Extraits

— Tu ne corresponds pas du tout à l’homme que je m’étais imaginé, dit-elle.

Elle tira un roman policier de l’étagère et le porta à son nez. Un sourire se dessina sur son visage tandis qu’elle le humait à pleins poumons. Il faudrait créer un désodorisant d’intérieur au parfum de bibliothèque poussiéreuse pour les gens comme elle.

— À quoi t’attendais-tu ?

— À un ogre tyran hideux.

— Hideux ? (Hunter feignit d’être offensé.) Tu croyais que j’étais hideux ?

Elle rit, et cette douce, joyeuse mélodie lui fit penser au printemps, ce qui était étrange, car les vampires évoquaient rarement des images bucoliques comme les rayons du soleil, les papillons ou les oiseaux en train de gazouiller.

— Bon, d’accord, j’ai menti. Les récits de ta virilité et de ton physique de Dieu grec sont parvenus jusqu’à mes oreilles. (Elle lissa l’une des pages écornées du roman.) Mais on te dépeint comme un despote imprévisible souffrant d’un délire de grandeur.

— Va pour le despote et sa grandeur, répliqua-t-il avec ironie, tant que tout le monde est au courant de ma virilité et de ma beauté !

Elle leva les yeux au ciel sans pour autant cesser de sourire.

— Chacun ses priorités, je suppose.

— Et quelles sont les tiennes ?

— Sans doute les mêmes que n’importe qui. (Elle reluqua les rangées de livres comme un vampire affamé lorgnerait une gorge exposée.) Rester en vie.

- Et que faites-vous donc?

Il roula nonchalamment une épaule en arrière.

- On chasse, on mange, on s'entraîne, on joue... On fait ce que tout le monde fait.

"Jouer". C'est ce que les vampires de ShadowSpawn faisaient avec leur nourriture.

- Je n'aime pas jouer.

Hunter se rembrunit, la fable lueur faisait danser les ombres sur ses traits ciselés.

- Comment peut-on ne pas aimer jouer?

Elle haussa les épaules.

Je n'aime pas ça c'est tout.

Mieux valait ne pas expliquer que voir une créature vivante souffrir lui était insupportable. Même s'il s'agissait d'un humain. Après tant d'années passées à la merci des autres, elle savait mieux que quiconque à quel point c'était terrifiant. Elle faisait un vampire épouvantable.

- C'est que tu t'y prends mal.

Il pivota et ouvrit une armoire qui contenait une petite télévision ainsi qu'un appareil appelé Nintendo. Il lui lança une espèce de télécommande.

- Une partie de Super Mario, ça te branche?

Des jeux vidéo? C'est ce qu'il entendait pas "jouer"? Elle ne put se retenir de rire.

- Tu m'as arrachée aux chaines de ShadowSpawn et m'as offert la liberté d’être forte, murmura t elle.

- Jamais je ne t’enchaînerai, trésor. A moins que tu le demandes.

-Mmmm.... peut être plus tard.

- Je t'ai dit que tu étais mienne. Ce n'étaient pas des paroles en l'air. Tant pis si on doit s'enfuir ensemble et vivre dans un trou paumé. Je ne renoncerai pas à toi.

- Un trou paumé ? Où ça, par exemple ?

Il haussa les épaules.

- Je n'en sais rien. Au Canada ?

Elle arqua les sourcils.

- Ce n'est pas de là que vient Baddon ?

- C'est justement ça qui est drôle.

- Oui, cherf. Soyez tranquille, je ferai chanter cet enfoiré comme un rossignol en moins de deux.

— Arrête, dit-il sur un ton brusque. Ne t’excuse pas et ne me touche pas. Plus jamais.

Par tous les dieux ! il ne répondait plus de rien quand elle le touchait. Celui qui avait proclamé que les femmes étaient le sexe faible était le roi des imbéciles, car Aylin détenait sur lui un pouvoir que personne n’avait jamais eu. Il était temps de réduire l’emprise qu’elle avait sur lui, même si ça signifiait les blesser tous les deux.

— J’appartiens à Rasha.

Ces quatre mots lui donnèrent la nausée.

Aylin laissa retomber sa main, et ce manque lui infligea une douleur presque physique.

— Eh bien, tout est dit, n’est-ce pas ? Rasha sera enchantée d’apprendre que tu la veux.

source: La Chronique des Passions

- A quoi tu joue?

- GTA: Clans de vampires. Tu as le choix entre incarner un humain ou un vampire.

- Et tu es...

Il lui décocha un clin d'oeil taquin.

- Un vampire.

- Et tu peux tuer des humains?

- Ouais.

Elle attrapa une manette.

- Tu me montre?

Hunter eut un bref moment de surprise avant d'aborder un sourire qui lui étira les lèvres jusqu'aux oreilles.

- Un peu, ouais! Viens, allons voler des caisses et dézinguer quelques humains.

- Un lot de consolation?

Hunter écarquilla les yeux. Avant de les réduire à deux fentes, et, en une fraction de secondes, il la renversa sur le lit, la couvrant de son corps, scellant ses lèvres avec siennes.

- Tu ne seras jamais un lot de consolation. (Savoix était empreinte de férocité et la force de sa conviction résonna en elle.) C'est toi que je veux, Aylin Redmoon.

Elle sentit les larmes la brûler. Elle le voulait, elle aussi, mais, mis à part le fait que Rasha était la reine des imbéciles, rien n'avait changé. Son coeur était prêt foncer, mais sa raison lui hurlait des avertissements.

Coinçant les mains entre eux, elle appuya les paumes sur son torse et le repoussa.

- C'est la fièvre lunaire qui parle.

Il baissa les yeux sur elle, les pupilles étincelantes, la mâchoire crispée, l'expression dure.

- Je ne ferai pas semblant, jura-t-il. Et vous ne partagez pas le même visage. Vous avez beau être jumelles, elles est aussi laide que tu es belle.

Elle s'éloigna et, là, il péta les plombs. Littéralement. Avant que son cerveau ne reprenne les commandes, il lui rentre dedans par-derrière et l'attira contre lui. Il enroula un bras autour de sa taille, et de l'autre main il lui empoigna le menton. Les épaules graciles d'Aylin s'enfoncèrent dans son torse lorsqu'il rapporcha la bouche de son oreille.

- C'est toi que je veux, Aylin, gronda-t-il. Je te désire si fort que ça m'empêche de réfléchir. Ou crois-tu que, ça ce soit pour ta soeur?