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Je suis Robin Gordon.
Prête à commencer une nouvelle vie.
À prendre un nouveau départ.
Afficher en entierJe sens ses larmes contre ma joue. Je laisse tomber ma tête contre son torse. Son rythme cardiaque me rassure, me fait du bien. Je n'écoute que ça, car je n'aime pas les sifflements rauques qui s'échappent de ma poitrine, alors que je sens que les minutes passent, comptent. Je ne ressens aucune peur, aucune crainte face à la mort. Je me sens bien. À ma place. Dans ses bras.
Afficher en entierCommençons par la fin
Et terminons par le début.
Que le dernier soit le premier
Et que le bas renverse le haut.
Que l’Homme retrouve sa candeur
Devant l’enfant pétri de sagesse.
La Lune verra le jour
Et les ténèbres s’éclairciront.
Le corps sera poussière,
Les cendres deviendront chair ;
La vie expirera son ultime souffle
Afin de renaître dans la mort.
Ainsi sera rétabli l’Équilibre.
Afficher en entierchapitre 1
Le premier souffle est le plus atroce.
On dirait que mes poumons se font sauvagement limer. Ça fait mal, ça fait terriblement mal. Ma gorge se coince jusqu’à ce que soudain, ça débloque. Un sifflement aigu. Une douleur persistante dans ma cage thoracique. C’est moi qui respire comme ça. Un relent de terre, de moisissure et de décomposition envahit mes narines. Mes paupières se soulèvent difficilement. Tout est d’un noir d’encre autour de moi. Si noir. Si silencieux. À part mon sifflement d’agonie. Couchée. Je suis couchée sur le dos. Les mains croisées sur la poitrine. Un matelas sous moi. Impossible de bouger. Mes extrémités sont trop rigides. Je me sens faible. Oh, si faible. Où suis-je ? J’attends. J’attends. J’attends. Les battements erratiques de mon cœur montent jusqu’à mes oreilles. Mes doigts, je peux maintenant les décroiser. Aïe… J’ai tellement mal à la tête. Et Soif. J’ai Soif. Je lève une main. Touche du bois. Ou du métal ? Je suis enfermée dans un coffre. Non, une boîte. J’ai Soif. Une boîte, oui. En bois. Tout autour de moi, il n’y a que des parois de bois. À droite, à gauche, à mes pieds. Je gratte le couvercle au-dessus de ma tête.
Je suis enfermée dans une boîte.
Un cercueil.
Mes mains tressautent de panique. Ma langue pâteuse colle à mon palais. Mes tripes se nouent d’angoisse. Les battements de mon cœur sont à présent aussi assourdissants qu’une procession de tambours.
– Au… Au secours… À l’aide… !
Ma voix. Si rauque. Si caverneuse. Comme si elle n’avait pas été utilisée depuis des siècles. Je continue de gratter, de supplier. Ça doit être une blague. Une très mauvaise blague. Une erreur ! Je ne suis pas enfermée dans un cercueil. J’étais chez Vince. Oui. Je m’en souviens maintenant. J’étais chez Vince.
Non.
J’étais morte. J’ai vu mon cadavre.
Non. Non.
Je suis vivante. Je respire. Je vis.
Je ne peux pas être ici !
Afficher en entierJ'échange un regard rapide avec Phoebe avant d'emboiter le pas à Vince dans l'escalier. Dans le hall d'entrée, il dépose la valise de sa sœur puis prend mon visage entre ses mains.
- Tu as bien noté le numéro où tu peux me joindre?
- Oui.
- Et celui d'Apollo, lorsque tu auras besoin de te réapprovisionner en sang de cochon?
- Oui, Vince.
Il m'embrasse sur le front.
- Je serai de retour dans deux semaines, promet-il.
Je secoue la tête.
- Prends le temps qu'il te faudra, Vince.
- Ne traine pas dans les rues à la nuit tombée. Je déteste te laisser ici en sachant qu'il y a tous ces Maudits sauvages en cavale... Il nous est impossible de surveiller les allées et les venues des Bronovov et...
- Ne t'inquiète pas pour moi.
Du pouce, je caresse les rides au coin de ses lèvres et de ses yeux. Il appuie son front contre le mien. Je n'ai pas envie de le laisser partir. j'ai peur que le Vince que j'aime soit transformé à jamais et qu'il ne me revienne pas.
- Vince, soufflé-je, incapable d'en dire plus.
- Je t'aime aussi, chuchote-t-il contre ma bouche.
Il m'embrasse, soulève sa valise et celle de Phoebe avant de franchir le seuil.
Vince ne revient pas après deux semaines.
Pas même après un mois.
Afficher en entier– Chut, chut ! Donne-toi du temps.
Il appuie le goulot d’une flasque sur ma bouche. Je crache, tousse, suffoque ; ma gorge est encore comprimée dans un étau. Patient, Vince me chuchote des mots d’encouragement en écartant mes cheveux abîmés de mon visage.
– Doucement… C’est ça, bois doucement…
Je n’arrête pas de m’étouffer. Le sang de cochon me brûle les entrailles plus que la Soif elle-même. Il acquiert graduellement un goût salvateur, il devient ma renaissance, mon réveil d’entre les morts. Ma vue s’éclaircit, mes sens s’aiguisent, mes pensées reprennent un semblant d’ordre, mais la peur subsiste. La peur qu’il s’agisse d’un rêve et que je me réveille, toujours enfermée dans le cercueil. Six pieds sous terre. Sans issue. Sans secours.
Je finis la bouteille de sang. Mon regard fait le tour de la fosse dans laquelle Vince et moi nous trouvons. L’odeur humide de la terre et la température fraîche m’indiquent qu’il a plu dernièrement. Ces détails s’enregistrent bien dans mon esprit, mais mon cerveau peine à les relier, à leur soutirer un sens. La vue de la pelle, appuyée contre le rempart de terre, déclenche un violent frisson dans tout mon corps.
Afficher en entierN'importe quel soldat, n'importe quel militaire ou politicien te dira la même chose : si tu veux venir à bout d'un ennemi, tu dois d'abord le comprendre. Pour comprendre ses motifs, tu dois le connaître.
Afficher en entier–Comment tu te sens ? murmure Vince. Il me remet une seconde flasque alors que je termine tout juste la première.
–Comme une vraie merde. L’ombre d’un sourire joue sur ses lèvres, mais son regard demeure sombre, intense. Est-ce moi… ou ai-je surpris un éclair d’envie dans ses yeux alors que je buvais le contenu de la flasque ?
Il m’embrasse le front, les tempes, la nuque. Ses lèvres glacées déclenchent des frissons en moi.
–Je suis désolé. Tellement désolé, souffle-t-il entre ses baisers nerveux. Je n’ai pas beaucoup de temps devant moi pour tout t’expliquer, mais…
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