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Chère douce Madeleine,
Merci d'abord pour la lettre qui est la plus chaude, la plus humaine, la plus lourde de coeur que j'aie reçue depuis des années. Chère vous, chère chère vous ! Vous m'avez ouvert un passage jusqu'à votre intimité, cette intimité du dedans qui échappe à tous les regards, mais qui est aussi l'ultime fond du réel, le point même où, en nous, les choses prennent racine, le lieu de toutes les origines et de toutes les naissances, la source et le foyer, l'intention et le sens. Vous m'avez ouvert un passage jusqu'à votre solitude peuplée de rêves, jusqu'à cette île qu'on défend jalousement avec le chagrin secret que ce ne soit qu'une île. Mais qu'un autre être y entre tout à coup avec nous, et ces rêves deviennent la face même de la réalité et l'île est le continent : alors se produit l'émotion la plus aiguë qu'un être humain puisse ressentir - l'émotion du partage. Je m'arrête sur le seuil de ce domaine où l'on n'accède point sans une sorte de tremblement, et je ne sais vous dire que : "Chère vous ! chère chère vous ! Si vous pouviez savoir ce que vous venez de me donner !"
De Ilo à Madeleine - 2 mai 1940
Afficher en entierQuand vous m'avez dit "vous avez une âme pure, une âme de poète" j'ai essayé d'ironiser. Mais en même temps, j'ai levé mon visage vers le vôtre. Et subitement, tout fut grave, tout fut grâce. Vous avez penché vos lèvres qui ont effleuré mon front là, juste à la racine des cheveux, un peu à droite... Ce sera, à jamais, un endroit sanctifié, l'endroit de ton premier baiser : pudique, fraternel, posé comme un sceau sur ma vie.
Les baisers ardents qui ont suivi ne pouvaient pas ne pas être, parce qu'ils croyaient écrire le mot "fin" à une brève et jolie rencontre.
Tandis que le baiser de rêve, à la racine de mes cheveux, osait ouvrir la voie à une promesse qui se formulait hors de nos consciences.
Roberte à Rob, Avignon, 1938
Afficher en entierMaintenant que je vous ai retrouvée, je viens vers vous avec le même grand respect, la même pureté que jadis. Ne me repoussez pas durement, comme autrefois au premier abord devant l'église St-Germain-des-Prés. Rappelez-vous qu'ensuite vous aviez reconnu qui j'étais. Vous m'aviez laissé vous parler. Car il s'agit de bien autre chose que d'amour. Autre chose de plus pur et de plus mystérieux encore que l'amour. Et en effet, je vous le dis avec déchirement : peu m'importe, à présent, que vous soyez mariée. Cette douleur-là est enterrée aujourd'hui. Mais ce à quoi je ne me résignerai pas, c'est à ne pas vous retrouver, c'est à ne jamais plus vous voir, à passer ma vie sans savoir où vous êtes. Compter sur la mort seulement pour de nouveau, je ne sais où, vous rencontrer ! je vous supplie de me délivrer de cet enfer : "Ne me damnez pas par la privation de votre visage." Je vous supplie de faire attention à cette chose affreuse que je vous dis de tout mon coeur : c'est que je n'ai pas envie de vivre loin de vous.
Henri-Alban Fournier à Yvonne de Quiévrecourt, mai 1913
Afficher en entierIl y a celles que l'on épouse et celles que l'on étreint.
Afficher en entierLe vrai bonheur, c'est d'être, d'exister par l'autre, pour l'autre et à travers lui..
Afficher en entierN'oubliez jamais que les yeux de cette personne âgée qui vous suit du regard en vous voyant passer dans la rue ont toujours vingt ans. C'est notre corps qui vieillit. Mais c'est toujours avec des yeux de vingt ans que nous apprécions la grâce de être humain que nous croisons.
Afficher en entierLes plus belles histoires d'amour ne sont jamais mièvres... A l'exemple de la vie, elles ne sont jamais monolithiques, mais toujours ambivalentes, nourries de miel et de vinaigre, plus que d'eau de rose... A l'exemple de la vie, tôt ou tard, elles rimeront avec la mort. A l'image de notre destinée.
Afficher en entierLucienne,
Je me réfugie en toi, cette nuit, comme dans le coin le plus doux, le plus secret, le plus obscur?. Je n'ai jamais été plus seul, plus nu. Jamais plus prés de cette limite qui sépare la lumière de l'ombre. je n'ai pas de larmes. J'écris avec les yeux secs. Mais je veux cette dernière illusion, ce dernier mirage : ton amour.
Lis lentement. Comme je t'écris. Avec entre chaque syllabe, des repos misérables. Le désespoir ne coule pas à pic, surnage. Des minutes. Laisse-moi ces minutes. Ne souris pas. Pleure si tu peux. il me faut que, liés, nos doigts s'accrochent aux dernières épaves. "
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