Extraits

Call-girl… On me traite de call-girl !

La situation est surréaliste. À la fois honteuse, gênée et abasourdie, je reste plantée derrière Blaine, observant sans rien dire Sarah et son père, immobiles devant l’entrée de l’appartement. J’ai une folle envie d’intervenir, de clouer le bec de ce M. Cooper de malheur qui semble bien prompt à juger les gens… Puis d’expliquer à Sarah en quoi consiste mon job (qui n’a rien à voir avec celui d’une call-girl)… Mais je n’ose piper mot. Dans cette histoire, il y a un petit garçon de 5 ans qui se réjouissait de passer la nuit chez son père.

Hors de question d’envenimer la situation.

Je me fais donc violence pour ne pas ajouter mon grain de sel et me contente d’observer Blaine, tendu à l’extrême, dont les prunelles flamboyantes font l’aller-retour entre nos visiteurs et moi…

Est-il furieux contre… moi ?

Bien sûr que non. Blaine connaît mon métier, il sait que M. Cooper exagère…

Alors pourquoi ne puis-je m’empêcher de culpabiliser ?

Je reporte mon attention sur Sarah, cette jeune femme rousse dont le charme extraordinaire se noie sous une colère visible. Son visage est dur, fermé ; ses lèvres pincées… Elle fronce les sourcils, apparemment déterminée à récupérer son fils. De force, s’il le faut. Elle a déjà un pied dans le hall d’entrée, d’ailleurs.

C’est dingue ! Elle ne cherche même pas à creuser ce qu’a dit son père ! Elle le croit sur parole !

Il a suffi que cet homme imposant d’une soixantaine d’années balance que je suis call-girl pour que la panique la gagne !

Panique, c’est le mot…

Sa bouche se tord dans un rictus d’angoisse, alors que son regard fébrile balaie l’intérieur de l’appartement, comme si son fils y était en danger de mort.

– Je te félicite ! crache-t-elle finalement à l’attention de Blaine. À peine une soirée et tu n’assumes déjà plus correctement ton rôle de père ! J’accepte de te laisser Liam durant une nuit et tu ramènes une call-girl chez toi pour vous tenir compagnie ? Non, mais je rêve !

– Sarah, tu ne comprends pas, répond Blaine d’une voix posée, alors que ses traits se contractent.

Mon cœur se serre. J’ai tellement de peine de le voir ainsi…