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Qu'est-ce qui avait mal tourné, dans ce petit monde anglais très uni, pour que des médecins et des propriétaires à l'œil acéré, des gardiens autoproclamés, attendent de se jeter sur chaque action humaine et la traînent dans la boue ? Un génocide avait eu lieu. La bombe H avait été lâchée, des nations étaient tombées, et pourtant ils étaient à l'affut, comme des crapauds dans des trous, à regarder, à attendre.
Afficher en entierRufus écouta avec inquiétude les sons venant de l’extérieur. Puis, de façon inattendue, ses efforts pour réparer le câble portèrent leurs fruits et la Norton grogna. Il se releva et pressa l’accélérateur sur le guidon. Le moteur répondit, remplissant la remise de gaz d’échappement bleu, avant de se stabiliser. Ce dont elle avait besoin maintenant, c’était de rouler, pour recharger une batterie presque morte après une longue période d’inutilisation. Il détacha les sangles qui la retenaient sur le support et la fit descendre. Sans réfléchir, il passa une jambe par-dessus la selle, trouva son équilibre et la conduisit jusque dans la cour, Pippin trottinant derrière. Thorne émergea de derrière un arbre, pâle et s’essuyant les yeux.
— Bon sang, cria-t-il par-dessus le rugissement du moteur. Qu’est-ce que vous lui avez fait ?
— Câble déconnecté. Remis en place.
— Et où un archéologue aux manières douces a-t-il appris à faire cela ?
Rufus laissa le moteur tourner au ralenti. Ici, dans le jardin ensoleillé, avec un vicaire qui lui souriait et la chienne qui se promenait joyeusement, cela ne lui semblait pas si difficile à expliquer.
— J’étais avec la British Response Force 4 dans le nord de la France, le corps des motards. Nous avons appris à réparer les motos quand elles tombaient en panne.
L’expression de Thorne s’assombrit.
— La BRF ? Cette unité a été prise derrière la ligne Maginot avant la bataille de France, n’est-ce pas ?
— Comment un vicaire aux manières douces peut-il savoir cela ? dit Rufus en donnant un bon coup d’accélérateur à la moto. Elle aurait bien besoin d’une bonne balade, la prochaine fois que vous en aurez l’occasion.
— Je n’arrive pas à croire qu’elle fonctionne. Pourquoi ne pas la sortir maintenant ?
— Maintenant ? Je ne pourrai pas. Je dois vraiment aller à l’église et commencer à travailler.
— Nous irons tous les deux. Si nous prenons la moto, je peux vous montrer la route panoramique, déclara Thorne en ôtant sa salopette. Allons. Vous méritez au moins ça pour l’avoir réparée.
Afficher en entierIl s'effondra sur la marche. Il se trouvait à Droyton Parva, où des membres du clergé poursuivaient des femmes nues au clair de lune. La brise charria vers lui le rire de Drusilla. Cette nuit d'été précoce, les longues herbes, le bruissement des chênes au bord de la rivière, étaient si éloignés des scènes de son récent réveil que les murs de boue s'évanouirent de son esprit. Sa chienne, revenue de la chasse, des traces de sang autour du museau, regarda avec curiosité en direction des êtres évanescents. Puis elle vint s'asseoir à côté de lui et essaya de lécher les larmes que le bref éclat de rire de Rufus avait fait couler sur son visage.
Afficher en entierLe chien gémit et posa sa tête sur son genou. Le compartiment était vide, une bénédiction, étant donné que la pauvre bête commençait à puer à cause de la chaleur. Rufus gratta prudemment une oreille déchiquetée.
- J’aurais dû te laisser où tu étais, n’est-ce pas, mon vieux…
Il souleva les hanches maigres du chien pour vérifier.
- Ma vieille. Tu aurais déjà trouvé quelque chose à manger. On va devoir s’accrocher et voir ce que Droyton a en réserve pour nous.
Il avait décidé de la laisser partir une fois arrivés. Si elle avait réussi à survivre sur un site bombardé à Londres, aucun doute qu’elle s’en sortirait à la campagne, avec tout un tas de lapins à chasser. Il était plus facile d’être sans abri dans les champs verdoyants
Afficher en entierElle n’avait eu pas l’intention de paraître froide. Rufus en était certain. C’était un véritable bas-bleu, qu’il n’avait jamais vue en compagnie d’un homme durant toute la période qu’il avait passée au musée. Peut-être estimait-elle que l’abstinence était une forme de courage, ou avait-elle appris à garder la tête basse. Le monde fermait parfois les yeux sur son espèce.
Pas sur celle de Rufus.
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