Extraits

— Est-ce que… c’est les mêmes que la dernière fois ? frissonna Riùn en se souvenant de la plaie saillante qui lui traversait l’épaule.

— Pas du tout, murmura-t-il dans un rire amer. Ces types, c’étaient des petites racailles. Ceux qui m’ont tiré dessus sont beaucoup plus dangereux et ils sont pas près de me lâcher.

— Qu’est-ce que tu leur as fait ?

— J’existe, je crois que ça leur suffit.

Abys marqua une pause pour se masser le crâne et passer un doigt sur le bandage qui couvrait sa blessure. Son regard s’était assombri, mais il continuait d’arborer un sourire ironique à en glacer le sang. Ses cils étaient légèrement humides et sa gorge lourde : depuis son réveil il mourait d’envie de fondre en larmes, mais son orgueil l’en empêchait. Et parler de ça n’arrangeait rien.

— Je suis différent de vous, clama-t-il en faisant semblant d’en être fier. Le gouvernement me considère peut-être comme une sous-merde, mais j’ai eu « l’immense privilège » de naître d’un père A et d’une mère B. En clair, je suis ce que certains appellent un AB. Ou encore un hybride, un demi-sang, une sous-race, une souillure, une erreur… enfin bref, vous avez capté quoi. Les gens normaux s’en foutent et me traitent comme un vulgaire B ; mais les plus tarés voient mon existence comme une tâche, une insulte à leur « sublime caste infiniment supérieure ». Alors puisque je les souille, ils cherchent à m’éliminer. Vous avez compris ou faut que je vous fasse un dessin ?

Icare et Riùn opinèrent du chef en échangeant un regard horrifié : jamais ils n’avaient entendu une telle horreur. L’exploitation de la B-Class était quelque chose qu’ils avaient toujours connu, et il était vrai que certains finissaient par trouver la mort suite à cela… mais le fait que des personnes les traquent volontairement dans le but de les tuer était d’autant plus inhumain.

— Je savais pas qu’une telle idéologie existait, s’indigna Icare en baissant la tête.