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Le monde dans lequel nous sommes destinés à dégringoler, le monde de la haine et des slogans. Les chemises de couleur. Les barbelés. Les matraques en caoutchouc. Les cellules secrètes où la lumière électrique brûle nuit et jour et le policier qui vous surveille pendant votre sommeil. Et les défilés d'affiches avec des visages gigantesques, et les foules de millions de personnes qui acclament le chef jusqu'à ce qu'elles soient persuader de l'adorer, tout en lui vouant une haine mortelle à en vomir. Tout cela va arriver. Ou est-ce évitable ? Certains jours je pense que c'est impossible, d'autres je sais que c'est inévitable.
Afficher en entierQu'éprouvez-vous à voir les tombes de vos parents vingt ans plus tard ? je ne pas ce qu'on devrait éprouver, mais je peux vous dire ce que j'éprouvais moi : rien.
Afficher en entierIl est assez facile de mourir si l'on sait que doivent survivre les choses auxquelles on donne du prix. J'ai ma vie derrière moi, la lassitude me vient, le moment approche de rejoindre la terre -c'est ainsi que les gens raisonnaient en ces temps-là. En tant qu'individus, c'était leur fin, mais leur mode de vie se perpétuerait. Ils ne sentaient pas le sol se dérober sous leurs pieds.
Afficher en entierÀ quoi ca sert de se retrouver sur les lieux de l'enfance? Ils n'existent pas. Refaire surface, respirer un peu d'enfance, mais il n'y a plus d'air.
Afficher en entierPourquoi je m'étais préoccupé du passé et du futur, puisque le passé et le futur n'ont pas d'importance ? (...) Hitler, Staline, les bombes, les mitrailleuses, les grues, les matraques - tout cela se dissolvait, glissait dans le néant.
Afficher en entierCurieusement, ce qui m'avait convaincu que la vie vaut d'être vécue, plus que les primevères ou les jeunes pousses sur la haie, c'était ce petit feu à coté de la barrière. Vous savez à quoi ressemble un feu de bois par temps calme. Les brindilles changées en poussière blanche, et ayant cependant gardé forme de brindilles, et sous la cendre cette sorte de rouge vivace qui s'obstine. C'est étrange, des braises rougies ont l'air plus vivantes, donnent une impression de vie plus forte que tout autre chose au monde. Il s'y attache... quoi ?... une intensité, une vibration -les mots justes ne viennent pas. Mais ces cendres vous disent que vous êtes en vie. C'est le petit détail du tableau qui vous renseigne sur tout le reste.
Afficher en entierAinsi, il me semble que c'est tout le temps l'été quand je me rappelle mon enfance. Je peux sentir l'herbe autour de moi, la chaleur qui monte de la terre, la poussière du sentier et la lumière verdie qui filtre entre les noisetiers.
Afficher en entierQu'éprouvez-vous à voir les tombes de vos parents vingt ans plus tard ? je ne pas ce qu'on devrait éprouver, mais je peux vous dire ce que j'éprouvais moi : rien. Père et mère m'avaient toujours été présents. Comme s'ils existaient quelque part dans une sorte d'éternité.
Afficher en entierEt cette pensée me poursuivait : peut-être bien que la plupart des gens que nous voyons marcher sont morts. Nous disons qu'un homme est mort quand son cœur cesse de battre, pas avant. Ça semble un peu arbitraire. Après tout, il y a des parties de votre corps qui continuent à fonctionner -le poil, par exemple, pousse encore pendant des années. Peut-être un homme meurt-il vraiment quand son cerveau s'arrête -quand il a perdu l'aptitude à enregistrer une idée neuve. Ce cher Porteous est comme ça. Une merveille d'érudition, une merveille de bon goût -mais incapable de changer. Dit les mêmes choses, remâche les mêmes pensées, jour après jour, année après année. Il y a des tas de gens comme ça. Morts dans leur tête, bloqués de l'intérieur. Avançant et reculant sur la même voie exiguë, et perdant sans cesse de leur consistance, comme des spectres.
Afficher en entierTout ça va arriver: toutes les pensées que vous refoulez soigneusement au fond de votre esprit, tous vos motifs de terreur, toutes ces choses dont vous vous dites qu'elles ne sont que des cauchemars, ou qu'on ne les verra jamais se produire en Angleterre. Les bombes, les queues pour avoir la nourriture, les matraques, les barbelés, les chemises de couleur, les slogans, les visages énormes sur les affiches, les mitrailleuses qui crépitent aux fenêtre des chambres à coucher. Tout cela va arriver. Je le sais - du moins, je le savais à ce moment-là. Il n'y a pas d'échappatoire. Luttez contre si cela vous chante, ou regardez ailleurs en faisant semblant de ne rien voir, ou empoignez votre clé anglaise et allez avec les autres participer à une bonne séance de cassage de gueules. Mais il n'y a pas de sortie. Cela arrivera parce que cela doit arriver.
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