Extraits

En attendant, voici un proverbe coréen. Il dit qu'un tigre, lorsqu'il meurt, abandonne sa peau derrière lui. Mais qu'un homme laisse son nom.

Shon Kee-chung était son nom.

- On a appris récemment que des femmes coréennes sont parquées dans des baraques où elles servent à... satisfaire les soldats japonais ! Tu te rends compte ?

Il fut seulement surpris d'avoir éprouvé un tel plaisir à courir alors que jusque-là, il n'aimait rien tant que la lenteur. Quelle découverte ! Il avait aimé avoir le visage fouetté par le vent. Il avait aimé la chaleur dans ses veines, le martèlement sous ses pieds. Mais ce qui lui avait plu surtout, c'était cette sensation de bondir, pour voler au-dessus du sol. Puis de retomber. Puis s'envoler à nouveau. A chaque foulée, il lui avait semblé osciller entre la terre et le ciel.

La Corée du Sud n'existait certes pas encore - ce n'était qu'une question de jours -, mais depuis deux semaines, elle avait déjà son drapeau. Un taegeuk bleu et rouge sur fond blanc, entouré des quatre symboles de l'eau, de la terre, du feu et de l'air. Placé sous le signe de l'harmonie.

Un vent de révolte balaya le pays, éveillant les esprits, échauffant les coeurs. Partout, une flamme jaillit spontanément, une force se leva, un souffle gonfla ces corps qui souffraient, ces âmes humiliées, ces coeurs qui résistaient. Sur les mairies, on osa hisser le vieux drapeau coréen, celui-là même que les Japonais avaient banni des bâtiments publics.

- Tu sais qu'ici, à Berlin, règne un Allemand qui est l'ami des Japonais. Il voudra que ses amis l'emportent. Va lui montrer de quoi sont capables les ennemis de ses amis. Va lui montrer que nous sommes plus fort que ceux qui se prétendent nos maîtres...