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- Calmez-vous, mon ami, lui enjoignit-il. Nous avons tous eu affaire à plus forte partie que nous. Les femmes de Bodiam sont décidément redoutables !

- Mais délicieuse ! compléta John. Nous devons leur reconnaître cela. Jamais je n'avais vu un tel bouquet. Toutes sont ravissantes, des femmes de chambre à la maîtresse de maison, en passant par les musiciennes et les gouvernantes.

Jess cligna de l'oeil.

- Oh ! oui, milord, elles sont extraordinaires ! confirma-t-il.

Brandon interrompit cet échange d'un rire tonitruant qui résonna dans toute l'écurie, au point que les pages interrompirent leur tâche et levèrent la tête pour voir ce qui se passait.

- Et nous, nous sommes un bel assortiment d'imbéciles ! s'exclama-t-il lorsqu'il eut en partie recouvré son sérieux.

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- souvenez vous de moi toujours, murmura-t-il en s'agenouillant près d'elle. Je porte votre amour dans mon cœur, car vous m'êtes plus chère que la vie.

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- Après mûre réflexion, fit Brandon d'un ton faussement doctoral, nous pensons que le problème vient de l'écluse, dont la porte doit être obstruée. John pense qu'un mouton a dû tomber un jour dans les douves, mais je pencherais plutôt pour un cheval, étant donné la virulence de l'odeur !

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** Extrait offert par Tori Phillips **

Chapitre 1

Hampton Court, Angleterre, mai 1530

— Ma… mariage ?

Sir Brandon Cavendish, gentilhomme de la chambre du roi, prononça le mot terrible avec un hoquet, comme s’il venait de recevoir un coup dans l’estomac. Puis il abaissa sa raquette, bien qu’il fût en train de gagner le set, et laissa sans réagir la balle de son adversaire lui effleurer l’oreille.

Ravi de ce moment d’inattention, son vis-à-vis, qui n’était autre qu’Henri, huitième du nom et roi d’Angleterre, poussa un véritable rugissement de satisfaction :

— J’ai marqué, Cavendish, et vous voilà enfin en mauvaise posture !

L’intéressé se contenta de hausser ses larges épaules.

— Pas encore, Sire, rectifia-t-il, même si vous tentez de me désarçonner avec vos plaisanteries !

Plût au ciel qu’il ne s’agît en effet que d’une mauvaise farce ! pria-t-il mentalement. Quel autre motif aurait pu pousser le roi à aborder un sujet aussi désagréable par cette belle journée de printemps ?

Pour toute réponse, Henri émit un rire tonitruant qui se répercuta entre les murs de bois de la salle de jeu de paume de Hampton Court.

— J’ai bien l’intention en effet de vous battre ! précisa-t-il enfin. Attention, second service !

Sur cet avertissement, il se pencha en arrière et lança vers sa victime une nouvelle balle. Brandon réussit à la renvoyer, mais sans sa puissance habituelle. Ses pensées étaient décidément ailleurs ! Quel mauvais tour le roi s’apprêtait-il à lui jouer ? se demanda-t-il avec appréhension. Henri semblait en effet d’une bonne humeur inquiétante, bien qu’il fût mené par deux sets à zéro !

Incapable de trouver pour l’instant une réponse satisfaisante à ses questions, le gentilhomme essuya du revers de sa manche la transpiration qui perlait à son front, puis passa une main dans ses cheveux blonds.

* * *

— J’ai gagné, Sire, s’écria-t-il, bien que vous m’ayez pris un point d’une façon plus que contestable !

Après avoir tendu sa raquette à un valet, le roi se dirigea vers la galerie latérale, où un page attendait les joueurs avec un pichet de vin frais et des gobelets en argent. Puis il lança d’un ton goguenard :

— Allons donc, Cavendish ! La vérité, c’est que vous grossissez en prenant de l’âge, ce qui nuit à votre souplesse.

Brandon voulut répliquer, mais se mordit la langue à temps. Inutile de faire remarquer au roi qu’il était lui-même plus âgé, et surtout plus corpulent que son adversaire ! Il fallait savoir exactement où s’arrêter lorsqu’on s’adressait à Henri. Il avait beau en effet jouer les sportifs francs et débonnaires, il cachait sous cette jovialité apparente un caractère vaniteux et emporté. Après tout, un jeu perdu n’avait aucune importance et mieux valait ne pas risquer sa vie pour si peu !

