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-Chacun a sa croix à porter, et celle-ci est la nôtre, m'avait-il expliqué un jour en évitant mon regard, tandis qu'il s'employait à sarcler la terre au pied d'une tombe.
Évidemment la réponse m'avait laissée insatisfaite.
-Et ma vraie maman, elle les voit, elle aussi?
-Le femme qui t'a élevée est ta vraie maman, répliqua-t-il sans lever les yeux.
-Tu sais bien ce que je veux dire.
Nous ne parlions jamais de mon adoption, même si je savais depuis longtemps. Sur ce sujet aussi, mille questions me trottaient dans la tête, mais j'avais appris à les garder pour moi.
Papa avait l'air soucieux, le visage renfrogné. Préférant ne pas insister, je m'étais rabattue sur le thème des fantômes.
-Pourquoi est-ce qu'ils veulent toujours nous toucher?
-Je te l'ai déjà dit. Ils recherchent notre chaleur.
-Mais pourquoi?
Distraitement, j'avais cueilli un pissenlit esseulé et soufflé sur les aigrettes en les regardant se disperser dans l'air.
-Pourquoi, pérot?
-C'est un peu comme des vampires, avait-il répondu en expulsant un soupir las. Sauf qu'au lieu de sucer notre sang ils nous vident de notre chaleur et de notre énergie. Parfois même de notre envie de vivre. Et ils ne laissent rien derrière eux. Rien qu'une coquille, encore vivante mais parfaitement creuse.
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