Extrait

Rory resta muet et les foudroya du regard tous les deux. Alick en profita pour lancer joyeusement :

— Tu vois tout ce que tu rates en restant au château, le nez plongé dans tes vieux livres poussiéreux et dans tes plantes médicinales ? Ça ne te donne pas envie de voyager avec nous ?

Il pressa sa monture pour rattraper Geordie alors qu’ils traversaient la basse-cour du château.

Rory lui jeta un œil dédaigneux :

— Effectivement, c’est si agréable d’avaler la poussière soulevée par le cheval devant moi, de dormir dans le froid et de supporter toutes vos moqueries. Je regrette tellement d’avoir manqué tout ça jusque-là !

— Il y a des jours où je me demande si tu n’as pas été adopté, petit frère, lâcha tristement Geordie.

Niels s’empressa de répondre :

— Non, rassure-toi. On dirait plutôt que Dieu s’est amusé à tout mélanger quand il a créé Saidh et Rory.

— Il voulait peut-être que Saidh soit un garçon et que Rory soit une fille, tu penses ? suggéra son frère avec un grand sourire. On s’est déjà posé la question, au cours de nos pérégrinations.

— C’est vrai ! confirma Alick.

— Quoi ? s’étrangla Rory.

Alors qu’ils approchaient des marches menant à la porte du donjon des Drummond, Alick poursuivit :

— Réfléchis un peu. Tu aimes rester au château, bien au chaud, alors que Saidh aime courir les routes, se battre et dégainer son épée si un homme ose poser les yeux sur elle. Comme si elle voulait être notre frère, et pas notre sœur.

Tout en grimpant les marches, Niels guetta discrètement la réaction de Rory. En voyant le visage de leur frère se décomposer, il partit dans un grand éclat de rire, imité par Geordie et Alick.

— C’est ça, riez, tous les trois, maugréa Rory. Je m’en souviendrai la prochaine fois que vous aurez une blessure à soigner.