Résigné, Cavendish vida son verre d’un trait, sans réussir à dissoudre le goût amer que le mot « mariage » lui laissait toujours dans la bouche. Il savait parfaitement qu’il n’avait pas l’étoffe d’un bon époux et n’avait jamais éprouvé pour une femme un intérêt qui durât plus d’une quinzaine !

— Il n’est pas très loyal de se moquer d’un homme qui joue sérieusement ! murmura-t-il après s’être essuyé les lèvres du revers de la main.

— Mais j’étais très sérieux, Cavendish, assura Henri, dont les yeux pétillèrent.

Brandon respira profondément dans l’espoir de recouvrer son calme et remarqua d’un ton posé :

— Si vous me parlez de mariage, Sire, j’ai bien peur que ce ne soit en vain. Il ne me faudrait même pas un mois pour être fatigué de mon épouse, si je m’avisais d’en prendre une !

Henri pinça la bouche sous ses moustaches rousses.

— C’est votre opinion, répliqua-t-il, mais votre père, lui, est fatigué de vous voir célibataire !

Irrité, Brandon poussa malgré lui un grognement de dépit. Où diable Sa Majesté voulait-elle en venir ?

— La semaine dernière, reprit le roi, sir Thomas m’a envoyé une longue lettre afin de requérir mon aide dans une importante affaire de famille.

Il s’interrompit un instant pour faire signe au page de leur verser un second verre, et continua :

— Il semble que vous soyez resté sourd à toutes ses supplications, chaque fois qu’il a abordé avec vous la question de votre avenir !

Brandon fit un geste de protestation. Une pensée très peu filiale venait de lui traverser l’esprit. Il était décidément las des bonnes intentions de son cher père. Le brave vieillard ne pouvait-il enfin le laisser tranquille ?

— Mon avenir, c’est de vous servir, Sire, affirma-t-il en choisissant ses mots avec soin.

— Certes, et vous continuerez à le faire… mais pas à la cour ! rétorqua Henri en frappant vigoureusement le dos de son compagnon.

Surpris par cette bourrade, Brandon eut le plus grand mal à ne pas répandre le contenu de son verre sur les souliers du roi !

— Ne parlons plus de mariage, je vous en prie ! implora-t-il. Puis-je savoir ce que mon père vous a demandé ?

— Mais c’est précisément là le sujet de sa lettre ! Ce brave comte de Thornbury en a assez d’attendre en vain que son fils aîné veuille bien fonder un foyer. Aussi s’est-il adressé à moi.

Le roi fronça les sourcils et son regard s’assombrit.

— Sans doute a-t-il pensé que j’étais particulièrement à même de le comprendre, acheva-t-il. Le désir d’avoir un héritier ne m’est certes pas étranger !

Cette réflexion provoqua un silence de mort chez les courtisans qui se tenaient dans la galerie, et Brandon lui-même resta coi. Tout le monde savait que le roi avait un désir frénétique d’engendrer un fils pour assurer sa succession. Ce besoin, jusque-là insatisfait, l’avait amené à exiler son épouse, la sainte mais stérile reine Catherine, dans un manoir isolé des Midlands. Avide d’occuper la place vacante, lady Anne Boleyn, fille du vicomte Rochford, n’avait eu aucun mal à séduire Henri. Il lui avait suffi d’affirmer qu’elle donnerait une pleine maisonnée d’enfants à l’homme qui l’épouserait !

Quoi qu’il en fût, ce sujet tenait fortement au cœur du roi, qui ne demandait pas mieux que de laisser s’exprimer cette obsession. Brandon regrettait seulement que cela se fît à ses dépens !

— Le choix d’une femme ne peut s’effectuer à la légère ! murmura-t-il sans oser affronter le regard du roi.

Il joua un instant avec sa raquette et ajouta d’un ton qu’il voulait désinvolte :

— Surtout quand il reste tant de sets à jouer !

Le roi se dérida brusquement.

— C’est vrai, concéda-t-il. Votre dernière partie, Cavendish, a été plutôt rapide !

La lueur moqueuse qui brillait dans les yeux de son interlocuteur inquiéta Brandon.

— Parlons-nous toujours de jeu de paume, Sire ? interrogea-t-il d’un ton léger.

Les spectateurs qui se tenaient dans la galerie se penchèrent sans vergogne pour entendre la réponse du roi. Il y avait là quelques dames que Brandon avait ouvertement courtisées ces dernières années, et elles ne dissimulaient pas leur intérêt pour la conversation. Quant à lady Anne Boleyn et à sa dame de compagnie, lady Olivia Bardolph, elles sourirent franchement, ravies de voir Cavendish en si mauvaise posture.

