Extraits

Les yeux bleus rayonnants, souriant comme un idiot, Alec repoussa les couvertures et présenta fièrement son fils tout rose et tout ridé. Personne ne dit rien jusqu’à…

— Bordel de merde !

Les mots s’échappèrent de la bouche de Noah avant qu’il ne s’en rende compte.

— Il… commença Dylan, l’air encore plus abasourdi qu’auparavant. Il a une tête d’alien en forme de cône.

— Ça va aller, souffla Noah, posant une main réconfortante sur son épaule.

— Ça va mieux maintenant ?

— Complètement excité.

— Et tu ne l’étais pas avant ?

— Tu déconnes ? Avec toi dans les parages, je vis pratiquement avec une couille en permanence sur le qui-vive. Ce qui a rendu cette histoire de « seulement amis » particulièrement difficile, sale connard viril.

— Que dis-tu de ça ? Je peux te débarrasser de tes vêtements sans toucher un seul bouton de ta chemise bizarre.

— C’est impossible.

— Je te parie que je peux le faire.

— Je te parie que tu ne le peux pas. Et comment suggères-tu de gagner ce pari, exactement ?

Malgré lui, Noah sourit, plantant ses mains sur ses hanches.

— Est-ce que tes Sourcils de la Mort ont des pouvoirs que j’ignore ? demanda-t-il.

Ky se redressa pour croiser son regard.

— Des pouvoirs autres que de te rendre complètement ridicule et absolument bandant ? continua Noah.

— Il est vrai que pour rétablir l’équilibre, reprit Ky, l’ignorant complètement, j’aurai besoin de quelques instruments.

— Quoi ? croassa-t-il.

Pas étonnant que Ky dégage cette féroce aura de protection que Noah trouvait si attachante. Ce type se comportait à la fois en papa ours, en maman ours et en frère ours. Cela faisait un sacré paquet d’ours.

- Facile est mon deuxième prénom, répondit Noah sur le même ton.

- Je croyais que c'était "princesse".

A ce surnom, Noah se mit à rire et pencha la tête en arrière pour croiser son regard.

- Un type porte une fois un bandana avec le mot "princesse" et se retrouve avec cette étiquette pour toujours.

- Typiquement, seules les fillettes de cinq ans considèrent ça comme un accessoire de mode légitime.

- Tes sœurs ne t'ont jamais déguisé ? demanda Noah.

- Si.

- Un tutu de ballerine ?

- Des diadèmes...

— S’il te plaît, va-t’en et laisse-moi à mon humiliation.

Un petit soupir s’échappa des lèvres de Ky.

— Nous sommes dans un véhicule qui roule.

— Je sais.

— Et tu t’accroches de manière très impressionnante à ma chemise.

— Je sais.

— Entendre raison quand ma sœur vient de récolter sa deuxième accusation de trouble à l’ordre public au nom de… quoi ?

Son inquiétude pour sa sœur lui fit passer une main dans ses cheveux.

— Au nom d’une cause qui en vaut carrément la peine, rétorqua Sierra.

Ky eut du mal à continuer à parler à voix basse.

— Pardon d’être un peu sceptique sur ta notion de cause qui en vaut la peine. En primaire, tu as gagné le droit de représenter notre canton au concours régional d’orthographe. Où, si tu te rappelles, tu as profité de ta position pour protester toute seule contre la complexité de la langue anglaise et ses règles d’orthographe complexes.

— Si quelque chose est basé sur une règle, il ne devrait pas y avoir d’exceptions !

Son cœur tambourina avec une intensité jusqu'alors jamais atteinte, et Noah déglutit, chaque molécule d'humidité ayant fui sa bouche.

Mais ils ne comprenaient pas. Comment pouvaient-ils comprendre ? Ils étaient tellement… tellement… heureux. Et il était content que tous ses amis soient heureux. Sérieusement, il voulait réellement qu’ils soient heureux. Mais fréquenter autant de bonheur quand lui-même était malheureux… eh bien, cela rendait le tout bien pire.

Parce qu’il souhaitait désespérément être heureux lui aussi, bordel. Mais il n’était pas certain de savoir encore comment faire. 

Vingt minutes plus tard, chaque chemise que Ky possédait, y compris celles de sa commode, reposaient en pile au centre de son lit.

— C’est pire que je ne l’imaginais.

Noah étudiait le tas de tissu comme si quelque chose était mort dans la pile et avait laissé une odeur nauséabonde et une traînée de viscères derrière.

— J’aime le confort, dit-il sur la défensive.

— La flanelle, dit Noah en attrapant deux des chemises de Ky – bien sûr, il possédait une bonne quantité du tissu incriminé –, c’est fait pour les bûcherons et les pyjamas. Et encore, rien ne vaut de dormir nu.