar, l’avait vu devenir de plus en plus irréel. Dans les landes de Fylingdales, les détecteurs de missiles lui avaient fait penser à des balles de golf géantes posées en équilibre au bord de trous. Tout autour, la bruyère était en fleur – non pas pourpre, comme le chantaient les ballades d’autrefois, mais d’un bordeaux plus délicat, veiné de rose. Puis les landes avaient cédé la place à une étendue de terres arables aussi ondoyantes que les vagues vertes et glaciales de la mer où elles se finissaient, et Martha avait compris ce que Dylan Thomas entendait par « le vert du feu de l’herbe ».
La mer comme le ciel étaient d’un bleu aveuglant et la ville, nichée au creux de la baie, dessinait un patchwork de toitures en tuiles rouges flanqué par deux falaises abruptes. Tout était trop vibrant, trop criard, pour être vrai ; le décor évoquait un tableau, aussi torturé à sa façon que les champs de blé et les nuits étoilées de Van Gogh.
Afficher en entierLa mémoire est une chose curieuse. Parfois, on se souvient d’événements qui se sont passés pendant qu’on dormait ou qu’on était inconscient. Quand on a les yeux fermés, on ne voit rien, c’est évident, mais on peut entendre, sentir. Et parfois ces sensations nous reviennent en rêve, traduites en images par l’inconscient. Je ne suis pas spécialement freudienne, mais je pense quand même que nos rêves sont très révélateurs.
Afficher en entierLibérée de sa prison de verre, la rose parut dresser la tête dans la tiédeur de la brise, ses pétales pourpres s’ouvrirent, pâlis par le clair de lune, puis elle ploya lentement, et fut emportée par le ressac.
Afficher en entierLes beaux rêves n’avaient commencé qu’après que son ciel intérieur se fut éclairci. Elle avait l’impression d’avoir dans la tête un gros nuage noir, mais peut-être n’était-ce qu’une bulle. C’était opaque, et quel que fût l’angle sous lequel elle le regardait, ça résistait à la lumière et elle ne pouvait en voir l’intérieur. Elle savait que ça contenait la raison de ses souffrances, de sa colère, et pourtant l’accès lui en demeurait interdit.
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