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- Il y a tout juste cinquante ans, parfois moins longtemps dans certains cas, la pratique en vogue voulait que le genre de patients dont nous nous occupons ici soient au mieux mis aux fers et abandonnés dans leur crasse et leurs excréments. Ils étaient systématiquement battus, comme si cela suffisait à éliminer leur psychose. On les diabolisait. On les torturait. On les écartelait sur la roue, pour ainsi dire. Oui. On leur enfonçait des clous dans le cerveau. Il arrivait même parfois qu'on les noie.
- Et aujourd'hui ?
- Aujourd'hui, on les soigne. Moralement. Nous essayons de panser leurs blessures, de les guérir. En cas d'échec, nous leur apportons au moins un peu de paix.
- Et leurs victimes ?
Cawley haussa les sourcils, attendant manifestement la suite.
- Ce sont tous des criminels violents, n'est-ce pas ? insista Teddy, [...] ils ont fait du mal aux autres. Ils ont même commis des meurtres je suppose.
- Oh oui. C'est arrivé souvent.
- Alors, pourquoi voudriez-vous leur offrir un sentiment de paix après ce qu'ils ont infligé à leurs victimes ?
- Parce que c'est mon métier, marshal. Je n'ai plus la possibilité d'aider leurs victimes, malheureusement. Toute tâche a ses limites, vous le savez. En l'occurrence, ce sont les miennes.
Afficher en entier_"Les fous nient leur folie", dit-il.
Le médecin fit un pas.
_ Pardon ?
_"Or Bob nie sa folie".
Cette fois, Cawley croisa les bras.
_"Donc, Bob est fou".
Afficher en entier"Les gens ont tendance à les dénigrer, mais moi je suis convaincu qu'ils ont leur place. Qu'ils possèdent leur propre beauté. Au fond, tout est dans l’œil de celui qui regarde."
Afficher en entier"Et de toute façon, l'île l'aurait néanmoins repoussée inexorablement vers la côte, comme s'il était dans sa nature de chasser les intrus."
Afficher en entier"Faut-il faire une croix sur notre passé pour assurer notre avenir ?"
Afficher en entierRue des souvenirs. Comme elle était incapable de s'adapter au présent, à ce qu'ils étaient devenus aujourd'hui -avec tous leurs défauts-, elle empruntait les chemins sinueux de la mémoire pour retrouver un passé susceptible de lui réchauffer le cœur.
Afficher en entierC'étaient des meurtres, purement et simplement. De toute façon, on ne s'étaient même pas posés la question. Ils méritaient un sort tellement plus terrible... Bon, d'accord, mais à partir de là, comment peut-on vivre avec ça ? Comment peut-on raconter à sa femme, à ses parents et à ses gosses qu'on a trempé là-dedans ? Qu'on a exécuté des hommes désarmés ? Qu'on a abattu des gamins ? Des gamins ennemis, en uniforme, mais des gamins quand même ? La réponse, c'est qu'on ne peut pas en parler. Ils ne comprendraient pas. Parce que même si on a agi pour une raison valable, c'était mal. Et ça ne disparaît jamais.
Afficher en entierTeddy remarqua un homme aux cheveux noirs qui portait un uniforme semblable à celui des autres gardes, à la différence près que le sien était rehaussé d'épaulettes jaunes, d'un col rigide et d'un badge doré. C'était le seul à garder la tête haute, une main dans le dos, tandis qu'il avançait parmi les hommes, et sa démarche rappela à Teddy celle de colonels qu'il avait croisés pendant la guerre - des hommes pour qui le commandement n'était pas seulement un fardeau nécessaire imposé par l'armée, mais par Dieu lui-même. Un livre noir serré contre la poitrine, il salua de la tête leur petit groupe, puis s'engagea dans la pente par où ils étaient arrivés, ses cheveux noirs soulevés par la brise.
Afficher en entierIls découvrirent les pierres à environ cinq cents mètres de la côte, alors que le ciel chargé de nuages couleur d'ardoise s'assombrissait rapidement. Ils avaient franchi plusieurs passages détrempés où foisonnaient des graminées ramollies, rendues glissantes par la pluie, et à force de crapahuter ils étaient tous les deux couverts de boue.
Un champ s'étendait en contrebas, aussi plat que le fond des nuages, nu à l'exception de quelques buissons, de grosses feuilles charriées par les bourrasques et d'une multitude de petites pierres dont Teddy supposa d'abord qu'elles avaient été elles aussi portées par le vent. En descendant, il s'arrêta cependant à mi-parcours pour mieux les examiner.
Afficher en entier— Il n'a jamais été question de chercher la vérité.
Teddy prit cette fois deux allumettes dans la boîte.
— Jamais.
Lorsqu'il les craqua, Teddy découvrit le lit déserté. Il déplaça sa main vers la droite. L'homme, debout dans un coin, lui tournait le dos.
— Je me trompe ?
— À quel sujet ? demanda Teddy.
— La vérité.
— Oui.
— Non.
— Bien sûr qu'il s'agit de chercher la vérité. De dénoncer les...
— Non, c'est de toi qu'il s'agit. Et de Laeddis. Il n'a jamais été question d'autre chose. Moi, je n'étais qu'un accessoire. Un moyen d'arriver à tes fins.
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