Un noeud gordien

Parce que j’ai attrapé un gros rhume qui me fatigue, après une mauvaise nuit je me suis réveillée en retard, fiévreuse, la tête dans le coton et le nez bouché.

J’ai un peu travaillé chez moi sur l’entretien que je vais avoir en début d’après-midi et je dois maintenant me dépêcher, afin d’arriver à l’heure fixée par mon assistante. Malgré mon envie de rester sous la couette, je ne peux pas éviter d’aller à ce rendez-vous. Il s’agit d’un client exigeant, qui n’admettra pas un report de l’entretien et pourtant, je ne m’imagine pas exposer et négocier quoi que soit dans l’état où je suis. J’attache mes longs cheveux blonds foncés, en un chignon bas pour me donner un air sérieux et enfile une robe droite simple, beige un peu passe-partout, et une paire de chaussures à petits talons. N’aimant pas le désordre et un peu conditionnée par l’éducation rigoureuse donnée par ma grand-tante, avant de partir, je range rapidement ma tasse et vérifie que rien ne traine dans le petit deux pièces que j’occupe, c’est tout petit, intimiste comme disait le descriptif de l’agence, aussi en ai-je vite fait le tour.

Les feux sont tous au rouge pour moi, j’ai l’impression de mettre plus de temps que d’habitude pour faire la dizaine de kilomètres qui séparent mon appartement du bureau où Sheila est supposée m’attendre. Mon assistante n’était pas à son poste ce matin, elle devait être en cours car elle m’aurait prévenue d’un retard. J’ai eu une incroyable chance de trouver une assistante douée comme elle l’est, elle fini ses études d’architecture et bosse à temps partiel pour moi ; elle a un caractère en or massif et ferait tout pour me rendre service, dans la joie ! Plus qu’une assistante, elle est devenue en quelques mois, pratiquement une amie, même si elle a quelques années de moins que moi.

Je redémarre au vert pour traverser un grand carrefour très fréquenté, tout en pensant à Sheila, quand avec terreur, j’aperçois sur ma gauche, un gros camion s’approcher à grande vitesse de ma voiture, sans freiner, la calandre occuper tout mon champ visuel avant de m’emboutir avec fracas. Je ferme les yeux, ne pense plus, je ne maitrise plus rien, j’entends des cris et des bruits de ferraille, ma voiture se déplace latéralement, en grinçant affreusement, poussée par le camion qui avance toujours. Je ne contrôle plus rien, elle heurte à grand bruit, quelque chose de dur à droite ; l’airbag s’est gonflé, j’ai peur, j’ai affreusement mal, je suis coincée, je suis tellement fatiguée, tout devient noir.

- Madame, madame, vous m’entendez ?

J’essaye de dire à la voix de ne pas crier, mais je n’y arrive pas.

- Madame, je suis le médecin des pompiers, vous avez eu un accident, nous allons vous extraire du véhicule. Où avez-vous mal ?

- Pas… ma… faute, un camion… J’ai…mal.

- Dites moi où vous avez mal..

- Côté gauche…. jambe….gauche …

- La tête ? Le dos ?

- Je …ne…crois pas…

- Bien, vous vous souvenez de ce qui vous est arrivé ?

Pendant que le médecin me parle, j’entends les bruits stridents d’une scie peut-être, qui découpe de la tôle.

- Vous découpez ma voiture ?

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