Extraits

La spirale descendante commença le lendemain soir du départ de Mike. Ce fut une longue route qu'elle parcourut, en quête d'oubli. Ce fut affreusement facile. Les gens étaient très gentils dans les bars, mais ensuite, ils se servaient d'elle et la volaient. Lorsqu'elle n'eut plus d'argent, elle vendit les meubles, puis l'appartement. C'était agréable d'avoir une grosse réserve d'argent, de ne jamais avoir à se préoccuper de savoir d'o˘ viendrait la prochaine bouteille, et pourtant, elle continuait à fuir la femme en bleu dont les horribles hurlements l'effrayaient tant et la faisaient plonger si profond. Elle ne redoutait pas les bagarres, ni les sarcasmes des prostituées et des maquereaux. Merde, elle avait arrêté bon nombre d'entre eux. Ils la bousculaient et corsaient ses verres, mais, ivre, elle s'en moquait. Ivre, les hurlements étaient étouffés. Ivre, les hommes qui la pelotaient ne signifiaient rien.

Elle fronça les sourcils. qui hurlait ? quelqu'un hurlait, un son terrifiant qui durait, durait, durait à la rendre dingue. Elle roula au bas du lit et se précipita hors de la chambre. Elle trébucha, tomba sur les genoux, arriva à quatre pattes dans la chambre à coucher. Le hurlement continuait. Elle se mit péniblement debout et aperçut le reflet d'une silhouette dans le miroir de la coiffeuse. Elle se plaqua les mains sur la bouche, se mordant les doigts pour faire cesser les hurlements. Elle était la femme, c'était elle qui hurlait.

Mais tu sais pourquoi ? J'ai travaillé dur pour que nous ayons une maison à nous et que tu puisses avoir ta chance. Il lui embrassa le front. - Tu n'as peut-être pas remarqué que je gagne bien ma vie à présent - cela fait des années que tu aurais pu arrêter de travailler, et puis tu ne vois pas les filles grandir. (Elle s'appuya contre lui et il glissa un bras autour d'elle.) quoi qu'il arrive, nous nous en sortirons ensemble.

Je t'ai toujours aimée. Bon, d'accord, j'ai été obligé de travailler un peu plus que d'habitude ces derniers temps, mais toi aussi. Tu sais que je voulais que tu abandonnes ton travail, tu penses que je ne me suis pas aperçu de la tension dans laquelle tu vivais, mais tu refusais de me parler.

Tu te souviens de ce jour, Mike ? (Il soupira. Elle le regarda, la tête inclinée de côté.) Le meilleur jour de ma vie. Tu venais juste d'avoir ton diplôme et... que s'est-il passé, Mike ? J'ai l'impression de ne pas te connaître, de flotter à la dérive sur une espèce d'océan. Je déteste ce que tu es en train de devenir et je laisse faire, j'ai toujours eu l'impression de ne rien pouvoir te dire, alors que tout a changé entre nous. Tu désires plus ta réussite que ta femme.

- Tu veux dire que tu as déjà parlé à Rooney? demanda-t-elle. - Oui, répliqua-t-il d'un ton sec. Je te l'ai dit hier soir. Comment crois-tu que je l'ai appris, nom de Dieu ? Et à ton avis, que va en penser Donny, s'il voit ça dans les journaux ? - Donny ? fit-elle d'un air ahuri. qu'est-ce qu'il a à voir avec moi ?

Après le coup de téléphone, Mike fit les cent pas dans l'appartement, s'assit dans la cuisine, puis au salon, devant la télé, o˘ il tua le temps en passant de chaîne en chaîne. Il fit un tour dans la chambre des filles, et finit par s'endormir sur le sofa. Il fut réveillé par des éclats de rire aigus. Il se leva et se dirigea vers la fenêtre. Lorraine était sur le trottoir, en train de régler un taxi. Deux personnes se trouvaient à l'intérieur. Lorraine laissa échapper son porte-monnaie, puis tomba contre le mur avant d'entrer d'un pas titubant dans l'immeuble.

Le film était précédé de tant de bandes annonces que Lorraine s'excusa en disant qu'elle allait aux toilettes. Elle avait besoin de boire un coup. Elle se dit qu'en se rendant au bar le plus proche pour en avaler un vite fait, elle serait de retour pour le début du film. Voyant qu'elle n'était pas revenue à la moitié du film, Mike partit à sa recherche. Il appela Rita pour savoir si elle n'était pas retournée à la maison ; ce n'était pas le cas. De retour au cinéma, il annonça aux Patterson que Lorraine leur transmettait ses excuses, mais qu'elle s'était sentie mal et que, plutôt que de g‚cher leur soirée, elle était repartie. Il était 11 heures passées lorsque Mike rentra. Il vérifia ses horaires de service ; comme il le savait déjà, elle était en cong

Les épaules de Tina se vo˚tèrent. Lorraine garnit le plateau, posant chaque tasse sur sa soucoupe avec une précision délibérée. - Après ça, pendant quelque temps, je suis devenue possessive avec mes filles, j'avais peur qu'elles se fassent enlever. «a ne vous quitte jamais. Vous croyez que ça finira par disparaître, mais ça ne s'en va jamais.

Donny Patterson étant son supérieur hiérarchique dans le cabinet juridique o˘ il travaillait, Mike aurait préféré quelque chose de moins banal, mais il entreprit de mettre le couvert. Il entendait Lorraine lire une histoire aux filles, qui riaient aux éclats - elle savait prendre des voix rigolotes. Il sortit des verres taillés et leurs plus beaux sets de table, fit même reluire les couverts. Ensuite il retourna dans la cuisine et commença à préparer une salade. Comme d'habitude, il agit avec ordre et méthode, débitant soigneusement les tranches de tomates, lavant la laitue et le céleri.