Jean-Robert Lépan

J'adore les romans qui démarrent dans toutes les directions, où chaque chapitre ne se termine pas sur un point d'orgue, mais en revanche invite le lecteur à tourner la page avec hystérie afin d'y découvrir l'effet de manque. J'adore les belles histoires décousues où le héros n'est pas celui que l'on croit, où le héros n'est pas un James Bond au look rival, mais monsieur tout le monde affichant sa part de lâcheté, sa part de courage, sa part de tendresse. Le secret de Diane est tout cela à la fois. Je pensais avoir affaire à un roman de gare au vu de la couverture et du titre déformé volontairement par l'éditeur, un remake de nos vieux "Harlequin" ; je viens de me prendre un camouflet d'une violence inouïe. Ce roman est un polar, un thriller, un condensé de "Pulp Fiction" et une belle histoire. Il n'est pas dénué d'une touche d'humour, de sensibilité, de passion, de suspense, d'amour et laisse le lecteur face à un dilemme. Frustré de voir ce mot que j'abhorre arriver trop vite : le mot "FIN". Frustré de demander des comptes à l'auteur qui va m'envoyer ch... à juste titre lorsque je lui soufflerai à l'oreille : "A quand le prochain ?", comme si les romans s'écrivaient instantanément en fonction de la demande.

Diane, 29 ans, a été engagée pour écouter des cassettes et les retranscrire, mot pour mot, pour le compte de madame Schmidt, baronne de 70 ans, atteinte d'un cancer incurable. La baronne dont le but, avant de mourir, est de retrouver une personne "capitale".

C'est en écoutant quelques cassettes que Diane fait la connaissance de Max, beau brun de 33 ans, délégué commercial qui, lors de ses nombreux déplacements, se confie à "Hélène"... son dictaphone.

J'ai beaucoup aimé découvrir cet auteur. Jean-Robert Lépan réussit un roman original qui sort des sentiers battus. Le lecteur, confortablement installé dans son fauteuil, assiste à la retranscription de nombreuses cassettes, enregistrements à travers lesquels Diane découvre l'univers d'un personnage qui se livre sans complexe, sans pudeur ni arrière pensée aucune, ni peur d'être incompris, sans crainte qu'on le questionne ni le juge. L'auditrice idéale en somme.

Mais au fil des jours, cassette après cassette, Diane ne se contente pas de retranscrire ce qu'elle écoute, d'une oreille discrète au début puis avec grand intérêt, elle vit ces scènes, devient curieuse de la suite, accroc à ces confidences. Son besoin d'aller plus loin ainsi que son indiscrétion qui s'apparentent à une sorte de voyeurisme, la conduisent à un besoin irrépressible de percer ce personnage prolixe, charmant et charmeur, sensible, amoureux et désireux.

Si peu à peu les portraits de Max et des personnages qu'il côtoie s'affinent, le mystère demeure quant au lien qui lie Max et cette septuagénaire autoritaire et exigeante, femme d'affaires redoutable.

L'auteur offre au lecteur un roman prenant, suscitant un réel intérêt, mêlant confidences, analyse de la personnalité aussi bien qu'enquête, le tout dans un style vivant, un rythme régulier.

Sur la forme, J-R Lépan a choisi de faire se répondre narration au présent et renvoi au passé, un passé proche qui détient la clé de secrets bien gardés et que tous, lecteurs comme personnages, tentent de mettre à jour. Les personnages ont un caractère bien trempé, le mystère est bien entretenu, l'épilogue insoupçonné.

Autre originalité : s'il n'est pas rare de voir chaque chapitre introduit par une citation célèbre, ici ce sont les paroles de chansons célèbres qui sont mises à l'honneur.