Extraits

- Je crois que tu n'as pas bien compris, princesse. lâcha-t-il en détachant chaque syllabe. Je resterai à tes côtés jusqu'à la fin, même si je dois y laisser la vie. Serment ou non. Si je souffre trop pour courir, je marcherai. Et si je n'ai pas la force de marcher, je ramperai. Mais je continuerai à lutter pour te protéger jusqu'à ce que mon cœur cesse de battre.

Non, c'est bien trop facile. La vraie question serait plutôt : es tu prête à vivre pour moi ?

Je me figeai. Le sang battait dans mes tempes, ma tête tournait. Plus rien ne me raccrochait au monde réel, si ce n'est la pression de ses doigts sur ma peau.

- Le monde n'est pas blanc ou noir, soutint Alistair. Ce n'est qu'une infinie palette de grisâtre dans lesquels nous autres, pauvres humains, essayons de nous dépatouiller pour gagner quelques nuances plus claires ou plus sombres, au choix.

- C'est déprimant, déplorai-je. Je préfère croire qu'il existe des personnes foncièrement bonnes qui prennent des décisions justes, quelles que soient les circonstances.

Alistair laissa planer un moment de silence, signe qu'il méditait sincèrement sur le sujet. Cela me fit plaisir : il était parfois difficile de tirer d'Alistair plus qu'une simple boutade. J'appréciais sa légèreté presque autant qu'elle m'agaçait.

- Je n'aurais jamais cru dire ça un jour, mais je commence à comprendre votre point de vue. Il existe peut-être des personnes foncièrement bonnes, quoique naïves, dans ce monde truffé de bandits et d'hypocrites.

Une infime seconde, je crus entendre la voix de Whisper au loin. Je suis là, me disait-elle. Je fermai les yeux. Oui, à cet instant précis, j’eus l'impression qu'elle était à mes côtés. Tout près.

Pardonne-moi Whisper.

Et nos corps tombèrent dans le vide.

Ma sœur n'avait jamais paru aussi sûre d'elle qu'à cet instant. Sans apparat ni couronne, cela ne l’empêchait pas de ressembler à une reine. Une souveraine.

- Je ne ronfle pas , démentit Alistair, vexé.

Il se redressa et dépoussiéra ses vêtements. Sa mine hagarde et ses yeux bouffis indiquaient clairement que je venais de couper court à un profond sommeil.

- Tu ronfles plus fort que dix ivrognes réunis, répliqua Olardoric avec sévérité.

- Tu es exceptionnelle, murmura Orabelle en effleurant mes cheveux, si semblables aux siens. Tu es l'unique magicien de cette contrée capable de survivre sans ses pouvoirs. Cela fait de toi la plus forte d'entre nous. La petite rescapée...

S'il ne désirait pas se sauver, alors je le sauverais moi-même. Quitte à mettre en danger Ergon et toutes les terres inexplorées de ce monde ! Quitte à déclencher une guerre, à trancher des gorges et à baigner dans le sang de mes victimes le reste me mes jours.

Voilà pourquoi Alistair me faisait si souvent penser à Eden ; ils avaient tous deux été brisés.

- Tu es forte, dit-elle e, plongeant ses yeux dans les miens. Tu es une jeune femme extraordinaire en tout point, et je suis incroyablement fière de toi. Ne l'oublie jamais.

- Je vous aime, mère.