Extraits

Notre bungalow est le plus éloigné du bâtiment principal, lequel abrite les bureaux du personnel, un spa et un restaurant où la clientèle se fait rare, mais qui travaille énormément en roomservice. Même sans la vue à couper le souffle, le bungalow est superbe. Il abrite une chambre somptueuse dominée par un immense lit couvert de coussins rose vif et turquoise. Une télécommande permet d’abaisser un ensemble de stores occultants qui plongent la pièce dans le noir total. Cependant, que ce soit la nuit ou le jour, je ne vois aucune raison de bloquer la vue, donc je crois que ni Damien ni moi ne nous servirons beaucoup de ce gadget.

Petite, la propriété n’accueille pas plus d’une dizaine de clients en même temps. Elle est exclusivement destinée aux couples en quête d’un séjour tranquille et romantique et d’après mes premières impressions, les gérants connaissent bien leur affaire. Car en dépit des dires de notre concierge personnel qui m’a informée que l’hôtel était complet, Damien et moi n’avons croisé aucun des quatre autres couples. C’est plutôt comme si nous étions seuls au monde sur cette étendue de plage déserte, du moins aussi seuls qu’on peut l’être avec un personnel qui pourvoit aux moindres de vos caprices.

– Damien, dis-je tout bas, avant de le lâcher pour défaire à tâtons le nœud sur ma hanche.

Le sarong est fin et vaporeux, mais comme couverture improvisée, ça suffira.

Sa main qui se resserre sur la mienne me fait vibrer d’impatience. Je ferme les yeux, plus que prête à le laisser me dévêtir.

Sauf qu’il ne réagit pas.

Les tétons durcis sous le tissu fin de mon maillot de bain, je me laisse aller à un petit soupir de désir. Avant le petit déjeuner, j’ai troqué ma robe de mariée contre un simple bikini et un sarong rose très léger, enroulé autour de mes hanches et noué sur le côté. Mais même cette tenue minimaliste est de trop. Je nous veux peau contre peau et rien d’autre, alors j’avance doucement les hanches, brûlant de sentir son corps contre le mien.

Dans le ciel, le soleil culmine. Une main en visière au-dessus des yeux, j’incline la tête en arrière pour observer son halo incandescent. C’est le moment de la journée où le sable scintille et la lumière miroite sur l’écume comme des flammes liquides. Ça tombe bien, me dis-je. Car à cet instant précis, je n’ai qu’une envie : me consumer dans les bras de Damien.

Une fois de plus, je songe à la fragilité des circonstances. Et si nous étions nés à cent ans d’écart, ou même vingt ou dix ? S’il n’avait pas été membre du jury à ce concours de beauté il y a tant d’années ? Si j’avais cédé à ma mère pour devenir mannequin au lieu de poursuivre mes ambitions ? Et si je l’avais giflé au lieu d’accepter son offre d’un million de dollars en échange d’un portrait de moi nue ?

L’horizon de ciel bleu déployé derrière lui tandis que les vagues moussent à ses pieds, il se tient dos à l’océan en short de bain taille basse et chemisette blanche entièrement déboutonnée. Entre le tissu blanc qui met en valeur sa carrure sportive et son torse lisse et bronzé que mes doigts meurent d’envie de caresser, le spectacle est à couper le souffle.

Côte à côte, nous marchons sur une plage du Mexique, l’eau fraîche du Pacifique enrobant d’écume nos chevilles avant de vite se retirer dans un mouvement cadencé vieux comme le monde.

Trois mots tout simples qui occupent mes pensées, comme chaque matin depuis le jour où j’ai prononcé la formule magique qui a fait de moi, Nikki Louise Fairchild, une jeune célibataire, Nikki Fairchild Stark, une épouse.