Commentaires de livres faits par Saarah72
Extraits de livres par Saarah72
Commentaires de livres appréciés par Saarah72
Extraits de livres appréciés par Saarah72
- C'est la musique que je voulais entendre, m'annonça-t-il. Depuis quand n'avais-tu pas ri ?
- Et toi, ça t'est déjà arrivé, gouverneur ?
- Il n'y a pas souvent matière à rire, lorsqu'on est le consort de sang de Nashira Sargas.
" Le petit bonhomme a une barbe. Et c'est une nana."
- Sa barbe est très douce, lui dit Lucy. Elle la lave avec tout un tas de savons différents. Ils sentent les fleurs et les trucs de filles.
- Trop fort, souffla A-Chiche. Respect, petite nana.
Celui-ci secoua lentement la tête. "Je n'arrive pas à comprendre comment vous faites pour ne pas le voir.
- Voir quoi ?
- Vous. Tout ce que vous êtes."
- Qui a dit ça ?
- Aucune idée. Mais je suis sûr que ça sonnerait mieux en latin.
- Tout sonne mieux en latin. A croire qu'ils ne s'exprimaient qu'avec des proverbes et des devises, sous Cicéron.
- Je pense que c'est la toge qui fait ça. Quand on a les mollets à l'air, on a tout intérêt à donner dans le sentencieux si on veut être pris au sérieux.
Ils échangèrent un regard complice et pouffèrent, à la fois amusés et affligés des bêtises qu'ils pouvaient dire ensemble.
- Vous avez raison.
- Toujours.
- Parfois, corrigea Griffont.
- Souvent, affirma la baronne.
Ils échangèrent un sourire.
- Il fait souvent cela ? demande calmement le Petit Maître des Rêves après un temps.
- Oui, fit la baronne.
- Et qu'est-ce qui lui a pris ?
- Il a deviné ce que je viens de comprendre, sire.
- A savoir ?
- A savoir que nous nous sommes fait avoir.
- Et pourquoi ne faites-vous rien, vous ?
- Parce qu'il est déjà trop tard.
- Ah! ... En ce cas, que diriez-vous d'un thé ?
- Je n'en dirais que du bien, sire.
- Non. Pas plus que toi de mon amour.
Un rien l'égratignait ou la rendait heureuse. Un rien l'abattait ou soulevait en elle une vague d'espoir et de chaleur. Je suis un immense buvard, se dit-elle pour s'encourager à sourire. A rire d'elle et de sentimentalité. Un immense buvard pleins de tâches.
- Du précipice ?
- De lui.
- Il y a une différence ?
- Peut-être parce qu'on est dans la matière tout le temps. On pétrit, on lave, on repasse, on coud, on cuisine, on récure ou on se défend contre les mains baladeuses des hommes ! On ne rêve pas, on fait !
- Nous aussi, on fait …
- Pas pareil ! A quatorze ans, on a nos règles et on n'a pas le choix. On "fait" avec. A dix-huit ans, on comprend très vite qu'il va falloir se battre deux fois plus qu'un homme, faire deux fois plus de choses si on veut exister. Ensuite, on "fait" des bébés, on les porte pendant neuf mois, ils nous donnent le mal de mer, des coups de pied, ils nous déchirent en arrivant au monde, encore des détails pratiques ! Puis, il faut les laver, les nourrir, les habiller, les peser, leur beurrer les fessiers. On "fait" sans se poser de questions et on "fait" le reste en plus. Les heures de travail et la danse du ventre pour l'Homme, le soir. On est sans arrêt en train de "faire", rares sont les filles qui vivent dans les étoiles, le nez en l'air ! Vous, vous faites une seule chose : vous faites l'homme ! Le mode d'emploi est inscrit depuis des siècles dans vos gènes, vous le faites sans effort. Nous, il faut nous battre tout le temps … on finit par devenir pragmatique, comme tu dis !
- Parce que je dis ce que je pense ?
- Parce que tu oses penser ce que tu penses !
- Hors de question, je perdrais ma créativité. Je ne veux pas devenir normale, je veux être une névrosée géniale comme Mademoiselle Chanel ! Tu crois qu'elle s'est fait psychanalyser, elle !
- Je n'en sais rien, mais je vais me renseigner.
- J'ai des défauts, je les connais, je les comprends et je me pardonne. Un point c'est tout.
- Qui est-elle ? s'enquit-elle d'une voix blanche.
- C'est son secret. Pas le mien."
- J'ai plus confiance en toi qu'en n'importe qui, affirma-t-il avec force. Plus qu'en moi-même.
Elle balaya sa protestation d'un geste, puis se laissa aller contre lui. Il l'attira plus près, l'obligea à caler sa tête contre son cou afin de la protéger. Derrière la vitre du brougham, New York défilait en un ballet incessant de murs, fenêtres, portes, allées, ruelles sombres et rais de lumière, et le djinn se vit que s'il avait eu le loisir de choisir un moment à emporter avec lui dans le flacon, un moment à vitre pour l'éternité, c'est peut-être celui-là qu'il aurait retenu. Avec cette femme à son côté.
Le gouverneur me dévisagea en silence. Je le laissai dans cette salle à l'abandon, à l'intérieur de laquelle la musique résonnait encore.