C'est avec grande fierté que je vous présente mes 3 premières potions réussies ! (je ne vous dirai pas combien d'essais il m'aura fallu pour y arriver
)
Philtre d'amour : Lire une histoire d'amour
Sanditon de Jane Austen et Another Lady:
En tant que grande fan de Jane Austen, j'ai toujours l'espoir fou qu'un jour on retrouvera quelque part un manuscrit oublié, comme on retrouve parfois des tableaux de maîtres au fond d'un grenier ou trônant insoupçonnés au dessus d'une cheminée. En fait, je recherche désespérément le plaisir de la nouveauté, alors que j'ai malheureusement déjà fait le tour de son œuvre. Snif.
Après m'être dernièrement attaquée à ses Juvenilias, consommées avec grande modération quand tout me poussait à les dévorer sans retenue, il ne me restait plus que Sanditon. L'inachevé Sanditon. Le probablement très frustrant Sanditon avec ses 11 misérables petits chapitres.
Une fois la partie originale lue (en VO, évidemment :p), difficile de ne pas se demander ce que Jane Austen avait en tête pour son héroïne. Car le décor, les personnages et la société de Sanditon, un petit village côtier inventé pour le roman, sont introduits et présentés, mais en si peu de pages, l'intrigue n'a pas montré l'ombre d'un début de développement. Que comptait faire Jane Austen avec tout ce petit monde ? Mystère... Libre au lecteur de laisser courir son esprit pour se l'imaginer ou bien, faire confiance à d'autres pour le lui raconter. Gardant en tête le vieux proverbe "Faute de grives, on mange des merles", je me suis mise en quête de la suite la plus louée, celle que les fans recommandent, optant ainsi pour Sanditon revisité par Another Lady (parue en français chez Le Livre de Poche).
Si n'est pas Jane Austen qui veut, je dois dire que cette suite m'a agréablement surprise sur bien des points. On sent que son autrice a bien étudié les romans de son modèle en s'appuyant dessus pour construire une intrigue qu'on pourrait croire de son cru. En fait, on en retrouve les ficelles et les leviers principaux, comme autant de clins d'oeil pour les lecteurs éclairés, qui reconnaîtront un peu de chacun dans les personnages, les situations et les développements. Cette version est une sorte de patchwork austennien qui fonctionne, bien qu'il y ait une ou deux choses qui m'aient fait grincer des dents par leur improbabilité (le retournement final obtient la palme !).
Another Lady a aussi su s'approprier les personnages et continuer à les faire vivre sans en dénaturer l'essence, en proposant même de sa composition, qui s'intègrent parfaitement dans le petit monde de Sanditon. Sidney Parker en tête. J'ai adoré ce personnage qui fait le jour et la nuit au sein de la communauté et cultive un mystère et une ambiguïté tels qu'il est difficile d'être sûr de ses intentions. Il vient pimenter les échanges entre tous les absurdes habitants qui peuplent la station balnéaire, tout en mettant Charlotte, la très raisonnable héroïne, à l'épreuve.
Côté écriture et humour, il y a un très bel effort de plume et de recherche, mais c'est probablement sur ce point que l'on ressent le plus la fracture entre Jane Austen et Another Lady. Le langage et les tournures se veulent plus soutenus, mais à plusieurs reprises on sent l'aspect forcé, déguisé, d'un esprit moderne aux mœurs différentes qui essaie de se faire passer pour autre, d'un écrivain qui imite un modèle sans l'égaler. Il en résulte parfois un manque de finesse et de subtilité là où Austen aurait su arrondir les angles (Sir Edward n'est pas un personnage raté, mais ses interventions sont encore trop grossières), et un manque de tranchant dans les mots pour reproduire le mordant et l'ironie caractéristiques du style austennien.
Bref, faute de grives, on mange des merles. Mais à défaut d'être aussi savoureux que la grive, ce qui était certain avant même d'y goûter, ce merle s'est avéré plus relevé que ses congénères. Une bonne surprise qui console un peu, mais qui n'enlève pas le goût d'inachevé de Sanditon et ne parvient pas à éclipser l'envie de connaître la version de Jane Austen.
