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Extrait

Extrait ajouté par Simiche 2013-06-07T01:50:33+02:00

Matthew ne pouvait s’empêcher de la dévorer des yeux. Elle portait un manteau gris bon marché. Ses doigts gantés frémissaient sur la poignée de son parapluie. Il aurait voulu la rassurer mais il ne parvenait pas à bouger, fasciné par la façon dont sa jupe épousait la courbe de ses hanches et de ses cuisses. Il contempla sa taille et sa poitrine, avant de tenter de croiser son regard à travers la voilette noire qui dissimulait son visage.

Il avait les mains qui tremblaient. Etonnante, cette fébrilité chez un homme habitué aux étreintes furtives et aux rendez-vous clandestins. Mais il avait le sentiment que cette rencontre ne ressemblerait pas aux autres. Jane était… spéciale.

Surmontant l’émotion qui le paralysait, il lui tendit la main.

— Venez à moi, Jane.

Après un long moment d’hésitation, elle jeta un regard derrière elle, en direction des fenêtres crasseuses de l’hôpital, comme si elle demandait la permission. Inglebright les observait-il, caché derrière un rideau ? L’image du médecin, tapi dans l’ombre, disparut de son esprit quand Jane avança vers lui. Les quelques pas qu’elle fit pour le rejoindre lui parurent une éternité. Il résista à grand-peine à l’envie d’effacer en deux enjambées la courte distance qui les séparait encore et de l’écraser contre lui. Mais il s’obligea à ne pas bouger. Il avait voulu cet instant, la regarder s’offrir à lui de sa propre volonté.

Elle glissa timidement sa main dans la sienne et une impression étrange l’envahit aussitôt. Baissant les yeux sur leurs doigts enlacés, il éprouva un sentiment inhabituel de complémentarité. Son instinct lui cria de se méfier, de chasser au plus vite cette pensée ridicule de son esprit mais à cet instant elle parla, et le son de sa voix répandit une chaleur exquise dans tout son corps.

— J’ai failli ne pas venir, avoua-t‑elle tout bas.

Au diable son instinct ! Il n’était pas le sulfureux duc de Wallingford avec Jane. Il était Matthew, un homme neuf.

Otant son gant, il pressa ses lèvres sur le point sensible au-dessus du pouce et ferma les yeux. Il s’imprégna de son odeur de savon mêlée à son propre parfum, aux notes d’épices orientales. L’association, terriblement érotique, lui monta à la tête.

— Je…

Elle déglutit et détourna les yeux.

— Je ne suis pas sûre…

— Laissez-moi vous aimer, Jane, murmura-t‑il, incapable de s’empêcher de porter sa main une fois encore à ses lèvres.

Relevant la tête, il scruta son visage levé vers lui et crut entrevoir des prunelles vertes derrière la voilette noire.

— Aucune question, Jane. Je ne prendrai que ce que vous êtes prête à m’accorder.

Il vit sa gorge se contracter et effleura la peau délicieusement douce de son cou du bout du doigt. Son cœur battait si fort. Pour lui.

— Venez à moi, murmura-t‑il en l’attirant plus près. Mon attelage vous attend. Je vous attends.

Avec un soupir étranglé qui le bouleversa, elle l’autorisa à l’escorter jusqu’à la voiture, baissant la tête pour dissimuler son visage au cocher, aussi immobile qu’une statue sur son siège, le regard fixé devant lui.

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