Extraits

Tu vas encore m'embrasser ? m'interroge-t-elle en laissant glisser ses yeux jusqu'à ma bouche.

Pose-moi la question encore une fois et je passerai le reste de ma journée mes lèvres collées aux tiennes !

Le souvenir de ce premier baiser achève d'affoler tous mes sens. Je m'approche un peu plus jusqu'à sentir son souffle sur mon visage.

- Est-ce-que tu en as envie ? je murmure en résistant de toutes mes forces à la tentation de combler la faible distance qui me sépare encore de sa bouche.

- Oui.

L'aveu est si faible que je l'entends à peine. Elle aurait tout aussi bien pu le hurler vu la manière dont il résonne en moi, fracassant toute volonté de bien faire et d'être raisonnable. Lena pose une main tremblante sur mon torse et je me demande si elle peut sentir l'accélération de mes battements de cœur. Ma propre respiration s'emballe tandis que je m'approche un peu plus, mais la pression de ses doigts devient plus forte et je comprends qu'en réalité, elle veut que je recule. Surpris, je relève légèrement la tête pour croiser son regard.

- Voilà pourquoi nous devons encore garder nos distances, elle m'explique d'une voix chevrotante. Cette attraction entre nous... elle est toujours là et ça reste mal. On ne peut plus être amis pour le moment.

- Je ne veux pas être ton ami.

- Tu fais exprès de répondre de manière évasive à toutes mes questions ?

- Ça dépend. Tu fais exprès de les poser à toute vitesse pour m'embrouiller ?

Je le sens qui m'observe à l'œuvre une dizaine de minutes dans le silence le plus total. Puis, soupirant bruyamment, il se recouvre le haut du visage de son bras.

- Tu ne veux pas te poser un peu ? Tu me donnes le tournis à bouger comme ça ! Même Blanche-Neige arrêtait de travailler la nuit !

La référence me fait me stopper net. Je rêve où il est en train de me comparer à cette princesse perturbée, colocataire, et accessoirement bonniche de sept mini mâles célibataires ?!

- Comment peux-tu le savoir ?

Sa bouche se tord en un sourire idiot.

- Elle n'aurait jamais pu aller au bal sans ça et hop, plus de prince charmant !

Un bal ?

- Tu es sûr que tu ne confonds pas avec Cendrillon ?

- Cendrillon ? Répète-t-il en soulevant légèrement son bras pour me jeter un coup d'œil.

- Et bien, oui ! Le bal, la pantoufle, la méchante belle-mère...

Après un court instant de réflexion, il se redresse sur ses coudes et m'observe, tête penchée et sourcils froncés.

- Blanche-Neige n'a pas de méchante belle-mère ?

- Si mais...

- Et elle ne fait pas le ménage ?

- Si tout le temps ! Mais...

- Alors pourquoi tu me contredis sur des détails ? me coupe-t-il en m'interrompant une nouvelle fois.

Franchement, je me le demande ! Pourtant, la tentation est trop forte et je réplique quand même :

- Parce que je ne vais pas te laisser te complaire dans ton ignorance ! Si tu tiens vraiment à me comparer à une de ces nunuches royales, aie au moins l'obligeance de mieux connaître tes références ! Blanche-Neige, c'est la belle-mère jalouse, le miroir magique et la pomme empoisonnée !

Au bout d'une minute à peine, j'entends la porte qui s'ouvre, puis se referme doucement.

Je suis seul.

Le silence qui envahit de nouveau la pièce me paraît assourdissant. C'est seulement à ce moment-là que je réalise à quel point mon cœur me martèle violemment la poitrine. Je ferme les yeux et laisse échapper le profond soupir que je retiens depuis maintenant dix minutes.

- Putain, mais c'était quoi, ça ?