— Allons, vous m’avez compris ! fit le roi d’une voix tonitruante. Je parle évidemment du jeu du mariage ! Il y a assez longtemps que vous êtes un adepte des « parties rapides »…

Le roi s’interrompit pour jeter un regard sur la compagnie féminine, qui suivait l’échange dans un charmant déploiement d’étoffes colorées et de bijoux scintillants.

— … au grand désespoir de vos amies ! compléta-t-il. Aussi ai-je décidé de vous trouver moi-même la perle rare.

Un chuchotement s’éleva des gradins, et Brandon blêmit d’une rage impuissante.

— Une femme pour moi ? se récria-t-il. Allons, Sire, vous avez déjà tant d’affaires importantes ! L’indiscrète demande de mon père risque de vous faire perdre votre précieux temps.

— Laissez là vos craintes, Cavendish. Tout est déjà réglé !

— Vous avez arrangé une union ? questionna Brandon, abasourdi.

Le rire d’Henri fusa de nouveau, couvrant les chuchotements de ses courtisans.

— Oui, assura-t-il, avec une charmante dame qui possède un grand domaine dans le Sussex ! Il s’agit de lady Katherine Fitzhugh, de Bodiam Castle. Vous l’épouserez pour la Saint-Jean, car tel est mon bon plaisir. Les bans ont été publiés ce matin par l’archevêque de Canterbury. Vous partirez dès que possible dans le Sussex pour faire la cour à votre fiancée !

Brandon faillit s’étrangler. Se marier à une femme inconnue dans moins d’un mois, et renoncer pour elle à sa liberté ? C’était tout bonnement impossible ! Aussi, pourquoi son père avait-il décidé qu’il lui fallait un autre héritier ? Assez d’enfants trottinaient déjà dans la demeure familiale de Wolf Hall, et Brandon ne voyait aucune raison de prendre femme à son tour. Il avait déjà bien assez de responsabilités familiales ! Belle, sa fille naturelle, lui mènerait une vie d’enfer s’il faisait entrer une épouse à la maison ! Et que dire de Francis Bardolph, son petit page ?

Brandon jeta un rapide regard à la mère du jeune garçon, lady Olivia Bardolph, qui se tenait avec les autres dames dans la galerie. Bien que Francis ne soupçonnât pas encore qui était son vrai père, il ressemblait de plus en plus à un Cavendish, et sa filiation n’était un secret pour personne. Comment l’heureux père allait-il s’y prendre pour présenter à sa fiancée ces deux enfants de l’amour ?

— Eh bien, cria le roi en se tournant vers sa cour, regardez un peu lord Cavendish ! Il a l’air d’un poisson pris dans une nasse !

Et il ajouta à l’adresse de Brandon :

— Vous avez peut-être remporté quelques sets, bourreau des cœurs, mais j’ai bel et bien gagné le match !

* * *

— Seigneur, qu’ai-je fait pour mériter ce triste sort ?

Désemparée, lady Katherine Fitzhugh se laissa tomber sur l’un des bancs de pierre qui bordaient la roseraie de Bodiam Castle. Elle s’éventait avec un parchemin cacheté à la cire rouge, qui portait gravées les armes du roi.

Miranda Paige, la cousine et dame de compagnie de Kat, abandonna aussitôt son panier de jardinière sur une plate-bande.

— Que se passe-t-il, ma chérie ? interrogea-t-elle avec sollicitude. Avez-vous reçu de mauvaises nouvelles de la cour ? Que fait votre chenapan de neveu ?

Ainsi questionnée, Kat poussa un profond soupir et ne put bredouiller qu’un seul mot :

— Mariage !

— Fenton s’est marié sans votre permission ? s’écria Miranda, qui prit son mouchoir et en éventa le visage de sa cousine.

— Non, non ! C’est pire que cela, tenta d’expliquer Katherine, qui avait l’impression d’étouffer dans sa collerette blanche.

Elle relut la missive royale, dans l’espoir qu’elle avait peut-être mal compris le message. Hélas ! il n’en était rien !

— Dieu me vienne en aide ! murmura-t-elle. Je suis vraiment anéantie !

Décidément très inquiète, Miranda cessa d’agiter son mouchoir, au grand soulagement de sa cousine.

— Voulez-vous que j’appelle Montjoy ? proposa la jeune fille. Il vous soutiendra jusqu’à votre chambre et vous pourrez vous coucher. A moins que vous ne préfériez prendre un cordial ! Je peux demander à Sondra de…

Coupant la parole à sa compagne, Kat s’écria :

— Demandez plutôt que la foudre détruise Hampton Court ! C’est tout ce qui peut me sauver désormais.

