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Quinze heures s'affichent sur le réveil numérique, ce 3 juillet.
Au fil de la journée, ma bonne humeur matinale a laissé place à un stress grandissant. Les heures égrenaient leurs secondes et leurs minutes avec une ironie sadique. Une peur irraisonnée est montée en moi jusqu'à m'étouffer. Pourquoi Monsieur Guerrand revient-il?? S'est-il douté de mes manigances?? Ai-je laissé échapper un indice dans mes lettres?? S'il a deviné mon identité, que veut-il?? Je me lève, un creux dans le ventre.
Ma main moite glisse sur la poignée de la porte de mon bureau. L'espace d'un instant, j'imagine fuir. Je m'extirperais du bâtiment par la fenêtre pour n'y jamais remettre les pieds. Adieu les collègues et Monsieur Guerrand. J'échapperais ainsi à une accusation de faute professionnelle et j'éviterais l'insupportable suspense de l'avenir. Dans ma poitrine, mon cour bat comme on ferait sonner de lourdes cloches.
Monsieur Guerrand envisage-t-il de m'attaquer en justice?? A-t-il seulement des preuves?? Après avoir expiré longuement, je ferme les yeux. Je me visualise d'abord vue du dessus, dans la pièce, puis je prends de la hauteur en observant le centre de consultation comme un carré minuscule, à l'est de la ville. Accroissant encore ma distance avec le sol, je ne suis bientôt qu'un point dans la France entière, une poussière sur la planète Terre.
Je ne représente rien à l'échelle de l'Univers. Les humains sont des fourmis rampantes de passage dans cette vie dont elles ne connaissent pas le but ; aucun de leurs actes n'a vraiment d'importance. Ma philosophie de comptoir n'interrompt pas l'affolante messe de mon cour. Comment ai-je pu correspondre avec un patient sur un site de rencontre et, qui plus est, fomenter sa destruction?? Pourrait-on m'interdire l'exercice de mon métier pour abus de pouvoir??
(Source de l'extrait : Decitre)
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