Extraits

— T'es sûr ? Tu vas le regretter. Je suis plutôt divertissante.

Ses yeux sont rivés sur mon visage et il ne fait rien pour masquer le désir qu'ils communiquent.

— Pas autant que je regretterais d'avoir quitté cette charmante personne. Je crois qu'elle pourrait me divertir pendant toute une vie.

Je me sens idiote parce que je suis encore en train de le mater. Il faudrait que je mette quelque chose dans sa douche afin de me donner une raison de défoncer sa porte pour le sauver. Pas un serpent. Il n'a pas l'air d'en avoir peur. Peut-être un alligator. Ouais, y a plein d'alligators en Floride. Un petit tour dans les marécages des Everglades, j'en trouve un, je l'attrape, je le ramène.

Il y a trois ans, lorsque je suis sortie du service des soins de longue durée, après une lourde rééducation pour fortifier tout le côté droit de mon corps qui avait été broyé dans l'accident, je me suis inscrite dans une salle de sport. J'ai passé des heures, chaque jour, à soulever des poids et à travailler mon cardio ; tout ce qui pouvait redonner de la force à mon corps brisé, mais qui ne faisait rien pour mon âme ravagée.

Tante Darla est une chrétienne régénérée qui passe son temps libre à prier et à s'assurer que tous ceux qui l'entourent prient également, ou qu'ils savent qu'ils devraient prier pour éviter l'enfer, la syphilis et les grossesses imprévues. Elle est persuadée que les grandes villes sont le terrain de jeu de tout ce qui va mal dans le monde. Dire qu'elle est fanatique est un euphémisme. Elle ne viendra à Miami que si Jésus lui-même y tient une conférence.

Livie est un ange. Elle pleure dès qu'elle voit un enfant pleurer, elle s'excuse quand quelqu'un lui rentre dedans, elle est bénévole auprès de banques alimentaires et de bibliothèques. Elle cherche systématiquement à justifier les bêtises des gens. Si elle avait son permis, elle pilerait chaque fois qu'elle croiserait un grillon sur la route. Et moi... moi, je ne suis pas Livie. Peut-être étais-je un peu comme elle, avant. Mais... plus maintenant. Si je suis le nuage qui apporte la pluie, Livie est le rayon de soleil frayant son chemin pour dissiper l'orage.

"Respire, me disait ma mère. Dix petites inspirations... Saisis-les. Sens-les. Aime-les." Chaque fois que je hurlais de rage, que je tapais des poings et des pieds, que je pleurais de frustration ou que j'étais pétrifiée d'angoisse, ma mère me répétait ces mots, calmement. Chaque fois.

- Pour toujours... c'est long.

Trent me serre plus fort dans ses bras.

- C'est trop court quand il s'agit de toi.

- Tu sais quoi ? Mes fils ont commencé à appeler les mercredis le jour où Papa se fait tabasser par une fille, déclare le docteur Stayner.

Il semblerait que je ne puisse pas faire l'autruche. Je grimace en le regardant.

- Je suis désolée.

Il sourit.

- Tu me détestes ? Tu dois me détester. Je n'y peux rien je suis cassée.

Trent me serre contre lui.

- Je ne te déteste pas, Kacey. Je ne pourrai jamais te détester.Confie-moi ton cœu, Kacey. Je prendrai tout ce qui vient avec.

Je fonds en larmes.Je pleure, inconsolable, pour la première fois en quatre ans.

[...]Alors, je vais vous dire ce que je dis à tous mes locataires. J’ai une seule règle, mais si vous l’enfreignez, c’est terminé. Je veux la paix ! Pas de fêtes avec de la drogue ni d’orgies…

– Excusez-moi, vous pourriez être plus précis ? Qu’est-ce qui est qualifié d’orgie dans l’État de Floride ? Les plans à trois, c’est ok ? Et les poupées gonflables, ça compte ? Parce que vous savez…

Mon intervention me vaut un regard noir de Tanner ainsi qu’un coup de coude dans les côtes de la part de Livie.

Après s’être raclé la gorge, il continue, comme si je n’avais rien dit.

– Pas de disputes, familiales ou autres. Je n’ai aucune patience pour ces conneries et je vous foutrai dehors avant que vous puissiez inventer le moindre mensonge. Compris ?

Je hoche la tête et me mords la langue, luttant contre mon envie de fredonner le générique de C’est mon choix alors que Tanner ouvre la porte.