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Mes parents sont radins, le genre de personnes à avoir des frissons à l'idée de devoir sacrifier leur part de nourriture à un animal domestique. C'est pourquoi je ne peux avoir qu'un animal qu'on n'a pas besoin de nourrir. L'année dernière, j'élevais, dans un bocal, une colonie d'une cinquantaine de fourmis, mais elles n'ont pas pu passer l'hiver. Seul m'est resté ce bocal rempli d'une terre forée d'un labyrinthe étonnamment tridimensionnel. J'en ai été triste à pleurer. C'est après que je me suis mis à apprivoiser Bandit. Bandit est un mâle, tigré, extrêmement grand, un chat de gouttière, autrement dit qu'on n'a pas à nourrir.
Afficher en entierJe ne me suis pas réveillé de bonne humeur. J’avais mal à la tête, je sentais tout mon corps fiévreux, j’avais les membres lourds, comme si le monde entier accourait à mon chevet pour m’annoncer dans mon demi-sommeil que je n’étais qu’un incapable, un bon à rien. J’avais un mauvais pressentiment pour la journée qui venait. Jusqu’à l’année précédente, je prenais à chaque anniversaire une nouvelle résolution. Mais l’anniversaire de mes dix-sept ans ne m’incitait à rien de neuf. À dix-sept ans, j’étais déjà sur la pente descendante. Certains entament leur pente descendante à cinquante ans, d’autres poursuivent leur ascension au-delà de leurs soixante ans.
Afficher en entierJ’avais l’impression qu’un froid glacial pénétrait dans mes entrailles. J’ai tourné le dos à mon père et je suis sorti dans le jardin. C’était une nuit de printemps : sous la voûte obscure, un autre ciel se déployait, de couleur rosée, qui semblait le redoubler. Des bouffées de vapeur et de poussière montaient de la surface de la terre vers le ciel, formant une strate qui filtrait la lumière et produisant des reflets anarchiques avec toutes les lumières qui provenaient des maisons de Tôkyô.
Afficher en entierDes bouffées de vapeur et de poussière montaient de la surface de la terre vers le ciel, formant une strate qui filtrait la lumière et produisant des reflets anarchiques avec toutes les lumières qui provenaient des maisons de Tôkyô.
Afficher en entierComplètement myope, elle porte des lunettes. Elle en a tellement honte qu'elle a décidé de ne jamais se marier (...). Et elle dévore les livres frénétiquement, sans craindre d'abîmer encore plus ses yeux.
Afficher en entierÇa m’a mis hors de moi. En hurlant, je lui ai donné un coup de pied en plein dans le front. Elle est tombée à la renverse, les bras tendus vers la table. J’ai vu qu’un des verres de ses lunettes s’était brisé et qu’une de ses paupières saignait. Son visage aux traits ingrats a blêmi de manière effrayante ; du coin de ses yeux étroitement fermés un filet de sang épais coulait vers ses pommettes curieusement saillantes. Ma mère s’est précipitée hors de la cuisine pour lui venir en aide. Hébété d’avoir ainsi agi, je fus pris de tremblements. Le sang de ma sœur avait giclé sur mon orteil : à force de le regarder, je sentis une sorte de brûlure et de démangeaison qui montait le long de ma jambe. Mon père a levé les yeux vers moi, en reposant lentement le journal sur ses genoux. J’ai pensé qu’il allait me gifler et je me suis préparé à l’être. Mais il s’est contenté de dire calmement
Afficher en entierEt ils imputent tout et n’importe quoi à la tyrannie de la majorité. Ils s’opposent au réarmement qu’ils estiment anticonstitutionnel, mais ils ne proposent pas aux soldats d’autres métiers. On dirait qu’ils ne croient pas à ce qu’ils disent et qu’ils contredisent pour le plaisir de contredire. Ils savourent le suc pressé par le gouvernement conservateur, tout en le rendant responsable de la lie amère. On devrait laisser gagner la gauche aux prochaines élections. Elle chasserait l’armée américaine de ses bases et démantèlerait les Forces de défense : on verrait alors si les impôts et le chômage baissent et si l’économie se développe. Moi non plus, ce n’est pas par plaisir que je me fais honnir, en étant infirmière dans un hôpital des Forces de défense. Je serais absolument ravie d’être une travailleuse intègre et progressiste, je t’assure…
Afficher en entierMoi, je lui dis merde à la prospérité actuelle du Japon. Je dis merde aux Japonais qui élisent le parti des conservateurs. Tout ça, c’est dégoûtant ! criai-je en sentant que mes yeux pleuraient, enrageant d’être aussi bête et ignorant. Si c’est comme ça, le Japon n’a qu’à périr et les Japonais n’ont qu’à tous crever ! » Elle flancha un instant, puis, avec un regard froid, elle scruta mon visage, certainement défiguré par mes larmes, comme un chat qui s’amuse avec une souris qu’il vient d’assommer. Puis elle baissa les yeux comme si elle se plongeait dans la lecture du journal
Afficher en entierJ’étais énervé de constater que je perdais la partie. Je ne voulais pas perdre et, en plus, ma position était la plus juste. Quand je parle avec des camarades de classe, une opinion comme celle de ma sœur ne serait absolument pas prise au sérieux, mais aussitôt rejetée et piétinée. Il était encore temps pour moi de gagner. Merde ! Ce n’est que de la sagesse de bonne femme ! me suis-je dit pour me remonter le moral. Jamais je n’aurais donné raison au réarmement
Afficher en entierOn n’a qu’à faire appel aux Nations unies. Enfin, laissons de côté la Corée du Sud, mais quand les gens parlent d’une petite armée d’un pays quelconque, c’est louche. Aucune armée étrangère n’aurait envie de débarquer au Japon. Les ennemis hypothétiques, ça n’existe pas
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