Extraits

1.

C’était la troisième fois de sa vie que Jasmine Connolly rendait une bague de fiançailles qu’on lui avait passée au doigt, et elle commençait à se demander ce qui n’allait pas chez elle.

Pourquoi fallait-il que toutes les personnes qu’elle aimait et en qui elle avait confiance finissent par se détourner d’elle ? Etait-elle victime d’une malédiction ? Ou y avait-il chez elle quelque chose qui encourageait ce genre de trahison ?

Après tout, même sa propre mère ne l’avait pas jugée digne d’intérêt…

Le pire, c’était que l’annonce de ses fiançailles avait été très largement diffusée par les médias. L’idée de l’humiliation publique qui l’attendait lorsqu’elle se rendrait au salon du mariage de Gloucester suffit à l’angoisser.

En faisant jouer son réseau, elle était parvenue à obtenir une place parmi les designers qui présenteraient leurs dernières créations lors de l’événement. C’était une opportunité extraordinaire de mieux se faire connaître et d’étendre sa clientèle.

Elle n’avait aucun mal à imaginer le ton des articles de presse qui salueraient le défilé. Les journalistes britanniques pouvaient être particulièrement incisifs et ils l’avaient encore amplement démontré au cours de ces dernières semaines en s’attaquant à la famille Ravensdale.

Le plus triste, c’était que Jasmine prenait son métier très à cœur. Ce n’était pas un simple gagne-pain pour elle : elle croyait profondément au mariage, à l’engagement éternel de deux êtres qui décidaient de partager leur vie. Chaque fois qu’elle concevait une robe, elle y mettait un peu de ses propres rêves, de ses propres espoirs.

Mais apparemment, le sort s’acharnait sur elle pour qu’elle n’ait jamais l’occasion de porter l’une de ses propres créations…

Réprimant un sanglot, Jasmine jeta un coup d’œil à sa main gauche posée sur le volant. L’absence de sa bague lui rappela cruellement les mots de Myles. Ils résonnaient toujours en elle, aussi cruels qu’à l’instant où il les avait prononcés.

« Je crois que nous devrions faire une pause, prendre un peu de recul… »

Cela n’avait aucun sens, bien sûr. Personne ne prenait du recul à quelques mois de son mariage. En présentant les choses de cette façon, Myles avait seulement cherché à atténuer le choc.

La dure réalité, c’était que pour la troisième fois de son existence Jasmine s’était fait plaquer à la veille de son mariage…