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- Eh oui ! Spartiate et ennemi du Maquignon, tout comme toi, siffla-t-il, lisant dans ses pensées.

- Qui es-tu, par Hadès?

- Je me nomme Brasidas, murmura-t-il.

Elle connaissait ce nom - elle l'avait souvent entendu, au cours de ses voyages, lorsque les gens parlaient de guerre.

- Le conseiller? l'officier?

- Espion, pour le moment. Quand nos messages ont cessé de venir de Corinthe, les éphores m'ont envoyé ici pour devenir leurs yeux et leurs oreilles, et faire la lumière sur cette affaire.

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Extrait ajouté par neicna16 2019-08-29T08:31:45+02:00

Sept étés durant, j’ai hébergé un secret dans mes entrailles. Une flamme chaude et fidèle. J’étais seule à la voir et, pourtant, je savais qu’elle était là. Chaque fois que je regardais mon père ou ma mère, je sentais cette flamme enfler, et quand je contemplais mon petit frère sa chaleur se propageait à tout mon corps. Un jour, j’ai osé la décrire à mère. « C’est d’amour qu’il s’agit, Kassandra, me murmura-t-elle, aux aguets, comme si elle redoutait d’être entendue. Mais pas de celui qui a cours à Sparte. À Sparte, on ne peut aimer que sa terre, sa ville et les dieux. » Elle me serra les mains et me pressa de proférer un serment : « N’avoue jamais ton secret à quiconque. »

Une nuit d’hiver, alors que la tempête faisait rage, nous étions assis tous ensemble dans la pièce de la maison où crépitait un bon feu. Le tout jeune Alexios était dans les bras de mère ; j’étais quant à moi assise aux pieds de père. Portions-nous tous les quatre cette flamme secrète ? Cela me réconfortait de le croire.

Le calme qui régnait dans ce havre de paix fut troublé par un raclement d’ongles contre la porte.

La respiration lente et régulière de père s’arrêta. Mère étreignit le petit Alexios contre son sein et contempla la porte comme si elle seule était capable de voir le démon tapi dans son ombre.

— C’est l’heure, Nikolaos, fit une voix aux accents de parchemin déchiré.

Père se leva et drapa son corps musculeux dans sa cape rouge sang. Son épaisse barbe noire ne laissait rien voir de son humeur.

— Attends encore un peu, implora mère.

Debout elle aussi, elle tendit la main et fourragea dans la tignasse de père.

— À quoi bon, Myrrine ? grinça-t-il en se dégageant. Ça ne changera rien à ce qui doit arriver ce soir.

Sur ces paroles, il marcha d’un pas vif vers la porte, empoignant sa lance au passage. Je vis le battant s’entrouvrir et la pluie froide s’abattre sur père dès qu’il fit un pas dehors. Nous sortîmes dans son sillage alors que le vent mugissait et que le tonnerre grondait – car il était notre protecteur.

Puis je les vis.

Ils se tenaient devant nous, disposés en arc de cercle. Les prêtres, torse nu, le front ceint d’une couronne de fleurs. Les éphores en robe grise – des hommes plus puissants encore que les deux rois de Sparte – brandissant des torches que la tempête faisait crépiter et vrombir. Les longues mèches blanches du plus âgé d’entre eux étaient battues par le vent, son crâne dégarni luisait sous la faible lueur de la lune. Il nous épiait avec ses yeux injectés de sang, un sourire malsain sur les lèvres. Il tourna les talons, nous invitant à le suivre sans décrocher un mot. Nous le suivîmes dans les rues de Pitana, mon foyer, l’un des cinq villages sacrés de Sparte. J’étais trempée, et gelée avant même que nous quittions l’agglomération.

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