Taousert, Reine d'Egypte

Le soleil venait de se lever derrière les monts auréolés de nuées blanchâtres. Les scribes s'accroupirent aux pieds du roi égyptien pour enregistrer ses ordres. Assis en tailleur, ils déployaient sur leurs genoux des feuilles de papyrus et taillaient leurs calâmes. Bientôt, les pédicures et les manucures entourèrent celui qui se disait Pharaon de toute l'Égypte, le puissant Amenmès, fils de Takhâyt, fille de Ramsès II. Le coiffeur se mit à tondre la barbe et les cheveux du roi avec une lame courbe munie d'un crochet après avoir choisi ses rasoirs dans un étui de cuir, rangé lui-même dans un coffret en ébène.

Des droguistes apportèrent des onguents et des essences, des vases en cristal et en albâtre, de la malachite et de la galène dans de petits sachets pour faire les yeux d'Amenmès, travail méticuleux qui réclamait autant de temps que la lecture des messages envoyés par les ambassadeurs.

Afin d'avoir la peau toujours parfumée, le roi l'enduisait d'une pommade à base d'encens et de térébenthine. Maquillé, Amenmès devait être parfait, sans tache sur le visage, sans cicatrice sur le corps et sans bouton disgracieux. Ses servantes utilisaient de la poudre d'albâtre, de natron, du sel mélangé avec du miel, des recettes à base de lait d'ânesse et de l'huile de fenugrec. Afin de supprimer les sourcils ou les cheveux blancs, Amenmès avait recours, comme tous les Égyptiens, à des teintures efficaces mais agressives. Il tentait d'anticiper la chute de ses cheveux avec de l'huile de ricin.

Le coiffeur s'assura que sa chevelure était assez courte, puis il prépara sa perruque, la plus simple pour une journée sans cérémonie : elle était décorée d'un diadème qui s'attachait derrière la tête et dont les retombées restaient fibres dans le cou. Un uraeus en or devait embellir son front comme chaque jour.

Après avoir été rasé, coiffé et maquillé, le roi enfila un pagne plissé retenu par une large ceinture ornée d'une boucle de métal sur laquelle était gravé son cartouche. Un serviteur ajouta un devanteau devant son pagne et le fixa à sa ceinture.

- Ce matin, je resterai pieds nus, dit-il en repoussant le présentoir qui offrait un choix conséquent de sandales en cuir, en roseau ou en or fin.

Les levers de Pharaon se ressemblaient d'un jour à l'autre. Un même rituel était observé à la lettre : réveil assez matinal dès que Rê apparaissait, lecture du courrier par les scribes, bain, habillage et maquillage, sacrifice au dieu suivi d'une séance de prières dites par un grand prêtre, audiences des ambassadeurs, jugements au tribunal, loisirs avant le repas. Pendant ces instants de liberté, Amenmès aimait rester en compagnie de ses chiens et de son singe.

Alors qu'il était très attentif aux dépêches qu'un scribe lui rapportait après avoir compilé toutes les nouvelles qu'il avait reçues du monde entier, un messager entra et lui dit :

- Notre enquête sur le Libyen qui a entraîné dans son sillage une armée égyptienne et qui a réussi à gagner la Nubie n'a toujours pas abouti. En revanche, j'ai entendu dire qu'un certain Artabor aurait été son complice. Il travaille au temple d'Amon de Thèbes.