Interloquée, Miranda saisit la main de sa cousine.

— Mais enfin, interrogea-t-elle, qui va se marier ? Est-ce donc moi ?

Kat vit briller une lueur d’espoir dans les yeux de la jeune femme, et malgré sa détresse elle eut un faible sourire. Pauvre Miranda ! songea-t-elle. Bien qu’elle eût dépassé l’âge fatidique de vingt-cinq ans, elle était toujours aussi romantique et rêvait sans désemparer du grand amour, comme si les deux mariages malheureux de sa cousine n’auraient pas dû lui servir d’exemple !

— Vais-je enfin avoir un mari ? insista Miranda.

— Je le voudrais bien, ma chérie. Hélas ! c’est de moi qu’il s’agit, et le roi m’envoie un ordre formel…

— Pour l’épouser ? interrompit la jeune fille, consternée. Mais il est déjà marié depuis vingt ans à la bonne reine Catherine, et on dit qu’il a une maîtresse !

— Non, il ne s’agit pas de lui. Il veut que je convole avec un godelureau de la cour, nommé…

Kat hésita et consulta de nouveau la lettre avant de poursuivre :

— … sir Brandon Cavendish, le fils aîné du comte de Thornbury. Mais peu importe de qui il est question ! Depuis que le Seigneur m’a fait la grâce de rappeler Fitzhugh à Lui, j’espérais…

— Dieu ait son âme, coupa Miranda en entendant le nom du défunt.

— Economisez votre salive, ma mie. Si la justice divine n’est pas un simple mot, cet homme rôtit en ce moment même dans le feu de l’enfer.

Effrayée, Miranda fit un rapide signe de croix et s’exclama :

— Oh ! Kat, cela porte malheur de dire du mal des morts ! Vite, faites une prière !

— Vous la direz à ma place, ma chérie. Fitzhugh a suffisamment entendu les miennes lorsqu’il était en vie… et n’en a jamais tenu compte. Aussi n’en gaspillerai-je pas une de plus pour son salut !

Elle agita la lettre du roi et soupira d’un air pensif :

— Ces deux années ont été pour moi un tel repos ! Après avoir survécu à deux maris comme les miens, j’espérais passer le reste de ma vie à m’occuper tranquillement de Bodiam. Je ne veux pas me lier de nouveau à un homme !

— Peut-être celui-ci sera-t-il différent, suggéra Miranda.

— Impossible ! D’ailleurs, je suis fatiguée des maris.

— En ce cas, écrivez au roi, et tâchez de le faire changer d’avis !

Kat eut un rire sans joie.

— Vous ne le connaissez pas ! se récria-t-elle. C’est l’homme le plus obstiné du monde et il est incapable d’en démordre. Non, je suis bel et bien perdue, croyez-moi !

Miranda saisit le parchemin que Kat avait laissé tomber sur le banc et souligna d’un doigt le nom du prétendant.

— Si seulement vous pouviez me le donner ! murmura-t-elle pensivement. J’aimerais tellement tenter ma chance !

— Vous n’êtes pas réaliste ! assura Kat. Le mariage est un paradis pour l’homme, et un enfer pour la femme. Tout ce que ces messieurs recherchent, c’est une ménagère pour s’occuper de leur maison, et une mère qui mette leurs enfants au monde !

Elle s’interrompit un instant avec une moue douloureuse, car il lui était impossible d’oublier que ses deux précédentes unions étaient restées stériles.

— Notre roi ne pense qu’au mariage, reprit-elle au bout d’un instant. Il ferait mieux, en l’occurrence, de gérer ses propres affaires. Qu’il épouse la Boleyn et me laisse profiter de mon veuvage !

— Chut ! fit Miranda, qui jeta par-dessus son épaule un regard inquiet. Ne parlez pas ainsi du roi, ma chérie. Il est risqué de lui manquer de respect, même ici !

Kat poussa un soupir.

— Vous avez raison, reconnut-elle. Mais que faire ?

— Quand votre prétendant doit-il venir ?

— Le roi a écrit sa lettre il y a huit jours, et il précise que ce Cavendish doit partir incessamment. Seigneur Dieu, il pourrait être à Bodiam aujourd’hui même !

Trop agitée pour rester immobile, Kat se leva et se mit à arpenter l’allée. Elle devait absolument trouver un moyen d’échapper à ce mariage, si elle ne voulait pas voir son bonheur fondre comme neige au soleil ! Tout plutôt que de vivre de nouveau une relation formelle et sans amour…

— Peut-être s’est-il perdu en route, suggéra sa cousine avec une moue malicieuse.

