Commentaires de livres faits par Root
Extraits de livres par Root
Commentaires de livres appréciés par Root
Extraits de livres appréciés par Root
— Dis toujours.
— Tu as déjà souffert par amour ?
— Non, tu le sais bien. Je ne suis jamais tombé amoureux. C’est mon grand malheur.
— Parfois je t’envie. Moi, je ne suis jamais resté amoureux, c’est pire.
– Oui ?
Son sourcil monta.
– Oui, monsieur l’abbé ?
– La musique peut être un pas vers Dieu. Le dernier pas, lorsque l’on est tout proche. Pour toi qui es loin de Lui, c’est une distraction. Un leurre, une tentation.
– Mais Beethoven…
– Beethoven ne croyait qu’en lui-même. Et Dieu, qui est sage, s’est dit même. Et Dieu, qui est sage, s’est dit qu’un homme qui ne l’écoutait pas pouvait bien finir sourd, pour ce que ça changeait.
— Parce que ma vie a commencé à quarante ans. Le soir où j’ai rencontré la femme de ma vie. Je ne me souviens pas de mes quarante premières années. Ma vie s’est terminée cinq ans plus tard, le soir où elle m’a quitté. En fait, mon existence aura duré cinq ans. C’est déjà pas si mal. Il y a des gens qui passent toute une vie à ne pas exister.
vigueur des êtres qui viennent de naître.
Toutes proportions gardées.
Et non, nous ne serions pas comme ça éternellement. Nous le savions, à un niveau rationnel. Mais l’idée que ces silhouettes aux allures de déchets qui se déplaçaient en titubant dans la grande maison étaient une vision de ce qui nous attendait – plutôt crever.
Avaient-ils déjà eu des buts dans la vie ? Avaient-ils seulement idée de ce qu’était l’amour-propre ?
Ils nous faisaient honte. Ils étaient un récit édifiant.
Les vraies gens.
Les entiers.
Les intègres.
Ceux que l’on ne remarque pas, ceux qui ne brillent que chez eux, dans le cadre de leur intimité préservée, ou dans un open space, auréolés de performances dont elle n’est plus capable depuis des mois déjà.
Ceux qui ne se doutent même pas qu’il pourrait en être autrement.
Ceux qui savent bien que oui, bien sûr, un jour ils seront vieux et diminués, et que la fumée de clope qu’ils avalent religieusement toutes les demi-heures finira par leur boursoufler les poumons d’un joli cancer contemporain, mais qui, au fond, n’en ont aucune idée véritable.
Les vaniteux.
Les naïfs.
Les chanceux.
Elle ne les méprise pas.
Elle a fait partie d’eux.
Elle était pire qu’eux.
Le port de tête altier, la queue-de-cheval haute, l’air poliment pincé de dégoût face aux silhouettes qui se dérobaient à ses standards minimum en matière d’apparence physique, la main vernie crispée autour de la lanière d’un sac trop rempli pour qu’elle ait conscience de l’intégralité de son contenu, les talons qui claquent et le sourire qui craque à force d’avoir été remisé dans un coin.
Elle était belle, elle le savait.
Heureuse aussi, presque.
— Maman… c’est eux qu’ont commencé. Je te le jure », dit Brady.
Si Kate n’avait pas su à quoi s’en tenir, elle l’aurait cru. Bien évidemment, elle sait que Brady est encore trop petit et trop enfant de chœur pour causer de vrais dégâts. Mais que Dieu protège la cohorte de jolies filles qui monteront à l’arrière de sa voiture au lycée. Des filles comme Jenny Hertzog dans le pick-up de son demi-frère. Des filles qui voient une chose digne d’être sauvée et ne prennent pas le temps de remarquer que ce garçon ne veut pas être sauvé. Des filles qui refusent d’admettre que certains garçons sont très heureux de les traiter comme de la merde car elles semblent très heureuses d’être traitées de cette façon. Un jour, elle a vu une photo de Jerry enfant. Il avait tout du joli garçonnet innocent. Mais le joli garçonnet a grandi, et il s’est avéré qu’il aimait frapper des choses plus petites que lui. Kate Reese frissonne en prenant conscience de cette triste vérité : même les monstres sont adorables avant qu’ils grandissent.
Le printemps s’esquiva. Il s’éloigna furtivement dans les broussailles ; à sa place s’installa un été qui dessécha l’air, nous brûla les narines, encapsula la puanteur. Comme les couvercles des boîtes Tupperware.
Tous les jours, de l’école, avec un cartable trop lourd et un « cœur qui pèse. Remonter la grand-rue, les yeux rivés sur ses chaussures, ignorer les regards. Oublier qu’on est celle à qui personne ne parle. La rouquine. La bâtarde. La fille de l’autre. Celle devant qui on crache par terre, comme pour conjurer le sort. Celle qui n’est jamais invitée nulle part, qui n’est l’amie de personne, celle à qui on rend la « monnaie sans lui toucher la main. Elle se sent sale, et pourtant elle se lave, se frotte, se récure jusque sous les ongles, à chaque retour de l’école. Mais la sensation s’accroche, et lui colle à la peau.