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Ces précédentes versions d'elle-même étaient si lointaines qu'elle avait presque l'impression de se remémorer d'autres personnes, de vagues relations, de jeunes femmes qu'elle avait connues des années auparavant et qui lui inspiraient une profonde compassion." (p 307)
Afficher en entierCe que je veux dire, c'est que plus vous avez de souvenirs, plus vous avez perdu." (p292)
Afficher en entierLe trouble de retrouver ses contemporains plus ou moins décrépis, les souvenirs d'un visage plus jeune venant se heurter à la réalité des bajoues, des poches sous les yeux, des rides inattendues, puis l'effroi de se rendre compte qu'on a probablement l'air aussi vieux qu'eux." (p 171)
Afficher en entierIl s'aperçut qu'il était un homme qui se repentait de presque tout : les regrets s'accumulaient autour de lui comme des phalènes attirées par la lumière. C'était ça, se dit-il, la principale différence entre vingt et un et cinquante ans : l'abondance de regrets.
Afficher en entierA mesure qu’il marchait seul, Jeevan se sentit disparaître dans le paysage. Il était tout petit, insignifiant, dans son errance le long du rivage. Il ne s’était jamais senti aussi vivant, aussi triste.
Afficher en entierVingt ans après la fin des transports aériens, les caravanes de la Symphonie Itinérante avançaient lentement sous un ciel chauffé à blanc. C'était la fin juillet et le thermomètre vieux de vingt cinq ans accroché à l'arrière du véhicule de tête indiquait 106 ° Fahrenheit, 41 °Celsius. Ils se trouvaient à proximité du lac Michigan mais ne pouvaient pas le voir d'où ils étaient. Les arbres se resserraient sur les côtés de la route ; d'autres émergeaient de fissure dans la chaussée, frêles arbustes ployant au passage des caravanes, leurs feuilles caressant les jambes des chevaux et des humains. La canicule sévissait sans répit depuis une semaine.
La plupart des membres de la troupe allaient à pied pour réduire la charge des chevaux, qu'il fallait laisser se reposer à l'ombre un peu trop fréquemment à leur goût. La Symphonie ne connaissait pas bien ce territoire et voulait le quitter au plus vite, mais la rapidité était impossible par cette chaleur. Ils cheminaient lentement, armes à la main ; les acteurs récitaient leurs répliques, et les musiciens essayaient d'ignorer les acteurs, des éclaireurs guettaient le moindre danger sur la route, aussi bien devant que derrière eux.
Afficher en entierSi ça avait été un autre que Hua, Jeevan ne l’aurait pas cru, mais il n’avait jamais connu un homme aussi doué pour l’euphémisme. Si Hua disait qu’il s’agissait d’une épidémie, c’est que le mot épidémie n’était pas assez fort. Jeevan fut soudain terrassé par la certitude que cette maladie décrite par son ami allait être la ligne de démarcation entre un avant et un après, un trait tiré sur sa vie.
Afficher en entierElle imagina Clark, dans son bureau de Manhattan, reposant le combiné. Cela se passait le dernier mois de l'époque où il était possible, en appuyant sur les touches d'un téléphone, de parler avec une personne qui se trouvait à l'autre extrémité du globe.
Afficher en entierLe silence retomba. Quelqu’un fit observer qu’il neigeait abondamment, et ils purent constater à travers les portes vitrées du hall que c’était vrai. Vue du bar, la neige était presque une abstraction, un film sur le mauvais temps dans une rue déserte.
« Eh bien… buvons à Arthur », dit le barman.
Dans la loge des enfants, Tanya donnait à Kirsten un presse-papiers. « Tiens, dit-elle en lui mettant l’objet dans les mains. Je vais encore essayer de joindre tes parents, et toi tu arrêtes de pleurer, et tu regardes cette jolie boule… » Et Kirsten, haletante, les yeux larmoyants, à quelques jours de fêter son huitième anniversaire, contempla l’objet en pensant que c’était le cadeau le plus beau, le plus merveilleux, le plus étrange qu’on lui ait jamais offert : une boule en verre dans laquelle était emprisonnée une nuée d’orage.
Dans le foyer, les personnes rassemblées au bar trinquèrent à Arthur et restèrent encore quelques minutes à boire avant de se séparer, chacun partant de son côté dans le tourbillon de flocons.
De tous ceux qui étaient présents ce soir-là, ce fut le barman qui survécut le plus longtemps. Il mourut trois semaines plus tard, sur la route, en quittant la ville.
Afficher en entier« Tu penses qu’il va se propager à l’extérieur de l’hôpital… ? » Jeevan avait des difficultés à raisonner clairement.
« Non, je sais que c’est déjà fait. Il s’agit d’une épidémie foudroyante. Si elle se répand ici, elle se répand dans toute la ville, et je n’ai jamais vu ça.
– Tu penses que je devrais…
– Je pense que tu devrais partir immédiatement. Ou si tu ne peux pas, fais au moins un stock de provisions et ne sors pas de chez toi. Je te quitte, j’ai d’autres coups de fil à donner. »
Il raccrocha. Le portier de nuit tourna une page de son journal. Si ç’avait été un autre que Hua, Jeevan ne l’aurait pas cru, mais il n’avait jamais connu un homme aussi doué pour l’euphémisme. Si Hua disait qu’il s’agissait d’une épidémie, c’est que le mot épidémie n’était pas assez fort. Jeevan fut soudain terrassé par la certitude que cette maladie décrite par son ami allait être la ligne de démarcation entre un avant et un après, un trait tiré sur sa vie.
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