— Je n’ai pas le cœur à rire, Miranda ! L’idéal, ce serait que je puisse observer un peu mon prétendu fiancé. J’aurais vite fait de savoir à quoi m’en tenir sur son caractère !

Incapable de répondre à cette suggestion, Miranda reprit machinalement sa tâche, qui consistait à débarrasser une plate-bande de ses mauvaises herbes. Tout en travaillant, elle se mit à chantonner sur l’air d’une comptine pour enfants :

— Un Cavendish part à la chasse, lirelirela, mais comme il n’y a pas de biche au bois, c’est une laie qu’il ramènera, lala…

Kat s’arrêta brusquement et se frappa le front de la main.

— Voilà l’idée ! s’écria-t-elle. Bravo, ma petite Miranda !

— Quoi donc ? s’étonna la jeune fille.

Sans répondre, Kat prit la main de sa cousine.

— Venez, lui enjoignit-elle, vous n’avons pas de temps à perdre en bavardages.

— Qu’allons-nous faire ? interrogea Miranda, tandis que sa cousine l’entraînait vers le château.

— Echanger une biche contre une laie ! répliqua Kat avec un sourire malicieux.

* * *

— Vous pouvez vous lever, milord, ils sont partis !

A ces mots, sir Fenton Scantling rejeta draps et couvertures et lança un coup d’œil prudent vers la porte. Par tous les diables ! songea-t-il. Comment les marchands londoniens osaient-ils envoyer leurs larbins jusqu’ici pour exiger de lui le paiement de ses factures ? On était tout de même à Hampton Court, le palais du roi ! Pourvu que personne n’eût entendu le raffut ! Il avait eu beau se calfeutrer dans la chambre, ces insolents ne l’en avaient pas moins agoni d’insultes par le trou de la serrure.

D’un coup de pied, Fenton se débarrassa de la courtepointe, puis il se leva d’un bond et alla s’examiner devant la glace. Sa toilette ayant été quelque peu dérangée par cet épisode intempestif, il déplissa son pourpoint de velours violet, et rajusta la chaîne en or qui pendait autour de son cou.

Tod Wormsley, son valet de chambre, s’empressa de redonner du gonflant à ses manches bouffantes en satin, que le séjour au lit avait considérablement aplaties.

— Cette couleur décidément me sied ! observa Fenton. Qu’en pensez-vous, Wormsley ?

— Elle est du meilleur effet, approuva le valet, qui saisit le chapeau plat de Fenton, dont il fit friser la plume entre ses doigts. Mais la mode de nos jours coûte cher, s’il faut en croire ces garçons tailleurs qui vous ont rendu visite !

Scantling faillit gifler le valet pour le punir de son insolence, mais il se ravisa à temps. Il avait trop besoin de ce railleur de Wormsley pour risquer de perdre ses services ! Seulement, ce satané garçon devait apprendre à ne pas aller trop loin !

— Je vois à votre air qu’il y a du nouveau, dit-il au serviteur, dont il avait remarqué l’air pétillant de malice. Allons, parlez !

Tod Wormsley souffla délicatement sur la plume du couvre-chef avant de répliquer :

— Il est vrai que vous revenez juste de Londres et n’avez sans doute entendu parler de rien !

— Le roi a-t-il enfin obtenu le divorce ? interrogea Fenton. Anne Boleyn attend-elle un enfant ? Voilà qui mettrait la cour en ébullition !

— Oh ! non, milord ! Les nouvelles dont je parle vous concernent personnellement.

— Eh bien, parlez ! s’écria le jeune homme, à qui la main démangeait de nouveau. J’ai mieux à faire que de jouer avec vous !

Tod se passa la langue sur les lèvres avant de déclarer :

— Il va bel et bien y avoir un mariage, milord, mais le futur est sir Brandon Cavendish !

A l’énoncé de ce nom, Fenton éclata de rire.

— Ainsi, le bourreau des cœurs a fini par donner dans un piège ! s’esclaffa-t-il. Aurait-il fait un enfant à une pauvre fille, dont le père aurait exigé réparation ? Je parierais qu’il ne va pas à l’autel de son plein gré !

Tod s’éclaircit la voix et expliqua :

— C’est un mariage arrangé à la requête du père de Brandon, et ordonné par le roi lui-même. L’heureuse élue est votre tante, lady Katherine Fitzhugh. Les noces auront lieu dans un mois, le jour de la Saint-Jean.

