Extraits

Vie sans dessert, santé de fer !

Normal, Madame Duchant, normal. L’individualisme n’a plus sa place dans une civilisation sociale aussi structurée que la nôtre. Pour dire les choses plus crûment, la liberté est devenue une forme d’hérésie qui doit être découragée pour le bien de tous.

- Monsieur Mortier ? Entrez. J’espérais votre visite… Notre syndicat a besoin d’hommes comme vous, Mortier. Plus nous serons nombreux, mieux nous pourrons assurer la défense des employés de notre société. Vous êtes venus pour vous inscrire, bien entendu…

- C’est-à-dire que… ça m’est égal de m’inscrire ou non à votre syndicat. Ce qui m’intéresse, c’est la nature exacte des activités de la C.A.G.

- Ecoutez, mon vieux, moi, mon boulot, c’est de m’occuper de vos revendications en matière de salaire et de conditions de travail, d’accord ? Si vous avez de telles revendications, revenez me voir. Mais pour le reste…

- Si vous avez l’un ou l’autre problème, vous ne devez pas hésiter à venir m’en parler, hein ?... Après tout, je ne suis pas le sous-chef du personnel pour rien !

- Eh bien… Justement, Monsieur, je voulais vous demander… Je n’ai pas encore très bien compris ce que faisait exactement la C.A.G….

- Voilà une excellente question, Mortier, elle dénote votre ouverture d’esprit, votre goût des responsabilités et tout l’intérêt que vous portez à la société qui vous emploie… Malheureusement, il faudra que vous trouviez quelqu’un de plus qualifié que moi pour y répondre, d’autant plus que j’ai une réunion qui commence dans cinq minutes. Mais n’oubliez pas, mon vieux : vous venez me voir quand vous voulez, d’accord ?

Vous êtes trop jeune pour vous souvenir du véritable enfer qu’étaient les vacances avant la nationalisation. Tout le monde voulait partir en même temps… Le pays n’était qu’un gigantesque embouteillage… Les campings étaient surpeuplés… On payait des prix exorbitants pour une nourriture immangeable… Et les gens rentraient énervés, grincheux, complètement fourbus. Quand ils rentraient, car des milliers d’entre eux mouraient chaque année sur la route… Enfin, il y avait ceux qui ne pouvaient jamais partir. C’est également en pensant à eux que la nationalisation des vacances a été décidée.

Vacances pour tous, Quentin, à un prix unique, et étalées sur toute l’année. Voila ce que nous sommes fiers d’avoir réalisé. N’importe quel citoyen peut bénéficier d’une période de l’année plus favorable en fonction de son dossier social.