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A présent j'étais devant les faits bien assuré de mon néant individuel. Dans ce milieu trop différent de celui où j'avais de mesquines habitudes, je n'étais à l'instant comme dissous. Je me sentais bien près de ne plus exister, tout simplement. Ainsi je découvrais, dès qu'on avait cessé de me parler des choses familières, plus rien ne m'empêchait de sombrer dans une sorte d'irrésistible ennui, dans une manière de doucereuses, d’effroyable catastrophe d'âme. Une dégoûtation.
Afficher en entierLes vivants qu'on égare dans le cryptes du temps dorment si bien avec les morts qu'une même ombre les confond déjà.
On ne sais plus qui réveiller en vieillissant, les vivants ou les morts.
Afficher en entierCe qu'il faut pour obtenir une espèce de paix avec les hommes, [...] c'est leur permettre en toutes circonstances, de s'étaler, de se vautrer parmi les vantardises niaises. Il n'y a pas de vanité intelligente. C'est un instinct. Il n'y a pas d'homme non plus qui ne soit pas avant tout vaniteux.
Afficher en entierQuand la haine des hommes ne comporte aucun risque, leur bêtise est vite convaincue, les motifs viennent tout seuls.
Afficher en entierIl existe pour le pauvre en ce monde deux grandes manières de crever, soit par l'indifférence absolue de vos semblables en temps de paix, ou par la passion homicide des mêmes en la guerre venue. [...] On ne les intéresse que saignants, les salauds !
Afficher en entierLâche ou courageux, cela ne veut pas dire grand-chose. Lapin ici, héros là-bas, c'est le même homme, il ne pense pas plus ici que là-bas. Tout ce qui n'est pas gagner de l'argent le dépasse décidément infiniment. Tout ce qui est vie ou mort lui échappe. Même sa propre mort, il la spécule mal et de travers. Il ne comprend que l'argent !
Afficher en entierLe cinéma, ce nouveau petit salarié de nos rêves on peut l'acheter lui, se le procurer pour une heure ou deux, comme un prostitué.
Afficher en entierAvec les mots on ne se méfie jamais suffisamment.
Afficher en entier"Alors vivent les fous et les lâches ! Ou plutôt survivent les fous et les lâches ! Vous souvenez-vous d'un nom par exemple, Lola, d'un de ces soldats tués pendant la guerre de Cent Ans ?... Avez-vous jamais cherché à en connaître un seul de ces noms ?... Non, n'est-ce pas ?... Vous n'avez jamais cherché ? Ils vous sont aussi anonymes, indifférents et plus inconnus que le dernier atome de ce presse papier devant nous, que votre crotte du matin... Voyez donc bien qu'ils sont morts pour rien, Lola ! Pour absolument rien du tout, ces crétins ! Je vous l'affirme ! La preuve est faite ! Il n'y a que la vie qui compte. Dans dix mille ans d'ici, je vous fait le pari que cette guerre, si remarquable qu'elle nous paraisse à présent, sera complètement oubliée... A peine si une douzaine d'érudits se chamailleront encore par-ci, par-là, à son occasion et à propos des dates des principales hécatombes dont elle fut illustrée... C'est tout ce que les hommes ont réussi jusqu'ici à trouver de mémorable au sujet des uns et des autres à quelques siècles, à quelques années et mêmes quelques heures de distance... Je ne crois pas à l'avenir, Lola..."
Afficher en entierOn est puceau de l'Horreur comme on l'est de la volupté. Comment aurais-je pu me douter, moi de cette horreur en quittant la place Clichy ? Qui aurait pu prévoir, avant d'entrer vraiment dans la guerre, tout ce que contenait la sale âme héroïque et fainéante des hommes ? A présent, j'étais pris dans cette fuite en masse, vers le meurtre en commun, vers le feu... ça venait des profondeurs et c'était arrivé.
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