— Qu… Quoi ? s’exclama Fenton.

Il eut brusquement l’impression que son col l’étouffait et qu’il ne pouvait plus respirer ! La bouche grande ouverte, il tenta de proférer quelques sons, mais sans aucun succès. D’un geste, il montra à Tod le flacon de vin à demi plein qui se trouvait sur la table, et le valet s’empressa de remplir une coupe, qu’il tendit à son maître. Fenton avala le breuvage d’un trait, sans réussir à dissiper le goût amer qui lui emplissait la bouche.

Voyons, ce n’était pas possible, songea-t-il dans son désarroi. Qu’avait-il fait pour mériter cela ? Il avait toujours été pour Kat un neveu prévenant, bien que souvent absent. Il s’était montré constamment poli, même avec cette geignarde de cousine Miranda. Chaque fois qu’il allait à Bodiam, il n’oubliait jamais d’apporter aux deux femmes de petits présents.

A vrai dire, il ne se rendait au château que lorsque ses fonds étaient en baisse, et s’était fort réjoui, deux ans plus tôt, lorsqu’une attaque avait envoyé l’oncle Edward ad patres. La mort de l’irascible gentilhomme avait fait de lui l’unique héritier de lady Katherine, ce dont il se félicitait sans vergogne. Mais le mariage de Kat avec un étalon comme Cavendish, qui ne manquerait pas de faire des enfants à son épouse, représentait tout simplement la mort de ses plus chères espérances !

— Tout va bien, milord ? interrogea Wormsley en lui versant une nouvelle rasade.

Fenton vida la coupe et répliqua d’un ton acerbe :

— Je vais aussi mal que possible, et il devrait en être de même pour vous, car votre sort est lié au mien ! Mais trêve de paroles inutiles. Dites-moi plutôt où est Cavendish. A-t-il déjà quitté Hampton Court ?

— Non. Il cherche à gagner du temps, dans l’espoir que le roi reviendra sur sa décision.

Cette remarque eut raison de la mauvaise humeur de Fenton, qui esquissa même un léger sourire.

— Ah ah ! s’écria-t-il. Ce cher Cavendish se ferait-il tirer l’oreille ?

— Il paraît qu’il s’est quasiment évanoui sur le court de jeu de paume, lorsque le roi lui a signifié qu’il devait épouser lady Katherine dans un mois !

Ravi, le jeune homme se frotta les mains et s’exclama :

— C’est bien mieux que je ne pensais !

Sur ce constat rassurant, Fenton mit son chapeau et annonça :

— Je vais tâcher de trouver Cavendish, afin d’aborder avec lui ce sujet éminemment familial. Ne m’attendez pas trop tôt, Wormsley, car j’ai l’intention d’aller jouer après le souper. Par les cornes du diable, j’ai l’impression que la fortune va enfin me sourire !

* * *

Bien que les galeries de Hampton Court fussent un véritable labyrinthe, Fenton eut tôt fait de mettre la main sur celui qu’il cherchait. Retiré à l’écart de la foule, sous les arches de la cour, Cavendish était en grande conversation avec son compère John Stafford.

Aussi grands l’un que l’autre, les deux chevaliers se ressemblaient comme des frères. Pourvus de larges épaules et de hanches étroites, ils possédaient tous deux une prestance qui faisait l’admiration des dames de la cour, depuis les comtesses jusqu’aux filles de cuisine. Mais ce jour-là, les deux amis avaient d’autres préoccupations, comme Fenton put en juger en s’approchant d’eux en catimini.

— Ne vous leurrez pas, mon ami, conseillait Stafford à Cavendish. Le roi ne changera pas d’avis, et déteste que l’on ne se soumette pas à sa fantaisie. Or, déplaire à Henri, c’est risquer la mort !

Le causeur aperçut alors Fenton et interrompit son discours par ces mots :

— Attention, voici ce petit vaurien de Scantling !

Le nouveau venu, qui avait parfaitement entendu la remarque, ravala tant bien que mal son mécontentement et s’inclina devant les deux amis tout en murmurant :

— Milord Stafford, milord Cavendish… à moins que je ne doive vous appeler désormais « oncle Brandon », puisque nous allons être bientôt apparentés !

Les deux hommes lui rendirent son salut, mais il était facile de voir que Cavendish était de fort méchante humeur.

« Tant mieux, songea Fenton, cela prouve qu’il est aussi réticent que moi devant cette alliance ! »

— Quel mauvais vent vous amène ? interrogea Brandon d’un ton peu amène.

