Extraits

"- Tu me proposes un nouveau rituel ? lui demandai-je, tiraillée entre appréhension et envie. Du genre avec huile et bougies ?

J'avais encore le souvenir de celui que nous avions partagé, deux mois auparavant, lorsque nous nous étions liés. Le pôle sud de mon anatomie commença une petite danse de la joie".

- Tu m'as avoué un jour que tu tuerais quiconque s'approcherait de moi, mais tu me reproches de vouloir donner une leçon à une petite pimbêche qui me met une claque, criai-je. Pire, tu prends sa défense, alors que le minimum aurait été de lui arracher la tête !

Mes yeux étaient rivés aux siens pour qu'il mesure l'étendue de ma colère. Mon corps se redressa et se tendit vers lui pour l'impressionner. Pas sûre que mon stratagème fonctionne.

- Ou au moins une moitié de tête, rajoutai-je après avoir soupesé mes propos.

Une tête entière, c'était peut-être un peu excessif, mais il ne trouverait aucun argument valable contre une moitié.

Il ne répondit pas tout de suite à ma tirade, et me laissa quelques secondes pour retrouver un semblant de calme. Il y avait un mélange d'amusement et de résignation dans ses yeux.

J’eus la conviction que, quels que soient les chemins que nous aurions à emprunter, jamais il ne pourrait s’empêcher de consacrer quelques secondes pour me rassurer, me protéger et puiser en moi tout le courage nécessaire. En retour, à aucun moment, je ne pourrais lui refuser de lui apporter tout le réconfort et le soutien dont il aurait besoin.

Il avait été calme dans le couloir quand nous nous étions arrêtés pour discuter. Je pensais que mes petites blagues lors du dîner étaient déjà oubliées. C’était mal le connaître. Il avait soif de vengeance. Pas pour hier soir, mais pour tous les jours où je l’avais tenu à l’écart. J’allais payer cash et ce n’était même pas la période des soldes.

— Alors comme ça, tu ne te souviens plus si on a couché ensemble ? murmura-t-il avec une lenteur qui me fit frissonner. Besoin d’une piqûre de rappel, ma petite Sensorielle ?

Je n’aimais pas sa voix. Trop aiguë. Ni sa couleur de cheveux. Trop blonde. Pas plus que ses petits yeux en amande maquillés avec soin. Je n’aimais pas non plus sa façon de s’habiller. Des vêtements élégants, de marque sans aucun doute, et qui avaient dû lui coûter la peau du cul. Une petite veste cintrée ivoire, un chemisier d’un rose si pâle qu’il en était presque blanc, assorti à une jupe droite qui recouvrait ses jambes bronzées et musclées. Mais par-dessous tout, je n’aimais pas sa façon un peu supérieure de me regarder. Et pour finir, je n’aimais pas qu’elle fasse partie de la meute de Semaj.

En fait, il m’avait déjà eue, techniquement parlant. Et vu mes réactions, je crois qu’on pouvait dire que j’avais l’air intéressé. Conclusion, j’étais foutue.

Le tigre avait peut-être changé en deux mois et gagné en maturité. Au moment où cette pensée traversa mon esprit, il se retourna et me fusilla du regard. Un regard qui me promettait une explication entre quatre yeux dès qu’il en aurait l’occasion. On repasserait pour l’acquisition de plus de sagesse. Mais les deux secondes où j’y avais cru m’avaient remplie de bonheur.

— Semaj, lui murmurai-je. Je ne suis avec personne et je ne couche avec personne. Emmenez Tigrou avec vous, s’il vous plaît, ordonnai-je à Myrrddin, je vous rejoins tout à l’heure pour le dîner.

— Tigrou ? couina Joshua.

Nous venions de perdre le mage de l’eau.

Il commençait à me gonfler à répondre à ma place et à dire à tout le monde que j’étais à lui, ce qui n’était pas le cas. Enfin, pas vraiment. Pas officiellement. Ni même officieusement, d’ailleurs. OK, officieusement peut-être.