Extraits

« « — Laissez-lui une chance, d’accord ? Peut-être que sa place n’est pas là, mais pourquoi le décider avant de tester ?

L’enseignante approuve. Je devine de la compréhension dans son regard mais je préférerais y lire qu’elle est prête au combat, celui d’inclure mon fils dans sa classe. J’insiste :

— Et surtout, vous verrez que c’est aussi une chance pour les autres enfants. Si ce n’est pas à l’école qu’on apprend la différence, où le peut-on?

Je cherche César. Il est en train de déverser un mélange de poussière et de gravier sur la tête du petit garçon de tout à l’heure. Cette fois, celui-ci se laisse faire, impassible, yeux fermés, essuyant simplement sa bouche pour respirer. Je me dis que les enfants comprennent vite. La tolérance est un mot d’adulte qui sonne comme un effort. Chez les enfants il n’a pas lieu d’être puisque cela va de soi. »

Extrait de 

Un bonheur que je ne souhaite à personne

Samuel le Bihan

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César… C’était un nourrisson éveillé qui évoluait vite, presque plus vite que les autres enfants. Il prononçait déjà quelques mots intelligibles à l’âge où la majorité des bébés balbutient à peine. Il semblait tellement vif ! J’avais hâte de pouvoir échanger avec lui, de le voir apprendre, s’épanouir. Et puis… Et puis les mois ont passé et ces moments ne sont jamais arrivés. Au contraire : César se renfermait un peu plus tous les jours. Il se murait dans le silence, ou alors il poussait des cris. Il me refusait son regard, les yeux en haut, les yeux en bas, les yeux dans le vague, mais jamais droit dans les miens.

Je suis en retard, mais ce matin plus qu’un autre je ne peux me le permettre : j’ai rendez-vous pour décrocher des financements qui maintiendront à flot l’association que j’ai créée. Une entrevue que j’ai mis des mois à obtenir et sur laquelle comptent de nombreux parents aussi démunis que j’ai pu l’être.

- OK, et ensuite ?

- Eh ben ensuite, on court.

- C'est ça ton plan ?

- Oui, et comme j'ai pas mieux, ça va marcher.

L'essentiel est de faire de ce qui nous arrive quelque chose de beau, c'est notre seule chance de nous en sortir.

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« À force de redouter ce que la société me renvoie, j’ai trop souvent l’impression de rater les choses, de subir le quotidien, d’être à côté de ma vie. Moi aussi je finis par confondre plaisir et bonheur, dopamine et sérotonine, pour parler comme les magazines. À bien considérer nos valeurs, je me demande souvent qui sont les vrais malades. »