— A en juger par l’odeur qui émane de sa personne, intervint Stafford, il doit venir tout droit des bas-fonds londoniens !

Le jeune homme esquissa un sourire forcé.

— Messieurs, vous me récompensez bien mal de l’empressement que j’ai mis à venir vous saluer, protesta-t-il. Je tenais à vous parler avant que vous ne demandiez la main de ma tante, lord Cavendish.

— Que voulez-vous dire ? questionna Brandon.

Fenton se rapprocha des deux hommes et baissa la voix pour expliquer :

— Il s’agit de lady Katherine, sir Brandon. Il vaudrait mieux que vous sachiez la vérité sur elle avant de vous engager. Ce n’est peut-être pas mon rôle de vous prévenir, mais…

Impatienté par ces précautions oratoires, Cavendish agrippa l’épaule de son interlocuteur, qu’il secoua sans ménagement.

— Parlez donc ! lui enjoignit-il. Est-ce une femme de mauvaise vie ?

— Oh ! non ! se récria Fenton, sa vertu est sans tache. En fait, c’est de son âge que je voulais parler.

— Vous vous moquez de moi, gronda Brandon, et je ne suis pas d’humeur à me prêter à vos plaisanteries. Dépêchez-vous, car ma dague ne demande qu’à sortir de son fourreau !

Fenton avala péniblement sa salive avant d’articuler :

— Eh bien, ma tante Katherine est… âgée. Je suis vraiment surpris que le roi vous ait choisi une pareille épouse, car elle est désormais beaucoup trop vieille pour mettre des enfants au monde. Du reste, ses deux premiers mariages sont restés stériles.

— Mais enfin, elle n’est tout de même pas centenaire ! explosa Brandon, qui avait grand-peine à contenir sa croissante exaspération.

— Bah ! vous connaissez les femmes ! rétorqua Fenton. Elles ne se gênent pas pour tricher avec leur date de naissance. Je ne saurais dire l’âge exact de ma tante, mais je pense qu’il est plus proche de celui de votre mère que du vôtre !

Déconcerté, Cavendish jeta un regard pensif vers la chapelle qui s’élevait de l’autre côté de la cour, et dont les vitraux étincelaient dans le soleil. Ce fut lord Stafford qui reprit l’entretien en demandant :

— Qu’est-il donc arrivé aux deux maris ?

Cette question remplit Fenton d’allégresse. Enfin, le poisson avait mordu à l’appât !

— Ne vous a-t-on pas informés que ma tante était veuve ? interrogea-t-il d’un ton faussement naïf.

C’en fut trop pour Brandon, qui empoigna la chaîne du jeune homme et le tira violemment à lui. Pourvu que les maillons ne cèdent pas ! pria mentalement Fenton. Ce bijou lui avait coûté les yeux de la tête, et il y avait consacré plusieurs mois de la pension que lui versait sa tante.

— Dites-moi tout ! ordonna Cavendish d’une voix menaçante.

Fenton reprit son souffle et déclara d’une traite :

— Tante Kat a été d’abord mariée à lord Thomas Lewknor. Il prit froid la nuit de ses noces et passa dix-huit mois au lit, soigné par sa tendre épouse. Puis il mourut !

Une expression d’horreur se peignit sur le visage de Cavendish.

— Et son second mari ? interrogea Stafford.

— C’était sir Edward Fitzhugh.

— Je l’ai connu, affirma Brandon. C’était un bagarreur notoire et un fort mauvais caractère, qui battait ses serviteurs comme plâtre. Sa pauvre femme devait être bien à plaindre.

Fenton toussota d’un air gêné. Cette réflexion n’allait pas du tout dans le sens de ses desseins !

— Mon oncle était impossible, concéda-t-il, et aurait fait perdre patience à un ange. C’est peut-être d’ailleurs ce qui est arrivé, car il est mort, dit-on, des suites d’un coup qu’il aurait reçu à la tête.

Il s’arrêta un instant pour laisser l’accusation implicite imprégner l’esprit de ses auditeurs, et ajouta d’un ton sinistre :

— J’étais alors à la cour et serais bien en peine de dire comment les choses se sont passées. Lorsque je suis arrivé à Bodiam, mon oncle était déjà enterré !

Il ne précisa pas que sa visite était survenue six mois après le décès de Fitzhugh. Inutile de s’égarer dans des détails inutiles ! songea-t-il.

— Je vois, fit Cavendish, dont le regard s’assombrit.

