Extrait
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Extrait du prologue
UN COUP FATAL
25 janvier 1208
Un petit groupe de moines descendait vers le fleuve. Ils étaient vêtus de la robe blanche caractéristique des Cisterciens, même si, en l'occurrence, elle était plutôt d'un gris sale. Leur chef, Pierre de Castelnau, ne chevauchait qu'une mule, bien que, pourtant, l'humilité ne fût pas son fort.
Lorsque les moines atteignirent les berges du Rhône, le bac était en train de revenir de leur côté. Ils s'installèrent pour l'attendre. Pierre de Castelnau mit pied à terre et se frotta le visage à deux mains. Il était aussi épuisé qu'énervé. La matinée n'était guère avancée et il avait déjà célébré la messe, mais, dans son coeur, il n'y avait ni charité ni compassion.
Pierre et ses compagnons venaient de Saint-Gilles. Le pape l'avait envoyé comme légat pour négocier avec le puissant seigneur de cette ville, le comte de Toulouse, mais celui-ci ne s était guère montré raisonnable. Il refusait d'obéir aux ordres du Saint-Père et d'éliminer les hérétiques de ses terres, alors même qu'il avait déjà été excommunié pour rébellion caractérisée. Pierre avait échoué dans sa mission.
«Que peut-on faire d'un homme qui ne craint pas de se retrouver exclu de l'Église ? pensa Pierre. Un tel homme est déjà pratiquement lui-même un hérétique.»
- Où que vous alliez et quoi que vous fassiez, Pierre de Castelnau, prenez garde ! Je vous surveille...
Tels avaient été les derniers mots que lui avait criés le comte la veille, au moment où le légat du pape s'apprêtait à quitter la cour de Saint-Gilles.
«Vaines menaces !» songea Pierre qui avait passé la nuit dans une auberge avec ses compagnons avant de se diriger vers le fleuve. Une fois de l'autre côté, à Arles, il entreprendrait le long voyage jusqu'à Rome pour aller rapporter au pape que le comte n'obéirait pas plus à son maître sur la terre qu'à son Maître au ciel. Ce comte était une brute bornée mais Pierre n'en avait nullement peur.
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