Un corps en morceaux (Chronique bolivienne)

Il était deux heures du matin, devant un Karaoké dans le quartier périphérique de Plan 3000 de Santa Cruz de la Sierra, une des villes boliviennes les plus dynamiques et prospères.

Sur le trottoir, le corps légèrement chancelant, un jeune d'environ 25 ans laissa échapper un long soupir de soulagement : il était enfin débarassé du bruit et de la musique stridente des hauts-parleurs que personne n'écoutait, et qui retentissait dans ses oreilles, comme si on voulait délibérément pousser les gens à hurler pour se faire entendre.

Le jeune homme, les yeux fatigués à cause de l'heure tardive mais aussi de la bière ingurgitée durant la soirée, cherchait à reprendre ses esprits. Il frotta énergiquement son visage, puis il regarda devant lui la place du Mechero plongée dans une pénombre hésitante. L'endroit ressemblait davantage à un terrain vague au milieu duquel était plantée une grand croix en fer. Plus loin dans un coin, une vieille baraque où pendant la journée on servait des repas. La chaude nuit de cette région contrastaient avec l'agitation des bars, karaokés et bordels qui s'étalaient le long de l'avenue Paurito. Le jeune homme parcourut quelques mètres en s'éloignant du karaoké. Un chien errant s'approcha de lui en reniflant le sol. Il prit un caillou et le lança vers l'animal qui, docilement, s'éloigna vers une ruelle, agitant son corps décharné et galeux.