— J’ai pensé à vous avertir, milord, continua Fenton. Après tout, tante Katherine a déjà perdu deux maris dans des circonstances bien étranges…

Brandon se tourna vers le jeune homme et l’examina attentivement.

— Vous avez bien fait de me parler, assura-t-il. Je vous en suis très reconnaissant.

— Une fois que le roi aura été mis au courant par vos soins, nul doute qu’il ne vous trouve une épouse plus… agréable !

— Qui peut savoir ce que décidera le roi ? soupira Cavendish. En attendant, je suis votre serviteur, monsieur !

Ainsi congédié, Fenton s’inclina devant les deux amis.

— Bonne journée, messieurs ! lança-t-il avec empressement.

Et il laissa les deux géants seuls, libres de remuer les doutes qu’il venait de semer dans leur esprit. Il ne lui restait plus qu’à écrire à Kat pour la prévenir que son prétendant n’était qu’un coureur de dot. Si sir Brandon ne réussissait pas à fléchir le roi, lady Katherine s’en chargerait à sa place !

* * *

Brandon regarda la mince silhouette de Scantling disparaître derrière les colonnades, puis il fit une moue de mépris. Mais son ami Stafford n’était pas dans les mêmes dispositions que lui.

— Vous voilà dans une situation plutôt délicate ! s’exclama-t-il. Pensez donc, une tueuse de maris !

Mais Brandon se contenta de secouer la tête.

— Je ne fais guère confiance à ce chenapan ! maugréa-t-il.

— Il est vrai qu’il a tout intérêt à vous écarter du chemin de sa tante ! Les créanciers de ce jeune vaurien s’agitent beaucoup depuis que votre mariage avec lady Katherine a été annoncé.

— En tout cas, il ne manque pas d’aplomb ! grogna Brandon, que les insinuations de Fenton avaient malgré tout un peu troublé.

Si seulement il pouvait juger sur pièces ! songea-t-il avec regret. En fait, il aurait fallu qu’il pût rencontrer cette veuve incognito avant de prendre une décision. Rien de tel, pour un bon soldat, que de tâter le terrain avant la bataille !

— Il ne vous reste plus qu’à vous rendre dans le Sussex, observa John Stafford, et à faire subir à cette femme un examen approfondi. Si c’est vraiment une sorcière, vous…

Brandon coupa la parole à son ami d’un brusque éclat de rire.

— Vous avez raison, John ! Nous partirons demain à l’aube pour Bodiam Castle !

— Nous ? Que voulez-vous dire ?

Cavendish se contenta de ricaner, tandis que l’idée géniale se précisait lentement dans son esprit.

— Allons, conclut-il gaiement, nous avons du pain sur la planche. Je vous propose de partager la vedette avec moi dans la plus agréable des comédies de la Saint-Jean !

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- Je n'aurai désormais plus aucun scrupule à séduire la maîtresse de ce séjour enchanteur ! Puisqu'elle sait qui je suis, je ne cours pas le risque de me ... cocufier moi-même !

- Mais sait-elle que vous l'avez démasquée ?

- Pas encore, mais quelle importance ? Nous allons avoir un délicieux repas, mon cher John, mais le plus savoureux, ce sera encore le dessert !

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- Devant Dieu, et devant ces jeunes gens qui s'impatientent, je jure, moi Brandon Thomas Cavendish, que je vous aime, Lady Katherine Fitzhugh, et que je vous chérirai jusqu'à mon dernier souffle. Acceptez-vous, madame, de m'épouser maintenant... avant que le prêtre ne s'endorme au beau milieu de la chapelle ?

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- Faites votre plus gracieux salut, lui ordonna Kat à l'oreille. Et n'allez pas vous évanouir, pour l'amour du ciel !

Ainsi rappelée à l'ordre, la jeune femme plongea dans une profonde révérence.... et s'aperçut avec horreur que ses genoux tremblants ne lui permettaient pas de se relever !

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- Vous n'êtes pas réaliste ! assura Kat. Le mariage est un paradis pour l'homme et un enfer pour la femme. Tout ce que ces messieurs recherchent, c'est une ménagère pour s'occuper de leur maison, et ne mère qui mette leurs enfants au monde!

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- Economisez votre salive, ma mie. Si la justice divine n'est pas un simple mot, cet homme rôtit en ce moment même dans le feu de l'enfer.

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- Allez-vous bien, milady, ou voulez-vous que j'appelle vos serviteurs ? interrogea-t-il lorsque la jeune femme fut installée sur une chaise à haut dossier.

- Merci, monsieur, mais ce sera inutile. En fait, j'ai glissé sur le parquet fraîchement ciré !

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