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Là encore, il se perdit dans la contemplation de son verre de sang, le silence s’installant de nouveau. Ce fut à ce moment-là que mon estomac se manifesta et qu’un gargouillement infâme provenant de mon ventre se fit bruyamment entendre, mettant fin à la réflexion de mon employeur qui releva la tête pour me dévisager en serrant les lèvres.

- Bon sang ! glapis-je en me donnant un coup de poing dans la zone en question, comme si ce simple geste pouvait me faire recouvrer ma dignité perdue.

Je me tortillais sur place et j’avais l’impression que mes joues s’étaient embrasées comme une forêt de pins en pleine canicule. Malgré ses cinq-cents ans d’existence et tout le temps qu’il avait eu pour acquérir une maîtrise de soi exemplaire, Phoenix dut rendre les armes. Je compris alors pourquoi il serrait tant les lèvres.

Il éclata d’un rire tonitruant qui acheva de me convaincre que si l’on pouvait mourir de honte, je serais tombée raide morte à l’instant même.

- Oh mon Dieu !

Je me cachai le visage dans les mains car j’aurais préféré qu’il me foudroie du regard plutôt qu’il se convulse comme il le faisait, gagné par une hilarité incontrôlable.

Il riait encore quand il prononça ces paroles.

- Décidément Mademoiselle Watkins, vous êtes une humaine tout à fait… intéressante. Je crois que je n’avais pas ri ainsi depuis au moins cinquante ans.

- Contente de mettre un peu de joie dans votre existence, fulminai-je, moins contre lui que contre mon satané estomac.

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Après son départ, Phoenix croisa les bras sur sa poitrine et semblait attendre que je parle en premier. N'y étant pas résolue, j'ouvris le robinet de l'évier et y fis couler du liquide vaisselle. Une fraction de seconde plus tard, l'eau ne coulait plus, et je faisais face à mon patron. Déglutissant avec peine, je lui déclarai :

— Ne comptez pas sur moi pour vous dire au-revoir !

Il attrapa mon menton pour me forcer à le regarder.

— Ne comptez pas sur moi pour partir sans vous avoir dit au-revoir !

Il caressa doucement ma joue, déclenchant chez moi des palpitations cardiaques complètement irrégulières.

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— Et si je dois vous contacter d'urgence ? Comment je fais pour vous trouver ?

— Je garde mon portable avec moi. Si ça sonne, je serai réveillé par le bruit. Toutefois, en plein jour, je ne vous serai pas d'une grande utilité. A moins que vous ayez besoin d'une torche.

— Je rêve ou vous venez de faire de l'humour ?

— Comment était-ce ?

— Pitoyable. Mais ne vous découragez pas ! lui répondis-je en souriant.

Il grogna.

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... Je suis Peter Livingstone et vous serez Samantha Jones.

- Samantha Jones ? Comme dans "Sex ans the city" ? C'est une blague ?!

- C'est quoi "Sex and the city" ?

J'observai Phoenix pour vérifier qu'il ne se payait pas ma tête. A l'évidence, ce n'était pas le cas, il n'avait aucune idée de qui était Samantha Jones et de ce qu'elle faisait de son temps libre. C'était peut être mieux ainsi.

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Voix de Velours reprit :

- Mais nous avons dû revoir notre mode de consommation lorsque le secret de notre existence fut menacé par notre plus grand ennemi.

Quel ennemi pouvait être si puissant pour faire peur à une bande d’immortels aux pouvoirs hors du commun ?

- Quel ennemi ? réussis-je à prononcer en avalant le morceau de rôti que je brandissais depuis le début sur ma fourchette.

- La police scientifique. 

Bien sûr. La police bénéficiait d’outils de pointe pour mener ses enquêtes. D’autre part, la mise en commun des données via l’informatique permettait d’avancer beaucoup plus vite et de relier des affaires s’étant produites en des lieux et des temporalités différentes. Mettez plusieurs cadavres exsangues dans tout le pays et vous vous retrouverez avec une meute d’inspecteurs sur les dents, prêts à en découdre ! Je comprenais pourquoi ce secret était vraiment en danger.

J’imaginai alors Horatio Caine des Experts Miami, ses fameuses lunettes de soleil et sa voix traînante. Il aurait vite démoli le mythe du policier flegmatique en constatant à quel type de meurtrier il avait affaire. J’étais sûre qu’il aurait décampé en hurlant, sa crinière rousse au vent, aussi sûrement qu’un lapin détale devant un renard. Imaginer la scène était désopilant.

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- J’ai passé une excellente journée si vous voulez savoir. J’ai visité la ville et j’ai fait quelques rencontres. Et je n’ai jamais gaffé ! m’exclamai-je très fièrement.

- Notre alibi est-il passé auprès de vos nouvelles connaissances ?

- Oui, et vous aviez raison, ils se demandaient à quoi vous pouviez ressembler. Ils vous appellent « Peter le mystérieux ». Je leur ai dit que vous étiez grabataire et j’ai rajouté que vous souffriez de phobie sociale, ça les a convaincus. En plus je n’ai pas vraiment menti à ce propos.

- Développez s’il vous plaît.

Son ton doucereux déclencha mon avertisseur de danger, mais je continuai.

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Même si mon employeur m’avait donné une justification à cette indifférence générale envers mon sort, je ne pus m’empêcher de me dire que même si on n’avait pas couvert les traces d’une agression, peut-être qu’au final, personne ne se serait demandé où j’étais passée. Ah non, j’oubliais. Les services d’impôts, eux, se seraient rappelés à mon bon souvenir. Tu parles d’une consolation.

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- Bonne nuit ou dans votre cas, bon jour. Enfin, peu importe

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- Vous ne manquez pas de culot ! Vous m’imposez de devenir un oiseau de nuit, comme vous, de risquer ma vie, pas comme vous, et en plus si je meurs, je dois le faire avec panache comme Cyrano pour que vous puissiez parader devant vos copains sangsues en vous targuant d’avoir fait mumuse avec une humaine en lui apprenant quelques prises de catch ! Vous savez quoi, vous êtes un grand malade !

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Prologue

Beaucoup de gens disent que faire face à la mort, dans un accident par exemple, change votre vie. Pour moi, c’est exactement ce qui s’est produit.

Sauf que ce soir-là, je me suis retrouvée non face à La Mort, mais devant Des morts... et qui étaient pourtant bien vivants ...

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