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«J'étais la souris piégée dans le regard fixe et meurtrier du cobra, terrorisée, mais trop fascinée pour s'enfuir. Pourtant, assise à mon bureau, tripotant la lame vive du poignard fait main, je sus, sans équivoque aucune, que Kevin était dangereux.»
Afficher en entierKevin continua à s'acharner, besognant toujours à tirer quelque chose de sa voix, de sa bouche, de son cœur. Et toujours il échouait.
Afficher en entierJ'étais en proie à des émotions grandioses et terrifiantes, qui se pressaient en foule contre mes côtes, ma poitrine, puis grimpaient, jusqu'à m'arracher des larmes. J'avais envie de pleurer sans vraiment comprendre pourquoi. [...] Je me sentais très fatiguée, et très vulnérable. [...] J'avais besoin de réconfort. Je n'arrivais même plus à réfléchir sur la raison d'une telle souffrance. Elle était trop profonde, trop complexe pour se mouler dans les mots.
Afficher en entierJe suis inquiète au sujet de Kevin, notais-je, je pense qu'il est... " Quoi ? Dangereux ? Ce gamin fabrique des poignards dans des lames de vieux lits. Ce gamin dessine les victimes qu'il rêve d'assassiner. Ce gamin câline sa haine comme nous cajolons des petits chats. Pouvais-je écrire cela ?
Afficher en entierBalland, p. 111
« En se taisant complètement, il évitait le risque de révéler des pensées compromettantes.
Kevin avait simplement fait ce qu'il avait pu pour contrôler ses émotions.
Si un élément se révélait périlleux et menaçait d'exacerber sa sensibilité, il choisissait d'en avoir peur et de ne pas en parler.
C'était devenu une sorte de drogue.
Il lui avait fallu toujours plus de phobies pour contenir ses sentiments, toujours plus de silence pour verrouiller les vérités non dites, et puis soudain, il s'était retrouvé pris au piège, esclave de ses terreurs et de son mutisme. »
Afficher en entierBalland, p. 104
« Je m'imaginais simplement, conclut-il, que ç'aurait été formidable d'avoir au moins une personne au monde qui n'ait pas besoin d'être payé pour m'aimer. »
Afficher en entierBalland, p. 85
« C'est comme les gens, reprit-il.
Vous savez, les gens dont on croit qu'ils nous aiment, et on comprend tout à coup que ce n'était pas vrai.
Les chaises, le bureau et les autres objets, ils changent dans le noir.
Comme les gens.
Et je suis couché dans mon lit et je me dis : voici la véritable apparence de la chaise.
La forme qu'elle prend dans la journée, c'est une illusion.
Pour me faire croire qu'il n'y a rien à craindre.
Mais c'est une chose horrible, la nuit, une chaise.
Et même pendant le jour, je sais comme elle est affreuse en dessous.
Je sais qu'elle sera de nouveau affreuse quand je me retrouverai seul avec elle.
Quand il fera nuit.
La chaise sera une horreur. »
Afficher en entierBalland, p. 18
« Bien plus spectaculaire que son mutisme étaient les phobies de Kevin.
Il vivait dans une terreur morbide de tout ou presque, qui lui triturait les boyaux ; qui dévorait son existence.
Il avait peur des routes et des gonds de porte, des spirales de carnet et des chiens, du noir, des tenailles, et des petits bouts de ficelles qui pouvaient tomber par terre.
L'eau le terrifiait bien trop pour qu'il se lave ; l'idée de se retrouver sans vêtements l'affolait trop pour qu'il en change.
Et depuis trois ans, Kevin refusait de mettre un pied hors de Garson Gayer.
Il était, de fait, resté entre quatre murs durant tout ce temps.
Les peurs de Kevin le verrouillaient dans une prison bien plus sûre que celle qu'il pourrait jamais se bâtir à l'aide de tables et de chaises. »
Afficher en entier-Vous savez de quoi meurent la plupart des gens?
Je secouai la tête.
-D'un pourrissement du coeur. C'est une sorte devancer invisible. Il vous prend dans le coeur. On le sent. Il vous ronge l'intérieur. C'est quand votre seule raison d'être au monde, c'est d'y être né un jour. Le coeur ne sert jamais. Alors, il se met à pourrir lentement. Parfois longtemps avant le corps. Mais peu importe alors, puisqu'une fois qu'on est mort dans son coeur, on est mort.
Afficher en entierNous n'étions qu'à quelques centimètres l'un de l'autre. A cette distance, son parfum faisait un peu fai-sandé, et je restai sans bouger pendant quelques minutes, le temps de m'accoutumer au manque de lumière, à l'étroitesse du lieu et à l'odeur. Kevin commença à se balancer discrètement, bras cadenassés autour des genoux, menton sur les rotules. Il me dévisageait sans ciller.
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