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Chaque pays à sa folie. La Bretagne les a toutes.
Jacques Cambry
Afficher en entierIl étire l’ombre de l’Ankou qui se déplace pour venir se fondre exactement en Fleur de tonnerre. L’ombre de l’Ouvrier de la Mort paraît maintenant porter une coiffe d’enfant bretonne. Ô le cerveau de petite fille qu’un tel prodige affole ! Ainsi que l’Ankou, elle lève un bras comme si elle tenait une faux.
Afficher en entier— Tu ne viens pas à la fête, Hélène ? Tu rêves ?
Hélène Jégado, dernière descendante d’une famille noble de Bretagne, est adossée contre une immense pierre levée qui emporte ses pensées au ciel. Sur la lande inondée de clarté lunaire, le surnaturel l’enveloppe.
Afficher en entierLa chanson est terminée. Le maire de Plouhinec se lève pour parler – ce qui lui arrive trop souvent. La majorité s’égrène vers la buvette. Des crêpes s’empilent sur les tables. On renouvelle la provision de far. Le soir verse du feu dans les verres à la fête et les garçons allument des lanternes.
Afficher en entierAu centre du cercle des danseurs a été allumé un grand feu de branchages bourré de pétards. Des explosions filent dans tous les sens, ajoutant des pétillements d’étoiles à la nuit. Vu d’où se trouve Fleur de tonnerre, le tourbillon lumineux ressemble à une petite crêpe posée sur la lande...
Afficher en entierBras dessus, bras dessous, formant une ronde bretonne, femmes, hommes et enfants ont revêtu leurs habits de fest-noz. Les sabots tapent dans la boue et la voix d’un chanteur se lance :
Canomp amouroustet Janet,
Canomp amouroustet Jan !
(Chantons les amours de Jeanne,
Chantons les amours de Jean !)
Fleur de tonnerre les voit tous, là-bas. La petite cornemuse sonne à l’octave supérieure de la bombarde.
Afficher en entierDans une miséreuse chaumière, la porte donnant sur l’extérieur s’ouvre toute grande. Anne Jégado, assise devant son rouet, ne voit que la nuit claire, puis se dessiner la silhouette de sa fille sur le seuil :
— Ah, c’est toi, vilaine groac’h (fée) ! Ce que tu m’as fait peur !
Afficher en entierLa place des yeux et celle du nez de l’Ankou sont vides et la mâchoire inférieure pend. C’est en fait un squelette tenant verticalement une faux plus haute que lui.
Afficher en entierAussitôt, dans la chaumière, tous gardent un silence profond pour bien écouter. Les cheveux de Jean sont tellement raidis qu’il pourrait s’en servir d’aiguilles. Anatole se lève finalement pour observer la route à travers la petite fenêtre de corne.
Afficher en entier— Ben non, je n’ai pas vu l’Ankou, bien sûr ! s’exclame Anne, iris clairs au plafond. Qui voit l’Ankou ne pourra pas le raconter... mais on dit qu’il y a une statue de lui dans la chapelle maudite des Caqueux, tu sais, ces parias qui vivent dans les landes éloignées. D’ailleurs, là-bas aussi, se trouve une pierre levée.
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