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"Mon frère dort. Il a disparu petit à petit. Il ne reste que sa respiration. Encore une fois, je m'accroche à elle. Quand il dort, il se transforme en machine à retenir le monde. C'est un gros travail pour que rien ne bouge. Sinon, les murs tombent, les choses basculent, deviennent floues. Parfois, je peux passer au travers, m'enfoncer dans mon lit, sans pouvoir m'en empêcher.
Il fait ça avec sa respiration. C'est lui qui durcit les os du monde, lui qui lutte contre le voleur de squelettes. En dormant, il empêche le plancher de devenir un marais de sables mouvants. Et mon lit de devenir liquide. Les choses ont des os. Et aussi des racines, loin, au-dehors d'elles, entortillées à l'intérieur des autres. C'est mélangé, quand ça se ramollit à un endroit, ça finit par se ramollir partout. Et moi, je ne fais plus que m'enfoncer dans la bouillie.
Ce soir, le monde tient. Je regarde la raie de lumière sous la porte de la chambre. Je ferme lentement les yeux jusqu'à ce que la lumière ne fasse plus qu'un point, je laisse mes paupières tremblotter et je recommence en réduisant le point le plus possible."
Afficher en entier<< Cette lettre aussi, elle écrit à des gens qui sont dans le Silence-Endormi. Je le sais par la couleur des mots, la couleur de la petite voix de l'écriture détachée qui flotte dans ma tête.
Je plie la feuille doucement parce qu'il y a dans chaque mot quelque chose qui peut avoir mal, quelque chose qui peut saigner sur mes doigts.>>
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