La Source du mal, Tome 1 : Trois Kathéennes dans la tourmente

Après s’être volontairement laissé acculer à un énorme roncier, Émilie feint de devoir se rendre à ses poursuivants. Elle lève les mains afin de mettre ceux-ci en confiance, aussi lorsqu’ils approchent en croyant avoir accompli le plus dur, elle balance un violent coup de pied à l’entrejambe du plus costaud qui se courbe sous l’effet de la douleur. Émilie utilise alors ce moment de surprise pour fuir en prenant soin de rester visible. Au même instant, les vociférations des deux bandits lancés à la poursuite de leur proie attirent l’attention d’un troisième qui se joint à eux. Justine profite de la diversion pour s’introduire dans la seule pièce encore intacte de la maison où elle aperçoit Ninon, ligotée. Bien qu’immobilisée et bâillonnée, Ninon essaie d’indiquer à Justine que d’autres ravisseurs se cachent derrière un mur, en vain. Ainsi, alors qu’elle s’apprête à libérer Ninon, ces derniers se positionnent entre l’unique sortie et elle. Sûr de capturer facilement l’adolescente, l’un des individus trop présomptueux à mon avis, se rapproche de Justine.

_ Je crois que la chance nous sourit. Elle est venue se jeter toute seule dans la gueule du loup.

Ses camarades s’esclaffent, mais dès qu’il se situe à sa portée, Justine décolle une brique dans la cheminée effondrée et lui assène un coup à la tête. Sans qu’il ait eu le temps de comprendre ce qui lui arrivait, l'individu s’écroule dans une pièce redevenue silencieuse. Malgré ça, ses deux complices réagissent, sans réaliser à quel danger ils sont confrontés.

_ Tu vas nous le payer, espèce de garce. Quand on en aura terminé avec toi, même ta mère ne pourra plus te reconnaître.

Tandis qu’ils vocifèrent, Justine aperçoit l’extrémité du bâton des salaisons qui dépasse des décombres de la cheminée. Elle pivote aussitôt sur elle-même et se baisse pour le saisir quand l’un de ses deux agresseurs pose son pied dessus.

_ Ce machin ne te servira à rien ! Ma jolie.

Sans perdre l’individu des yeux, Justine pousse brusquement la tige vers le haut. Puis, un « crac ! » signale qu’elle s’est brisée. Certain qu’elle ne pourra plus lui échapper, l’homme devient vite arrogant.

_ C’est bien. Tu l’as cassé. Et maintenant…

Tandis qu’il fanfaronne, Justine qui a repéré la longue pointe effilée au niveau de la rupture exécute une roulade et la lui enfonce dans l’aine. Un flot de sang jaillit aussitôt de la blessure et l’individu s’écroule en hurlant. Puis la vie quitte son corps que des convulsions continuent d’ébranler. Justine se relève à peine que le dernier larron la ceinture.

_ Je vais te crever. Salope !

Mais, en se laissant choir, Justine surprend le bandit qui essaie d’améliorer sa prise sans la lâcher. Alors qu’il ne la tient plus que d’un bras et qu’il s’apprête à la saisir plus bas, Justine plie un genou et lui claque deux fois son talon sur la pointe des orteils. Par réflexe, l’individu desserre son étreinte et cela aurait pu lui être fatal. À peine extirpée de l’étau qui l’étouffait, Justine lui lance une brique au visage qu’il parvient à esquiver de justesse. Face à un adversaire plus dangereux qu’il ne le paraît, il recule et dégaine sa dague.

_ Tu as beau être très futée, sale garce. Je t’égorgerai comme une truie.

Imperturbable, Justine a repéré des objets utiles pour elle, mais qui se situent derrière son adversaire devenu méfiant. Pourtant, elle discute avec celui-ci tout en avançant vers sa première victime.

_ C’est bon. On ne peut pas lutter contre plus malin que soi. Je me rends. Dis-moi ce que tu veux ?

Ce revirement perturbe l’individu qui s’apprêtait à utiliser Ninon.

_ À genoux et mets tes mains dans le dos. Au moindre geste, je te saigne ! Compris !

Bizarrement, Justine obtempère sans rechigner.

_ Oui. Monsieur.

Bien qu’elle s’exécute, l'homme se méfie d’elle. Il la sait toujours capable de retourner la situation à tout instant, alors qu’il ignore qu’avant la mort de son père Justine s’entraînait à tuer son ennemi, peu importe sa position. Aussi, au moment où elle sent le bandit assez proche pour lui attacher les mains, elle roule sur le côté et arrache le bout de bois planté dans le cadavre vidé de tout son sang. Puis, avant que l’homme lâche la corde pour saisir son arme, elle lui enfonce la pointe effilée dans l’œil. Enfin, comme si de rien n’était, elle ramasse la dague et tranche les liens de Ninon qui se blottit dans ses bras.

_ Si tu savais combien j’ai eu peur qu’ils te tuent.

Justine,

_ Je te remercie. Mais ils n’avaient aucune chance, ils avaient trop confiance en eux.

Ninon sourit.

_ Et c’est toi qui dis ça ?

Justine éclate de rire.

_ Oui. Mais ce sont leurs cadavres qui jonchent le sol, pas le mien.