Extraits

Dehors, les premiers transports s’échouaient déjà sur la grève, couverts par les dragons légers tandis qu’ils débarquaient leurs pièces d’artillerie, et un soldat planta un drapeau entre les galets, surmonté d’un aigle d’or qui s’embrasa au soleil : Napoléon avait enfin pris pied en Angleterre.

- [...] Ne t'inquiète pas, Laurence, ajouta-t-il. Je suis persuadé qu'ils ne seront pas aussi bêtes.

- Les hommes peuvent parfois se montrer bien bêtes.

- J'espère qu'ils vont bien tous les deux, à présent, s'inquiéta Laurence.

- Elle est capable d'écrire et de soutenir que oui, je présume donc qu'elle n'est qu'à moitié morte.

Il imaginait déjà les réactions de l'Amirauté quand on saurait que la milice disciplinée que l'on attendait sereinement, avec à sa tête un jeune officier plein d'audace, était en réalité une légion expérimentale et totalement indépendante de dragons sans harnais, sans sympathie excessive à l'égard de Leurs Seigneuries, sous le commandement du dragon le plus récalcitrant de toute la Grande-Bretagne.

Le terrain de reproduction s'appelait Pen Y Fan, du nom des montagnes inhospitalières qui en fendaient le cœur à la manière d'un fer de hache, coiffées de glace et dont les pics arides dominaient la lande : l'automne gallois, froid et humide, sentait déjà l'hiver et les autres dragons passaient leur temps à somnoler, apathiques, uniquement préoccupés de leur prochain repas.

— Ce n’étaient pas des dragons, ni l’un ni l’autre, expliqua-t-il, et ils sont morts tous les deux, depuis des années et des années. Pythagore était grec, et Yang Hui chinois.

— Dans ce cas, comment sais-tu qu’ils avaient inventé tout cela ? lui demanda-t-elle d’un air soupçonneux.

— Laurence me l’a lu, répondit Téméraire. Et toi, d’où te viennent toutes ces connaissances, sinon des livres ?