Zamira Wilson, Tome 5 : Le Repaire de la wyverne

Les nuages mauves laissaient filtrer les rayons orange mourants, mais étincelants, de la boule enflammée qui se couchait pour la nuit. La lueur presque violette se reflétait sur le sable sous mes pattes – éthérée et pleine de magie, comme si à chaque pas, j’étais transportée dans un autre plan d’existence.

Pas le temps de faire de la poésie, idiote.

Le monde revint à la normale, la réalité me crachant presque au visage. J’enfonçai les pattes dans le sable et mes pattes arrière soulevèrent de petits cailloux qui retombèrent en pluie autour de moi. Je mis toute mon énergie dans mes muscles et pris un virage serré sur la droite dans une dernière tentative pour attraper ce qui était censé être mon dîner. Les dents serrées, je fis un bond désespéré et tendis les pattes avant pour enfoncer mes griffes dans l’arrière-train d’un lièvre du désert plus rapide que l’éclair.

Allez, allez ! Je m’étirai de tout mon long et fis de mon mieux pour l’attraper.

La pointe de mes griffes effleura sa peau fine et érafla à peine son petit postérieur maigrelet et d’un gris poussiéreux. Le son distinct, semblable à une fermeture qu’on abaissait, me fit croire que je le tenais. Mais mes espoirs s’envolèrent en même temps que lui, comme si au lieu de l’avoir entaillé avec mes griffes, j’avais appuyé sur un bouton pour donner un boost de vitesse inattendu à cette petite saleté. Une seconde, il était devant moi, et la suivante, il avait disparu.

Je m’arrêtai dans un dérapage à la base d’une dune tandis que le lièvre bondissait à travers les espaces dégagés entre buissons et collines, tout en remuant la queue comme pour me dire au revoir. Et moi ? Je restai plantée là, la respiration forte, les flancs se soulevant et le corps aussi endolori que si j’avais été battue de manière répétée. Je léchai mes lèvres trop sèches. Je n’avais pas bu assez d’eau – c’était un problème, ici, dans le désert, même pour ceux d’entre nous qui savaient à quoi s’attendre.