Elixir de longue vie : Lire un livre avec un des personnages principaux très vieux
Good Omens de Terry Pratchett et Neil Gaiman (Les deux personnages principaux ont plus de 6000 ans):
Ça pourrait juste être une banale histoire d'Apocalypse à faire capoter, mais elle est le fruit des imaginations conjointes de Terry Pratchett et Neil Gaiman, alors, forcément, Good Omens/De bon présages est bien plus que ça !
La trame de fond, le déclenchement de l'Armageddon et sa tentative d'avortement par le duo improbable de personnages principaux, l'ange Aziraphale et le démon Crowley/Rampa, n'offre, pour ainsi dire, aucune surprise. Ce n'est pas de ce côté qu'il faut aller chercher de quelconques originalités ou divertissements, elle n'est que le prétexte à ce qui vient se greffer dessus.
Par contre, le large panel de personnages rencontrés, de par leurs habitudes, leurs manies et leurs croyances, font tout le sel de ce livre. Grâce à eux et aux situations absurdes dans lesquelles ils se fourrent, les auteurs passent au crible les travers de l'humanité et de la société moderne: Business déplorables et malsains, pollution, extinction d'espèces animales, fanatisme, penchants obscurs... Tout ou presque y passe avec un humour féroce et décapant, qui fait mouche tout du long.
J'ai énormément ri devant tant d'absurdité (tout en mesurant la gravité des sujets abordés), mais ça ne m'a pas empêchée de ressentir des longueurs pesantes avant la fin du récit, me demandant tout de même combien de temps il fallait à une Apocalypse pour se déclencher ?! (4 jours d'après les auteurs, mais ce sont des journées très très longues)
La faute peut-être à ces anecdotes qui partent dans tous les sens ? Ou alors à ma lecture en VO qui m'a faite progresser à pas de fourmi car, lisant le soir, j'étais trop fatiguée pour assimiler rapidement toutes les richesses et subtilités de plume des deux auteurs ? Quoi qu'il en soit, je sais que je relirai ce livre plus tard, en VF probablement, pour écarter ces doutes. Mais en attendant, avec toutes les images et les musiques qui me sont venues en tête lors de la lecture, c'est vers la série TV que j'ai très envie de me tourner !
Potion de babillage : Lire un livre avec des enfants dans l'histoire
Le Petit Prince d'Antoine de Saint-Exupéry:
La seule fois où j'ai lu ce grand classique de la littérature jeunesse, c'était à l'école, j'étais en primaire. Autant dire il y a une éternité. J'en gardais le souvenir d'un univers plein de poésie, de créativité et d'imagination, de par ses dessins aux multiples interprétations, en fonction de si on a gardé son âme d'enfant ou pas, et de son petit personnage d'une grande candeur confronté à l'absurdité du monde trop sérieux des adultes.
Trois dizaines d'années plus tard, j'ai toujours les dessins en tête, mais le texte m'échappe. Alors je profite que le livre audio, avec Bernard Giraudeau pour narrateur, soit à disposition sur Youtube pour me le remémorer. Et je fais bien, car c'est une véritable pépite qui a su aussi bien me captiver que mon petit bout de 5 mois.
Cependant, maintenant que je suis adulte, que je perçois pleinement les messages, que ce livre me parait triste et pessimiste dans son sous-texte ! En même temps, que peut-on attendre d'une oeuvre qui fut écrite par un resistant exilé durant la Seconde Guerre mondiale ? Comment ne pas perdre fois en l'humain quand celui-ci ne voit plus et ne respecte plus la beauté du monde, quand il bafoue les valeurs les plus importantes ?
Bref, un livre plein de sages enseignements, judicieusement prodigués et illustrés, qu'il est bon de redécouvrir à tout âge et que je mettrai sans crainte dans les mains (et les oreilles) de mon fils quand ce sera le moment.
3 points pour Serpentard !
Recap
Grâce à
un scooter volant dans Good Omens
, j'ai emprunté mon premier transport magique. Puis-je avoir une consigne bonus ?