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Extrait

** Extrait offert par Harper St. George **

Chapitre 2

Aisly ravala ses larmes et se remit à creuser la terre avec sa petite pelle. Elle s’acharnait à déraciner un pied-d’alouette mais la plante lui opposait une résistance des plus obstinée.

Elle était déjà partie une bonne partie de la matinée et une longue marche l’attendait pour rentrer. Elle n’avait pas un instant à perdre. Les filles allaient bientôt finir les ourlets des robes sacerdotales. Elles maîtrisaient ce motif d’entrelacs depuis des mois mais si Aisly ne rentrait pas rapidement, ses jeunes apprenties allaient se lasser et sortir jouer dans le soleil du matin. Jamais elle ne réussirait à les faire rentrer pour achever leur ouvrage et la journée serait perdue.

Elle ne pouvait pas se permettre de perdre une journée de travail : cela la mettrait en retard pour honorer ses commandes. L’abbesse répétait déjà à qui voulait l’entendre que les prix pratiqués par Aisly tenaient du péché et qu’une femme plus dévote aurait dû se sentir honorée de travailler pour Dieu et l’abbaye… Elle n’hésiterait sans doute pas à déduire une pénalité de retard du paiement.

Aisly n’avait jamais cru qu’en accomplissant ses broderies, elle travaillait « pour Dieu ». Mais elle savait qu’il s’agissait là de son unique moyen de subsistance, et qu’il risquait bien de lui échapper.

C’était pour cette raison qu’elle pleurait, ce matin. Pour cela qu’elle s’attaquait si vigoureusement à la racine de la plante qui finit par lâcher, à la surprise d’Aisly qui fut propulsée en arrière et tomba.

Si elle s’était rendue dans la forêt au lieu d’attendre que la commande soit enfin achevée, c’était parce qu’elle ne voulait pas qu’on la voie pleurer. À l’aube, ses règles étaient arrivées, lui rappelant cruellement qu’aucun enfant ne viendrait, que plus rien ne la liait donc au foyer qu’elle avait appris à aimer et dans lequel elle puisait sa volonté et sa force. Non, rien n’empêcherait plus son beau-père, Wulfric, de la chasser de la maison de feu son époux. Elle avait pourtant signé, le jour de ses noces et sous le regard de lord Oswine, un contrat qui l’autorisait à rester dans la maison familiale en cas de veuvage. Mais elle n’avait pas retrouvé le document dans les affaires de Godric. Sans enfant pour la lier au domaine, rien ne la protégeait de la vilenie de Wulfric et elle serait bientôt jetée à la rue, privée de tout moyen de gagner sa vie.

Retrouvant peu à peu son calme, elle fouilla les feuillages bas à la recherche de sa musette. Les larmes ne servaient à rien, autant les ravaler et reprendre le contrôle de ses émotions. Inutile de trop penser au père de Godric, cet homme horrible qui la menaçait — pour le moment, rien n’était encore joué. Elle avait encore quelques mois devant elle avant qu’il puisse tenter quoi que ce soit, et les anciens du village ne semblaient pas décidés à accepter cette cruelle décision.

De toute manière, même s’ils acceptaient, il leur faudrait encore convaincre lord Oswine. Après la mort des parents d’Aisly, emportés par la fièvre, il était devenu son tuteur, ainsi que celui de son frère. Il en avait fait ses domestiques plus que ses enfants adoptifs, mais lord Oswine avait tout de même pris son rôle de tuteur au sérieux. Il avait assisté au mariage d’Aisly et avait personnellement supervisé la signature du contrat.

Elle finit par retrouver son sac de peau au milieu du tapis de feuilles mortes qui jonchait le sol et y fourra la plante avant de le fermer. Il était sans doute stupide de sa part de récupérer ce pied-d’alouette pour le replanter chez elle et espérer qu’il prenne racine, mais elle en avait besoin pour s’entraîner à teindre ses fils elle-même au printemps. Au moins, cela lui économiserait quelques pièces. Elle cala sa pelle sous sa ceinture, récupéra la vieille épée de Godric qu’elle avait laissée par terre et entreprit de rentrer.

