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Difficile d’imaginer un aussi sombre avenir en cette belle journée printanière du bord de mer breton, propice aux réjouissances populaires. Comme le veut la coutume, les gars se sont réunis au grand menhir, longue pierre taillée héritée de la nuit des temps. Tous les hommes jeunes et valides sont là. Il faut dire qu’une absence serait mal tolérée. Même la mère Le Goff, qui a tenté d’y soustraire son grand dadais de rejeton, a dû céder. Elle maugrée dans son coin, se plaignant à voix basse qu’il va encore lui falloir raccommoder patiemment les vêtements de son gaillard après l’avoir ramassé à demi mort, c’est sûr.
Le gamin, comme tous les autres paysans ou pêcheurs, est vêtu de tissus grossiers issus de l’artisanat familial, portés jusqu’à usure complète. Un peu simplet, Ehouarn Le Goff est tout fier de participer à la rencontre. Jouer à la soule est un honneur, une obligation, un combat qui laisse rarement intact et dont les récits alimentent les longues veillées d’hiver.
Deux villages se font face : les natifs de Plouganec contre ceux de Saint-Rennac. L’enjeu : se saisir de la soule, boule de cuir remplie de foin, et l’emmener sur la place du marché de l’autre paroisse, au prix d’une lutte acharnée où tous les coups sont permis.
Sous les applaudissements de l’assistance, les deux capitaines d’équipe se toisent. À gauche : Gaël Goelou, colosse débonnaire ; à droite : Gilles Le Bars, jeune homme au sang chaud, dont la chevelure dorée et les grands yeux émeraude taillés en amande laissent peu de jeunes filles indifférentes.
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