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Plus tard, lorsqu'il repense à cette nuit, Ged se rendit compte que si personne ne l'avait touché pendant que son esprit était égaré, si personne ne l'avait rappelé d'une façon ou d'une autre, il aurait pu se perdre pour de bon. Seule l'avait sauvé la sagesse aveugle et instinctive de l'animal qui lèche son compagnon blessé pour le réconforter ; et pourtant, dans cette sagesse, Ged percevait quelque chose qui se rapprochait de son propre pouvoir, quelque chose d'aussi profond que la sorcellerie. À partir de ce jour, il fut convaincu que l'homme sage est celui qui ne se détache jamais des autres créatures vivantes, qu'elles aient ou non le don de la parole ; et, dans les années qui suivirent, il s'efforça patiemment d'apprendre ce qu'on peut apprendre, en silence, du regard des animaux, du vol des oiseaux, du mouvement lent et majestueux des arbres.
Afficher en entierMaître...
- Sois le bienvenu, mon garçon, lui répondit Ogion.
- Je suis revenu auprès de vous tel que j'étais lorsque je vous ai quitté : un pauvre imbécile.
Afficher en entier« On dit sur mon île que l'homme qui se noie ne demande pas combien coûte la corde qu'on lui lance. »
Afficher en entier« Veuillez me pardonner, madame, je vous ai parlé comme à une femme ordinaire.
— Mes peurs sont des peurs ordinaires. »
Afficher en entier« Elle va mourir.
— Oui. C'est l'une des conséquences du fait d'être vivant. »
Afficher en entierPas de naissances; pas de nouvelles vies. Pas d'enfants. Seul ce qui est mortel peut donner la vie, Arren. Il n'y a que dans la mort qu'on peut renaître. L'Équilibre ne signifie pas l'immobilité : c'est un mouvement... un devenir permanent.
Afficher en entierCar nous ne possédons vraiment que ce que nous acceptons de perdre... Être soi-même, c'est notre tourment, notre gloire, la marque de notre humanité; et cela ne dure pas. Le « soi » change, il s'efface comme une vague sur la mer. Voudrais-tu que la mer devienne immobile, que les marées s'arrêtent pour sauver une vague, pour te sauver ? Renoncerais-tu à l'habileté de tes mains, à la passion de ton cœur, à la lumière du lever et du coucher du soleil, pour acheter ton salut – la sécurité permanente ? C'est cela qu'ils cherchent à Wathorte, à Lorbanerie et ailleurs. Car tel est le message que ceux qui savent entendre ont entendu: en niant la vie, il est possible de nier la mort et de vivre pour toujours. Et moi, je n'entends pas ce message.
Afficher en entierToute sa vie, elle avait contemplé les ténèbres ; mais celles de la nuit, sur l'océan, étaient plus vastes encore. Elles n'avaient pas de fin. Il n'y avait pas de toit. Elles s'étendaient au-delà des étoiles. Elles n'étaient animées par aucune Puissance terrestre. Elles existaient avant la lumière, et seraient là après elle. Elles existaient avant la vie, et seraient là après elle. Elles s'étendaient au-delà du mal.
Afficher en entierEt il commença à entrevoir la vérité : Ged n'avait ni gagné ni perdu, mais en nommant de son propre nom l'ombre de sa mort, il s'est fait entier ; c'est-à-dire un homme qui, se connaissant dans sa totalité et dans sa vérité, ne peut être utilisé ni possédé par une puissance autre que lui-même, et donc la vie, par conséquent, n'est vécue que pour la vie elle-même, et en aucun cas au service de la destruction, de la douleur, de la haine ou des ténèbres.
Afficher en entierDepuis le quai, Achillée les regarda partir, comme le font toutes les épouses et sœurs de marins sur toutes les côtes de Terremer quand les hommes prennent la mer. Elles ne font pas un geste, ne lancent pas un cri, mais demeurent silencieuses sous le capuchon de leurs capes brunes ou grises, sur le rivage qui s'amenuise à mesure que le bateau s'éloigne et que s'étendent les flot qui les séparent.
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