Sous ses doigts, elle pouvait sentir le métal froid de l’arme, qui la rassurait plus que Godric ne l’avait jamais fait. Pourtant, il s’agissait là de l’épée qu’il utilisait lorsqu’il était enfant, pas de sa lame de guerrier que les Danois lui avaient confisquée avant de le tuer, alors qu’il s’était rendu dans leur campement afin de parlementer. Après la mort de Godric, les Danois étaient même venus réclamer une compensation financière à Aisly, pour l’incendie que son mari était censé avoir déclenché et qui aurait détruit quelques-unes de leurs maisons. Elle avait même dû leur donner ses tapisseries, la laine qu’elle gardait en réserve et la plupart de ses moutons. La perte des bêtes était douloureuse mais moins que celle de la laine, qu’elle avait conservée pour tisser des vêtements et les vendre. Céder son stock aux envahisseurs l’avait ruinée…

Néanmoins, ce qu’elle pleurait le plus, c’était la collection de tapisseries tissées par sa mère, qui avait été une brodeuse assez connue dans la région d’Heiraford. Ses œuvres valaient assez cher, mais Aisly les avait surtout chéries car elles étaient les seuls souvenirs qu’elle gardait de cette femme. Elle avait perdu sa mère à l’âge de huit ans et les images heureuses de son enfance restaient floues… Elle se rappelait surtout les heures passées à apprendre les points, aux côtés d’une maman si patiente ; puis, après son deuil, des années durant lesquelles elle avait essayé de recréer les broderies ornant les tapisseries. Hélas, les Danois avaient fini par venir et lui avaient arraché ce dernier lien avec son passé. Sans prévenir. Ils avaient brutalement frappé à sa porte un matin, lui avaient raconté ce que son époux était censé avoir fait et lui avaient annoncé sa mort. Quelques instants plus tard, ils étaient repartis en emportant tout ce qu’elle avait de plus précieux.

Par moments, elle s’en voulait de pleurer ses tapisseries plus que son époux. Mais le veuvage était bien plus agréable que la vie aux côtés de Godric. Après ces premières semaines de liberté retrouvée, elle s’était déjà promis de ne jamais se remarier, de ne jamais tomber à nouveau sous la houlette d’un autre tyran.

Pour tenir parole, elle devait apprendre à se protéger toute seule. Son frère, Alstan, était l’un des meilleurs hommes de lord Oswine et elle avait réussi à le convaincre de passer quelques heures à lui enseigner le maniement de l’épée. Avec si peu d’entraînement, elle n’était pas encore capable de grand-chose. Mais malgré tout, elle se sentait déjà plus à l’aise quand elle brandissait son arme. La petite lame, légère en comparaison de celle que Godric avait portée au combat, serait certainement incapable de briser les os d’un adversaire, mais elle suffirait au moins à la protéger.

Les deux mains bien fermées sur la garde, elle parvenait à brandir son arme sans hésitation et ses bras ne tremblaient plus comme la première fois qu’elle l’avait saisie, quelques semaines plus tôt.

Alors qu’elle cheminait pour rentrer chez elle, elle donna quelques coups dans le vide et s’essaya à une ou deux parades. La lame trancha l’air immobile dans un sifflement sec. Avec le temps, elle arriverait peut-être un jour à faire face à un véritable adversaire. Cette idée lui arracha un sourire. Elle aperçut devant elle un tronc d’arbre déformé par un nœud et fit tournoyer son épée avant de frapper le nœud en plein cœur. Parfait !

Son humeur s’améliorait peu à peu. Elle poursuivit sa route en frappant tas de feuilles mortes et branches basses dans un sentiment de triomphe. Ce n’était certes pas grand-chose mais, au moins, elle essayait de conserver son indépendance. Si elle parvenait à prouver à tout le monde qu’elle était capable de se protéger toute seule et de se nourrir, alors Cuthbert et les autres anciens ne seraient pas obligés d’insister pour qu’elle prenne un second époux. Bien sûr, il faudrait aussi qu’elle convainque son frère. Elle pourrait vivre heureuse, toute seule. Pour cela, il fallait tout faire pour que ces hommes aient confiance en elle.

Evidemment, ne pas se remarier voulait dire qu’elle n’aurait pas d’enfant. Elle s’immobilisa un instant et posa la main sur son ventre plat ; elle ne pouvait mentir et prétendre que cette perspective la laissait indifférente. Aussi loin que ses souvenirs remontaient, elle avait voulu un enfant, une famille. Et sa vie dans la demeure de lord Oswine ne lui avait jamais permis de recréer le foyer qui leur manquait tant, à son frère et à elle. Les longues nuits passées au coin du feu avec sa mère pour apprendre le métier, et les récits héroïques de son père appartenaient au passé. Quand elle avait épousé Godric, un garçon qu’elle connaissait depuis l’enfance, elle avait pensé qu’enfin ses rêves de famille allaient se réaliser. Mais… Mais Godric était Godric. Il se souciait davantage des récoltes, de l’argent qu’elle gagnait grâce à ses broderies, des Danois — de tout, en fait, sauf d’elle. Rapidement, elle avait commencé à être plus heureuse les soirs où il ne rentrait pas à la maison que les soirs où il était à ses côtés.

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