Extraits

Les enfants s’introduisirent dans le labyrinthe de glaces. De dehors, il était difficile d’imaginer à quel point ce Palais pouvait être aussi gigantesque. Il y avait plus de dix mille glaces réparties sur je ne sais combien de mètres carrés. Tous réussirent facilement à passer les premiers obstacles, hormis des cas spéciaux comme une petite fille bigleuse qui se prit dès le départ une glace en pleine tête. La pauvre enfant : une vilaine bosse fit son apparition sur son front. Le point positif, c’est qu’elle allait repartir du parc avec un souvenir. Et gratuit, en somme. Mais après les premières glaces, de drôles de phénomènes survinrent.

Mais non loin de là, devant les grilles en or se tenait un homme, un micro à la main, qui accueillait avec enthousiasme les visiteurs.

« Je vous souhaite de réaliser tous vos rêves les plus fous ! », qu’il leur lançait, toujours avec gaieté.

Quand M. Fouinou l’aperçut, il fit en sorte de le contourner, car il ressentait à son égard un mélange de rancœur et de mépris que le temps avait accrus. Cet homme se nommait Mr Nuts. Non pas « monsieur » Nuts, mais bien « Mister » Nuts. Encore une excentricité que M. Fouinou ne comprenait pas. En revanche, vous, vous aurez compris que cet individu n’était autre que le propriétaire de ce parc. Et ne faites pas les ignorants : vous le connaissez certainement. S’il existe un humain sur Terre que tout le monde connaît en dehors du pape, de la reine d’Angleterre ou du père Noël, c’est bien lui.

Rien ne semblait être laissé au hasard dans sa façon de s’habiller. Il portait toujours une large cape recouverte de plumes qui dissimulait une chemise et un gilet en velours, parsemé de broderies représentant quelques attractions, ainsi qu’un pantacourt, assorti à la couleur de son gilet. Au col de sa chemise se trouvait une énorme étoile en guise de nœud papillon, qui lui donnait des allures de sapin de Noël sur pattes. À sa taille, on distinguait un ceinturon, avec une étoile au centre, auquel étaient accrochés un ours en peluche jaune et un petit réveil mécanique. Mais étonnamment, il n’y avait pas de vraie montre à son poignet. Des chaussettes montaient jusqu’à ses genoux et ses pieds dévoilaient de drôles de chaussures en cuir avec de petites plumes à l’arrière et sur le devant. Sa petite moustache fi ne et correctement ajustée participait également à son charme naturel et singulier. Ses yeux se cachaient derrière d’étonnantes lunettes elles aussi en forme d’étoiles et des couches grisâtres les entouraient, de la paupière inférieure aux sourcils. Sûrement du maquillage pour recouvrir ses cernes… Pour couronner le tout, sur sa tête reposait un très beau chapeau conique constitué de morceaux de miroir brisé qui brillaient au soleil. Au lieu de passer pour quelqu’un de ridicule, Mr Nuts inspirait une forme de respect. Sauf chez M. Fouinou.

M. Fouinou sautillait comme un enfant la veille de Noël, caché sur le parking à l’arrière de sa prétendue camionnette de fonction, bien décidé à procéder à l’inspection non officielle de ce parc diabolique. Il posa son gros œil sur l’un des trous dissimulés dans la carrosserie du véhicule pour épier la foule qui se pressait d’embarquer sur l’île. Encore quelques minutes à attendre avant la décrue de cette marée humaine. Bien évidemment, Ernest Fouinou – Ernest, c’était son p’tit nom – devait passer inaperçu. Il ne fallait surtout pas se faire repérer, sinon sa mission, dont il était le seul au courant, pourrait bien tomber à l’eau. Malheureusement pour lui, il ne laissa personne indifférent. En même temps, comment voulez-vous vous effacer dans le paysage avec un short à fleurs, un T-shirt tellement serré qu’il faisait facilement ressortir sa bedaine ou ce qu’il considérait comme son « appât à femmes », une casquette jaune fluo bien flashy sur laquelle frétillaient deux petites antennes, des tongs de plage qui couinaient, et une valisette à pois qu’il ne voulait quitter pour le moins du monde et qu’il avait sûrement volé à une fillette ?

Un parc d’attractions où « tous vos rêves les plus fous deviennent enfin réalité » ? Improbable, mais vrai.

Des manèges tous plus originaux et avant-gardistes les uns que les autres – à se demander où les créateurs puisent leur inspiration et comment de telles prouesses techniques peuvent bien voir le jour.

Une multitude de jeux et d’expériences des plus inconcevables et révolutionnaires qu’il soit, vous donnant l’impression que vous devenez vous-même l’attraction.

Des spectacles sensationnels à en couper littéralement le souffle. Tous délirants. Fantaisistes. Décalés. Troublants.

Des boutiques atypiques dans lesquelles il est bien difficile de ne rien dépenser.

Sans parler des décors à thèmes splendides aux effets spéciaux et illusions renversantes dignes d’un autre monde. D’une autre réalité.

Eh oui, mes amis, ceci n’est pas un songe. Ce lieu existe bel et bien, et tout le monde le connaît. Vous aussi, normalement. Car tout terrien correctement constitué et informé a déjà entendu ne serait-ce que le nom de ce paradis sur Terre. Peut-être y avez-vous déjà mis les pieds, et les yeux. Chers amis, bienvenue à Fantastic Nutsland World, le plus célèbre parc d’attractions du monde, et si j’ose dire… de l’Univers !

L’effet recherché ? L’effet « bouche bée ». Énorme. Fabuleux.

Extraordinaire. Merveilleux. Telles fusaient et fusent encore les critiques et louanges des enfants, des hommes, des femmes et des grands enfants de tous âges, de toutes tailles, de toutes fortunes et de tous pays. Leur unique point commun ? La volonté de revenir une nouvelle fois pour laisser libre cours à leurs fantasmes qu’ils croyaient jusqu’à présent irréalisables.

« Impossible ! », qu’ils disent tous au départ. Mais rien n’est impossible à Fantastic Nutsland World, et s’il existait un dictionnaire spécialement édité pour ce lieu, je doute fort que ce mot y aurait figuré.