Extraits

Par une très chaude journée d’août 1994, ma femme me dit qu’elle devait se rendre à la pharmacie Rite Aid de Derry pour faire renouveler son traitement antiallergique – un médicament que l’on peut acheter aujourd’hui sans ordonnance, je crois. J’avais rempli mon objectif d’écriture pour la journée et lui offris d’aller le chercher à sa place. Elle me remercia, mais elle voulait en profiter pour passer prendre le poisson de notre repas du soir, au supermarché voisin de la pharmacie

Une fois de retour à la maison, je ne me souciai plus que d'une chose, mon histoire et ses personnages - les sacs d'os sur lesquels je mettais chaque jour un peu plus de chair

L'Amérique a transformé les gens chargés de nous distraire en grandes p*tes bizarroïdes, et les médias adorent tympaniser toute "célébrité" qui ose se plaindre de la manière dont ils la traitent. "Arrête de pleurnicher !" Tel est le cri unanime des articles de ragots ou des émissions de télé correspondantes, sur un ton de triomphe et d'indignation mêlés. "Est-ce que tu t'imagines réellement qu'on te paie des sommes faramineuses juste pour pousser la chansonnette ou taper dans une balle? Tu t'fourres le doigt dans l'œil, troud*c ! On te file tout ce fric pour qu'on puisse s'extasier quand tu le fais bien ... mais aussi parce que c'est gratifiant quand tu te plantes. Tu sais ce que t'es, en vérité? Une marchandise. Si tu cesses d'être amusant, on a toujours la ressource de te tuer ou de te bouffer."

S'il y a bien quelque chose qui confirme l'idée que nous ne sommes rien de plus qu'une espèce animale parmi d'autres, simplement dotée d'un cerveau légèrement plus gros et nous faisant une très haute conception de notre place dans l'ordre des choses, c'est bien notre capacité à communiquer par gestes quand nous ne pouvons faire autrement.

Ce qui se met en place, lorsque disparaît la lumière du jour est une sorte de certitude : qu'en dessous de la surface gît un secret, un mystère à la fois noir et éclatant. On ressent ce mystère dans chaque respiration, on le devine dans chaque ombre, on s'attend à y plonger à chaque pas. On glisse dessus dans un virage à couper le souffle, comme un patineur qui revient sur ses pas.

Faire appel aux gens n'est pas dans ma nature. Non pas à cause de la manière dont j'ai été élevé, du moins je ne crois pas ; plutôt de celle dont je fonctionne. Johanna m'a dit une fois que si j'étais en train de me noyer dans le lac Dark Score, l'endroit où nous avons notre maison de vacances, je mourrais en silence à vingt mètres de la plage plutôt que de crier à l'aide. Ce n'est pas une question d'amour ou d'affection. Je suis capable d'en donner comme d'en recevoir. Je ressens la souffrance comme tout un chacun. Mais si quelqu'un me demande : "Tu vas bien ?", je n'arrive pas à répondre non. Je n'arrive pas à dire : aide-moi.

Je suis une fille qui a de la chance . Je commence par épouser le fils d'un homme extrêmement riche , et après sa mort , je tombe sous la protection d'un autre homme riche .

Le coup suivant , je vais me retrouver avec Donald Trump .

Et si la mort nous rendait fous ? Si nous y survivions, mais au prix de la folie ?

Je me prie à imaginer la notice nécrologique qui me serait consacrée dans le New York Times, et dont le titre serait probablement: un auteur de romans populaires se noie dans le Maine.

J'étais comme un mulet qui continue à tourner sa noria, alors qu'il n'en monte plus une goutte d'eau.