Extraits

Reste un problème fondamental : que peut représenter pour des esprits d'aujourd'hui ce fameux Plutarque dont tout le monde connaît le nom mais que personne n'a lu, et dont Nietzsche disait : " Rassasiez vos âmes de Plutarque, et en croyant à ses héros, osez croire en vous-mêmes " ? Nous vivons à une époque où le spectacle transmis par la télévision ne mène pas précisément fau culte des grands hommes et où la dérision a remplacé l'admiration.

La culture n'est sûrement pas un exercice d'archives, une affectation de sérieux, une invitation à suivre des sentiers fléchés d'avance, avec obligation de rire là et d'admirer ici. C'est d'abord un plaisir. A chacun de le prendre où il veut. Les uns en lisant Jules Renard et les autres Corneille. Les uns en se promenant pari des ruines et les autres en écoutant du jazz ou des chansons de Delmet, d'Edith Piaf, de Guy Béart. Les uns en s'agitant à la façon de l'Occident quand il s'emparait de l'Orient et les autres en rêvant du rien à la façon de l'Orient avant le déferlement de l'Occident. Il y a cent ille fleurs le long des cent mille routes qui convergent vers la culture. On pourrait presque dire que tous les chemins mènent à la culture.- à l'exception d'un seul : celui que les imbéciles ou les tyrans veulent imposer du dehors.

C'est pourquoi je lance un cri d'alarme : n'étouffez pas la culture, laissez-là respirer, rétablissez, dans la limite bien entendu des règlements nécessaires, le courant des échanges entre les autres et nous ! Gardons-nous de rejeter en bloc ceux qui veulent apprendre chez nous et se servir de notre langue. Gardons-nous surtout de les blesser ou de les humilier. Témoignons aux meilleurs d'entre eux, à ceux qui sont attachés à la tolérance et au libéralisme, la considération qu'ils méritent. Car ils ont besoin de nous. Et nous avons besoin d'eux.